
Après s’être mis légèrement en retrait des caméras ces dernières semaines – laissant la place à ses bras droits, le lamentable Bayrou et le raciste professionnel Retailleau – Emmanuel Macron s’est replongé dans son penchant favori : la mégalomanie. Il s’est offert sur TF1 près de 3h30 de show. Un spectacle interminable, sans grandes annonces, mais qui a confirmé l’orientation très à droite de cette fin de règne et qui a laissé planer des silences inquiétants à certaines questions.
La mise en scène était calibrée, le roi répondait à une série de questions d’invités triés par TF1 : la dirigeante de la CGT, une lobbyiste ultralibérale, un maire d’extrême droite, le youtubeur Tibo Inshape… Il a confirmé que son quinquennat finirait comme il a commencé : par le déni de démocratie et le capitalisme sauvage.
Dogme néolibéral
Macron a d’abord exclu un référendum sur la réforme des retraites, qui était pourtant rejetée par 9 salariés sur 10 et qui a provoqué une mobilisation gigantesque en 2023. Le gouvernement a cherché à manipuler les syndicats ces derniers mois en organisant une fausse «conférence sociale» et en leur promettant de discuter de l’abrogation de la réforme. Il n’en est évidemment rien. Et comme Macron ment comme il respire, il a affirmé sur TF1 que sa loi reculant l’âge de la retraite avait été «votée». Tout le monde sait qu’elle a été imposée par 49.3.
Il a aussi annoncé, à propos de la multinationale de l’acier qui programme des licenciements massifs : «Je ne vais pas nationaliser Arcelor, ce serait dépenser des milliards d’euros». Cela veut dire qu’il abandonne les 600 travailleurs et travailleuses qui risquent de perdre leur emploi. Et puisqu’il parle de dépenses, l’État français a offert 300 millions d’euros de subventions publiques à Arcelor. Pourquoi ne pas les récupérer ?
Questionné sur une taxation des «superhéritages», il a répondu : «Je ne crois pas que la solution soit dans l’augmentation de la taxation». Pas question de toucher aux ultra-riches, qui se transmettent leurs privilèges. En revanche, il a évoqué des recettes sur la «consommation», donc les taxes les plus injustes qui touchent les classes populaires.
Macron a aussi annoncé le projet de «fusionner plusieurs aides, comme les allocations familiales, l’allocation logement ou le revenu de solidarité active (RSA)». On le sait, derrière les discours de «simplification», il s’agit bien souvent de raboter les minimas sociaux et les aides pour les plus démuni-es.
Enfin, et c’est l’un des points les plus inquiétants, Emmanuel Macron a ouvert la porte à la suppression du statut des fonctionnaires. La lobbyiste ultra-libérale Verdier-Molinier lui a demandé s’il voulait continuer à garantir «un emploi à vie à la personne employée, dans les collectivités territoriales et les hôpitaux», le président a répondu : «Je pense qu’il faut continuer à moderniser ces fonctions publiques.» Le présentateur a conclu : «C’est donc un oui, un oui avec réserve». Ce serait une attaque gravissime contre le statut des millions de travailleuses et travailleurs du public.
Toujours plus répressif
TF1 a diffusé un reportage sur le trafic de drogue a Morlaix. L’occasion idéale pour faire des annonces sécuritaires. Macron a vanté les différentes mesures répressives des dernières années, par exemple les «opérations places nettes» qui n’ont absolument pas réglé le problème des mafias de la drogue.
La chaîne a donné la parole au maire d’extrême droite hyper-médiatique Robert Ménard, qui a armé sa police municipale depuis des années. Macron a promis «une loi qui donnera la possibilité à tous les maires qui le souhaitent [de] travailler sous l’autorité du procureur» pour leur permettre d’autoriser la police municipale a avoir des pouvoirs étendus «contre les trafiquants de drogue ou les gens du voyage». Une police municipale qui s’aligne donc sur la police nationale, elle-même de plus en plus nombreuse et armée.
Autre annonce qui pourrait sortir de la bouche de Trump : la location de places de prison à l’étranger. En effet, le nombre de détenus explose. Contrairement à ce qu’affirment les médias, la justice condamne toujours plus, et plus lourdement qu’avant. Comme les prisons sont surchargées, la France pourrait payer les pays voisins pour enfermer ses propres détenus. «Il n’y a pas de tabou là-dessus», dit Macron. Une proposition ubuesque. Le président a aussi souligné «l’accélération» de la construction de nouvelles prisons. Une belle vision de l’avenir.
Militarisme
Macron est revenu sur son «économie de guerre» et a rappelé à juste titre qu’il applique depuis 2017 une politique militariste. D’un côté, il a cassé le code du travail, les retraites et les services publics pour faire des «économies», de l’autre, il a versé des dizaines de milliards à l’armée : «On a eu deux lois de programmation militaire». «Le budget des armées en France, c’était un peu plus de 32 milliards d’euros en 2017. Au moment où on se parle, c’est 50 milliards».
Mais ce n’est pas assez : «On doit aller plus vite et plus fort sur les munitions». Il a rencontré pour cela les industriels de l’armement. En France, on manque de lits d’hôpitaux, La Poste a du mal à livrer les courriers, les classes sont surchargées, mais on fabrique efficacement des bombes.
Referendum
Cela devait être la grande annonce de la soirée, pronostiquée par tous les éditorialistes. Finalement, Macron a botté en touche et s’est contenté d’annoncer la possibilité d’un «consultation multiple, c’est-à-dire un référendum, plusieurs référendums en même temps, dans les mois qui viennent», mais sans rien préciser.
Islamophobie dans le sport
Interrogé sur l’interdiction du voile dans les compétitions sportives, Macron a confirmé la police islamophobe de l’État français : «interdire le port de tout signe religieux dans les compétitions». Pendant les JO, des athlètes françaises musulmanes n’avaient pas pu concourir alors que leurs homologues étrangères avaient participé avec leur voile.
La France est le seul pays d’Europe à imposer de telles restrictions. De l’Allemagne, à la Suisse, en passant par l’Italie, pourtant dirigé par l’extrême droite, le port du voile est autorisé dans le sport.
Post-vérité
Le rapport du président à la vérité est particulier, et il l’a rappelé à propos de l’affaire Bétharram. Son premier ministre, François Bayrou, a couvert un gigantesque scandale pédocriminel dans un établissement privé où travaillait son épouse, il a menti à d’innombrables reprises, mais Macron a dit avoir «confiance» en lui : «C’est un homme que je connais depuis de nombreuses années, il sait qui il est et j’ai confiance en lui».
Un troisième mandat ?
Il n’y a pas eu de grandes annonces, mais c’est par son silence que Macron a suggéré des projets inquiétants. Le présentateur a demandé en fin de soirée si le président comptait se présenter à nouveau à une élection présidentielle. Il a répondu : «Je me battrai jusqu’au bout. Et puis quand j’aurai fini, je réfléchirai à la suite. Et à ce moment-là, je pourrais vous répondre. Mais aujourd’hui, je n’ai pas réfléchi.»
Or, Macron n’a pas le droit de se représenter. Un président français ne peut effectuer que deux mandats. Il faudrait une modification de la Constitution ou un état de guerre pour le maintenir au pouvoir au delà d’un second mandat. Sa réponse sème ainsi volontairement la confusion…
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