«Cacalme-toi Cacarine» : petite leçon d’autoritarisme à l’Université de Nantes


Le campus de Nantes serait-il à feu et à sang ?


En haut : des graffitis sur le Pôle étudiant, dont le fameux "Cacarine".
En bas : des flics en tenue anti-émeute sur le campus de l'Université de Nantes.

Il y a quelques jours, nous vous présentions Carine Bernault, la présidente de l’Université de Nantes qui fait résonner le bruit des bottes dans les couloirs de la fac. Alors que le début de semaine avait commencé par une forte présence policière sur le campus, l’autoritarisme est encore monté d’un cran jeudi 25 septembre.

Tout fermer plutôt que laisser bloquer

Cela devient comme un réflexe. À peine une poignée d’étudiant-es tente de se mobiliser qu’un mail tombe de l’administration : les cours sont annulés pour la journée. Une fermeture administrative qui vise à punir l’ensemble des étudiant-es et des personnels de l’université, souvent couplée à l’intervention de la police directement sur le campus au mépris de siècles de franchise universitaire.

Il y a bientôt 20 ans, lord du mouvement contre le CPE, les grévistes occupaient le bâtiment de la Censive pendant 3 mois. On y avait installé des dortoirs, des cuisines, des espaces de réunions, etc. Les Assemblées Générales réunissaient jusqu’à 3000 étudiant-es. Pourtant les bibliothèques universitaires avaient pu rester ouvertes 3 mois durant, et les étudiant-es non-grévistes pouvaient aller y travailler sans problème. Ce jeudi, la bibliothèque de Lettres a été fermée au prétexte ridicule d’une table de pic-nique posée contre la porte. Devant le bâtiment du Tertre, quelques poubelles auront suffit à bloquer tout un campus : c’est presque trop facile pour être vrai.

L’objectif de Carine Bernault et son équipe est ainsi de criminaliser toute forme de contestation, en faisant peser la responsabilité du bon fonctionnement de l’université sur les épaules des contestataires. Pourtant c’est bien l’administration qui en est responsable : la fermeture est un choix politique délibéré.

« Cacarine » : crime de lèse-majesté

Si l’administration est si sensible à la contestation, c’est peut-être parce qu’elle se sent directement visée. Et Carine Bernault s’est particulièrement émue d’un tag la visant nommément. Si sensible que Ouest-France, compatissant, a flouté l’inscription « Cacarine » laissée sur le Pôle Étudiant. Le jeu de mot est accompagné d’une menace aussi scatophile que ridicule : « On va chier sur ton bureau ». La portée politique de l’inscription est à peu près nulle, mais c’est déjà trop. Dans la plus pure tradition macroniste, le crime de lèse-majesté est restauré à tous les niveaux du pouvoir.

La présidence fait ainsi preuve d’autoritarisme par pure vexation. Mais ça n’est pas vraiment du goût des personnels, qui doivent se soumettre à ces fermetures, adaptant constamment leur emploi du temps. Ce jeudi, les personnels de bibliothèque étaient informés que, si une nouvelle fermeture administrative était déclarée, il n’y aurait plus d’autorisation d’absence. Autrement dit vous devenez un pion que l’on peut balader, de la bibliothèque de Sciences à la BU de Médecine, et pourquoi pas dans celles d’Angers ou de La Roche sur Yon ?

Les enseignant-es aussi sont mis-es en difficulté face à des cours manquant que l’université demande à rattraper. D’autant que c’est désormais une armée de vacataires qui enseignent : que faire face à la menace de ne pas être payé-e si vous ne changez pas votre emploi du temps au pied levé ? Sur ce point, le Guide du vacataire publié par la Confédération des Jeunes Chercheurs est clair : si un déplacement de cours n’est pas possible, la fac doit quand même vous payer les heures prévues. Si l’administration vous met la pression, contactez votre syndicat !

Tordre le cou de la démocratie

Cacarine Bernault est incapable d’entendre la critique, mais elle est aussi prête à écraser toute parole dissidente. Elle présentera au Conseil d’administration du mois d’octobre une modification du règlement intérieur qui vise, entre autre, à sanctionner « l’usage abusif de la liberté d’expression ». Comment qualifier un tel projet si ce n’est d’autoritariste ?

Pire : face à la contestation des syndicats, mais aussi du Conseil Académique qui s’inquiète des modifications, la présidence a légèrement revu sa copie. Une explication du règlement intérieur a été publiée pour éteindre la polémique, mais celle-ci intègre les amendements contestés comme si ils étaient déjà votés ! En effet, l’intersyndicale de l’enseignement supérieur signale que « seule cette seconde série de modifications est signalée, en couleur orange, dans le document transmis par la présidence dans sa dépêche interne du 25 septembre, laissant croire que les modifications initiales, qui portent atteinte aux libertés, faisaient déjà partie du Règlement intérieur actuellement en vigueur ! » La manœuvre est vulgaire, et n’aboutit qu’à une seule chose : jeter de l’huile sur le feu.

Pour résumer : Cacarine pète un plomb, et plus elle est contestée, plus elle agit de façon autoritaire. Rien ne semble pouvoir l’arrêter, si ce n’est un mouvement conjoint des étudiant-es et des personnels qui paralyserait vraiment la fac et empêcherait la présidence de nuire.

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