Dressage de domestique et éloge de la “souffrance” au Ministère de l’Éducation


Macron organise-t-il une expérience sociale avec les profs ? Il y a de quoi se demander, étant donné les ministres de l’Éducation qui sont nommés depuis son arrivée au pouvoir.


Anne Genetet et Dolores Ombrage : entre la nouvelle ministre de l'Éducation Nationale et la directrice fasciste de Poudlard, on a du mal à faire la différence.

Le Ministère de l’Éducation est le plus important de France : 1,2 million d’agents dont 713.500 enseignants dans le public, il représente un cinquième de l’emploi public en France. C’est le premier budget de l’État, et le ministère le plus stratégique, puisqu’il sert à former les générations futures.

À la tête du ministère, on pourrait y trouver des personnes compétentes, formées aux méthodes pédagogiques, des gens qui pratiquent et aiment l’enseignement, qui connaissent ce métier et respectent son personnel. Mais non, Macron place à chaque fois les personnes les plus incompétentes, méprisantes et étrangères au métier qu’il a pu trouver.

L’avant-dernière haïssait l’Éducation Nationale au point de mettre ses enfants dans une école privée catholique intégriste, Gabriel Attal n’a jamais posé ses fesses sur les bancs d’une école publique, et son prédécesseur, Blanquer, envoyait ses consignes aux profs par mail, la veille pour le lendemain, pendant ses vacances à Ibiza. Comment Macron pouvait-il aller plus loin ? La réponse avec la nouvelle ministre, qui est un record absolu : non seulement Anne Genetet n’a absolument aucun lien de près ou de loin avec l’Éducation, mais elle incarne l’antithèse absolue des valeurs attendues de l’enseignement :

Exploitation de domestiques étrangères

Anne Genetet a longtemps été «expatriée», le nom poli pour qualifier les immigrés occidentaux, à Singapour. Elle y a fondé une entreprise, «Help Agency», pour conseiller les autres occidentaux à bien dresser leurs domestiques. «Helper», c’est le mot poli pour appeler une employée de maison, une «bonne», voire une esclave à domicile.

Sa «société de conseil en recrutement et gestion d’une employée de maison» disposait d’un site qui a été supprimé précipitamment, de pages sur les réseaux sociaux, et proposait des vidéos. Anne Genetet donnait également des conférences dédiées «à l’embauche d’une Helper à Singapour». Par exemple, elle expliquait que les congés payés ne sont «ni obligatoire, ni recommandé : c’est laissé au libre choix de l’employeur». Zéro droit du travail, le maître peut choisir s’il offre gracieusement une pause à sa «bonne».

Autre conseil : «N’embauchez pas une domestique qui a déjà travaillé pour des occidentaux, elle risquerait de se montrer plus exigeante». Anne Genetet ajoute : «Une absence d’expérience dans une famille expatriée n’est pas un handicap», celles qui n’ont connu que des familles chinoises sont «plus flexibles, plus attentives» et ont un «grand sens du service». Traduction : prenez une domestique sans défense, qui n’a jamais été bien traitée et qui n’a aucun point de comparaison, c’est plus simple de l’exploiter.

Dans sa communauté, une des lectrices qui suit «Help agency» publie sur son blog la photo d’un placard avec un matelas où elle logeait sa propre employée, et explique qu’il faut éviter «émotion» et «compassion» envers sa domestique.

Enfin, Anne Genetet décrit les domestiques, souvent issues à Singapour de familles pauvres des Philippines, comme des personnes sous-développées qu’il faut dresser : «L’employée (..) peut être difficile à gérer, refusant parfois de se soumettre à vos exigences» ou «ses phrases sont longues, ses idées parfois brouillonnes et les situations qu’elle relate parfois confuses. Il vous faudra un effort de synthèse pour remettre de l’ordre et de la clarté dans ses propos ! Elle traduit ainsi ses codes culturels» ou encore «Le Yes M’am n’est rien de plus qu’un refrain qui exprime la soumission et le respect». Le temps béni des colonies et du paternalisme blanc version 21ème siècle, remixé à la sauce macroniste.

Anne Genetet ne connait rien à l’éducation, mais sa petite entreprise coloniale visant à éduquer le petit personnel de maison a-t-il aidé dans sa nomination ? Est-ce ce qui est attendu d’elle à l’égard des enseignants ?

La «discipline et la souffrance» comme principes éducatifs

Une autre intervention de cette dame donne une idée de sa vision du monde. Députée depuis l’élection de Macron en 2017, elle donne une interview en 2024 où elle explique : «Pour renforcer la cohésion républicaine, nous envisageons aussi la généralisation du Service National Universel à tous les élèves de seconde». Le SNU, c’est un stage encadré par l’armée, où l’on envoie les jeunes se faire bourrer le crâne avec de la propagande macroniste et des discours réactionnaires, le tout en rang et en tenues identiques. Tout ça pour 5 milliards d’euros détournés chaque année des budgets éducatifs. Une horreur sur tous les plans.

Les premières expérimentations du SNU ont déjà donné lieu à des malaises, des agressions contre des adolescentes et des blessures, mais Anne Genetet adore.

Elle a d’ailleurs fait cette déclaration aussi ahurissante qu’inquiétante devant la Commission de la défense de l’Assemblée nationale le 14 mai dernier : «Le principal défi réside dans le fait que l’esprit de défense n’est pas inné. Il doit être cultivé en chaque citoyen, dès le plus jeune âge, pour permettre la défense de la nation par elle-même». Et pour vanter l’instauration du SNU, elle dit «qu’il s’agit de mettre en œuvre la souffrance, la discipline et les rites ; cela pourrait inspirer notre jeunesse».

En résumé : cette bourgeoise née dans une bonne famille de Neuilly ne connaît rien à l’Éducation, mais elle maîtrise bien le dressage de domestique, qu’elle pourra appliquer aux profs, et vante la «souffrance» pour les élèves. Voilà le projet éducatif du macro-lepénisme.


Un retour plusieurs siècles en arrière, et sans la moindre légitimité démocratique. Les enseignants vont-ils accepter ce nouveau crachat au visage ?


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5 réflexions au sujet de « Dressage de domestique et éloge de la “souffrance” au Ministère de l’Éducation »

  1. L’EN a un passé qui la prédistinait à ce genre de demi-cervelle fasciste. J’ai pour ma part eu à souffrir de divers inspecteur/trices de circo, prompt à sanctionner, à convoquer devant les tribunaux de l’IA, dès que tu manifestes ou te syndique, ou pire, participe à des actions revendicatives dans le cadre EN.
    Ces petits kapos, bien payés, qui mettent leurs enfants de le privé prolifèraient nottament en terre de mission comme les Yvelines. La liberté pédagogique est enterrée depuis longtemps, les hausses de salaires, la baisse du nombre d’élèves par classe sont également enterrés – la soumission des syndicats est acquise. Il reste aux nouveau gardiens de la prison éducative pour former du bétail prolétaire à se montrer à la hauteur du personnel nazillon qu’on met à leur tête, et qu’on appelle encore ministre de l’Education Nationale.

    1. @Légion my name: En Bourgogne, on a le même problème, surtout dans certaines disciplines (en physique, à tout hasard). Nos petits kapos locaux, ces profs tellement médiocres mais qui se prennent pour des dieux et qui deviennent inspecteurs/trices pour nous dire comment enseigner, on les appelle la gestapo, toujours prompts à détruire à la tête du client, à n’accepter de liberté pédagogique que si elle correspond à celle des gourous pseudo-pédagos du ministère. Un hymne à la gloire de l’administration sous Vichy (point Godwin atteint).

  2. Peut-être faut considérer que la vraie raison de la présence de cette crevure au ministère est d’avoir, certes une esclavagiste (ça donne le ton pour les profs), mais aussi une incompétente qui sera juste là pour obéir à la vraie patronne, brigitte, cette pseudo-prof du privée qui semble décider de chaque débilité imposée à l’école publique.
    Le fasciste blanquer, qui était à la tête de l’éducation nationale depuis 2009 (la dgesco est le véritable centre décisionnaire du ministère), s’entendait parfaitement avec brigitte. N’Diaye ne s’entendait pas avec, il a donc été dégagé.
    Par ailleurs, le 1er budget de l’état, ce n’est pas l’éducation nationale avec ses 73 milliards d’euros, mais les 160 milliards d’aides publiques données gracieusement aux entreprises privées.

  3. Dressage d’élèves côté ministère, grooming côté Palais … la mort de l’education nationale au bénéfice du privé certes , mais “a death by SNU-SNU” :).

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