Les assureurs dépassés par le changement climatique


Les assurances au sein du système capitaliste sont des gigantesques parieurs qui, à partir d’études et de statistiques, évaluent la probabilité qu’un événement surviennent et son coût d’indemnisation.


Un cyclone vu de l'espace : le cauchemar des assureurs

Ensuite il suffit de faire payer suffisamment aux assuré-es pour dégager du bénéfice. Cette pratique est issue d’une longue histoire de l’assurance débutant probablement au IVème siècle et permettant à un capitaine de mettre son navire en gage pour réunir les fonds et finir son voyage. Le prêt devait alors être remboursé uniquement si le bateau terminait son voyage.

Mais dans un monde où le changement climatique bouscule les règles, ce «service» d’escroquerie organisée déchante. En octobre 2020, dans la commune de Breil-sur-Roya, s’abattait une pluie torrentielle due à la Tempête Alex. Cette tempête avait alors fait une dizaine de morts et plus d’un milliard d’euros de dégâts dans les Alpes-Maritimes.

À Breil-sur-Roya, la commune a été indemnisée seulement partiellement par son assurance. Les bâtiments communaux ont été indemnisés à hauteur de 6 millions d’euros, mais les effets liés au glissement de terrain n’ont, 4 ans après, toujours pas été indemnisés. Une facture estimé à 4 millions d’euros. Pratique habituelle du régime d’assurance, les mensualités doivent être réglées à échéance stricte par les assuré-es mais les assureurs, eux peuvent mettre un temps considérable à indemniser les assuré-es.

Dans le cas de la tempête Alex, l’état de catastrophe naturelle a été reconnu rapidement après les faits. Cet état d’exception a pour but d’accélérer les procédures de remboursement. Cela rend obligatoire le versement par les assureurs d’une provision des indemnités dans un délais de 2 mois et la totalité de l’indemnité doit être versé dans un délai de 3 mois. La société SMACL Assurances – une entreprise qui assure des collectivités territoriales ou des élus – qui assurait les bâtiments publics à ce moment-là est donc bien en retard et dans un mépris inouï de ses clients.

Comble du cynisme, la société SMACL Assurances a annoncé en juin dernier qu’après le 31 décembre 2024 elle ne renouvellera pas le contrat d’assurance. Scandalisé, le Maire de Breil-sur-Roya, annonce que l’appel d’offre lancé suite à cette annonce est resté sans réponse.

La faillite des assureurs révélée au grand jour. Le changement climatique à l’origine de l’intensification et de la multiplication des catastrophes naturelles n’est plus assurable : les dégâts sont trop élevés, il faudrait mettre la clé sous la porte ou augmenter massivement les tarifs.

Ceci n’est pas une surprise, en 2015 déjà, l’ex-PDG d’AXA Assurance, une compagnie d’assurance qui soutenait l’État colonial et génocidaire israélien, avait annoncé : «Un monde avec une hausse de quatre degrés n’est plus assurable». L’état actuel du changement climatique n’est ‘’que’’ de 1.1°C. Loin des 4°C de hausses annoncés. Les prémices de ces prévisions apparaissent déjà, et pour cause : le régime de Cat-Nat – catastrophe naturelle – créé en 1982 pour améliorer la couverture des risques naturels est d’ors et déjà déficitaire pour la 9ème année consécutive.

Face à ce déficit, le taux de cotisation qui n’avait pas bougé depuis 25 ans va passer de 12 à 20% sur les assurances habitations et professionnels et de 6 à 9% pour les contrats automobiles en janvier 2025. Encore une fois, ce seront les plus précaires qui subiront le plus fortement ces augmentations.

De plus, le cas de Breil-sur-Roya montre que ce n’est même pas suffisant puisqu’ils ne parviennent pas à réassurer leurs bâtiments publics. Comme cette partie de l’assurance habitation n’est pas obligatoire, on peut s’attendre à ce que de très nombreux foyers, par manque de financement, y renoncent, aggravant toujours plus les impacts du changement climatique sur les plus pauvres.

Loin d’être un cas isolé, ce refus d’assurance se présente aussi au Sables-d’Olonne en Vendée, commune frappée très durement en 2010 par la tempête Xinthia et qui subit le même refus de se faire assurer depuis le début de l’année 2024. Plus de 1500 communes en France seraient ainsi concernées. Le risque est complet parce que ce n’est pas simplement le régime d’assurance Cat-Nat qui est refusé à ces communes mais l’assurance dans son ensemble. En effet, les assureurs n’ayant pas le droit de refuser la souscription de la garantie «catastrophes naturelles», c’est le contrat dans son ensemble qui est refusé.

Le coût du changement climatique pour les assureurs à l’horizon 2050 est très surveillé par ces derniers. Entre 2020 et 2050 il pourrait s’élever à 143 Milliards d’euros soit une augmentation de 93% par rapport à la période 1989 à 2019. Il y a quelques semaines, l’ouragan Milton qui a frappé la Floride a causé à lui seul des dégâts estimés à 50 milliards de dollars !

Ces coûts astronomiques pourraient classer les catastrophes naturelles dans la catégorie des risques liés au nucléaire, aux nanotechnologies, à l’amiante et à la contamination des cultures par les OGM, que les assureurs conventionnels refusent déjà de couvrir. Cela force la mise en place de structures encore plus opaques et complexes pour indemniser les risques majeurs dans nos sociétés.

Le domaine de l’assurance n’a donc pas de réponse aux enjeux du changement climatique, confirmant une fois de plus la thèse selon laquelle la vitesse du changement climatique ne permettra pas de s’y adapter. Dans la mesure où le secteur des assurances contribue largement à alimenter la machine économique mondialisée, c’est ce que Marx appelait une contradiction du système : polluer pour faire des profits, mais au risque de provoquer un effondrement économique aux conséquences encore plus importantes.


C’est une fois de plus l’aveu d’échec du capitalisme, un système mené par quelques-uns qui a pour finalité la destruction de l’espèce humaine, emportant au passage une large partie du vivant.


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Une réflexion au sujet de « Les assureurs dépassés par le changement climatique »

  1. L’assurance des capitalistes c’est la division et celle des peuples sera l’union . Sans plus attendre les peuples doivent s’unir pour former le tsunami qui mettra la bourgeoisie dans le trou.

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