Le PS et les directions syndicales se vantaient d’une «suspension» de la réforme des retraites et d’une «avancée», Macron les détruit en affirmant que ce n’est «ni une abrogation, ni une suspension, c’est un décalage»

Il y a une semaine, le Parti Socialiste sauvait Sébastien Lecornu et son gouvernement de droite radicale en échange d’une promesse : la «suspension» de la réforme des retraites, qui avait été massivement rejetée par la population et imposée en 2023 par 49.3. On le sait, les promesses n’engagent que ceux qui y croient. Mais pour croire encore un Macroniste après 8 ans de Macron, il faut avoir de l’eau dans le crâne ou être un traître absolu.
Depuis une semaine, le PS sillonne les plateaux de télévision pour clamer qu’il aurait obtenu une «victoire». Un député socialiste a même osé affirmer qu’il s’agissait de la «première victoire du mouvement social depuis le CPE». Les médias des milliardaires ont fait le service après-vente, en relayant les éléments de langage du PS à grand renfort de sondages bidons, histoire de faire passer les sceptiques qui dénonçaient l’arnaque pour d’horribles radicaux qui gâchent l’ambiance.
Les cris de victoire ont mal vieilli. Macron vient de les pulvériser en public ce mardi 21 octobre. Lors d’un discours télévisé, il a déclaré que «le Premier ministre a fait un choix pour apaiser le débat actuel». Traduction : il a embobiné tout le monde pour éviter la chute de son gouvernement et une crise de régime.
Ce choix «a consisté à proposer le décalage d’une échéance, je le dis ici parce que ça n’est ni une abrogation, ni une suspension, c’est un décalage». Par cette phrase, Macron atomise Olivier Faure et les socialistes qui répètent sur tous les tons qu’ils auraient arraché une «suspension totale» de la réforme. En bon manager autoritaire, il rabaisse ses plus fidèles employés.
Dit plus simplement, cette réforme continue de s’appliquer, et 47 millions de Français iront à la retraite à 64 ans. Le PS n’a désormais plus d’argument pour dissimuler sa traîtrise.
Plus pathétique encore, les directions syndicales ont publié un communiqué de presse le 20 octobre au soir, soit quelques heures avant la déclaration de Macron. Ce texte, signé par la CGT, Solidaires, la CFDT, FO ou encore la FSU, est titré : «Retraites : un premier pas qui en appellera d’autres». Quel premier pas ? Ou est l’avancée ? Mystère.
Dans son texte, l’intersyndicale reprend le terme marketing fabriqué par le PS : «Le premier ministre a annoncé la suspension de la réforme» et ajoute «nos organisations saluent cette avancée». Vous avez bien lu : AVANCÉE. Nous subissons un rouleau compresseur néolibéral depuis 8 ans, un régime autoritaire écrase toutes les contestations, la pauvreté explose, l’extrême droite est aux portes du pouvoir et Lecornu annonce un plan d’austérité XXL, mais les bureaucrates syndicaux «saluent une avancée» !
Le communiqué ajoute : «Les modalités techniques de cette suspension doivent être précisées». Nos glorieux stratèges syndicaux auraient peut être dû s’informer un minimum avant d’écrire leur texte : Lecornu annonce que le décalage des retraites se trouvera dans une lettre rectificative du PLFSS. C’est un peu technique mais, en gros, pour obtenir cette minuscule concession de quelques mois sur les retraites, il faudra que le PS vote l’intégralité du budget qui comprend des coupes massives dans la santé.
«Nos organisations appellent les travailleurs et les travailleuses à maintenir la pression» termine ce texte désolant. Comment pourrait-il y avoir de pression sans aucun plan de bataille. Les directions syndicales ont organisé l’échec du mouvement « Bloquons tout », lancé par les bases au début du mois de septembre, en récupérant l’agenda social avant d’éteindre toute la dynamique, sans appeler à aucune perspective. De la même manière, elles avaient organisé l’échec du mouvement de 2023, pourtant massif et déterminé, en appelant à des journées isolées qui n’ont servi qu’à faire perdre du salaire aux grévistes sans jamais engager de réel rapport de force.
Que le PS soit la dernière rustine du navire macroniste en plein naufrage n’étonne plus personne. Que l’intersyndicale, Solidaires compris, se compromette à ce point dans cette sinistre farce, dans un moment aussi sombre, est vertigineux. Comment a été validé ce communiqué ? Les bases syndicales qui font vivre au quotidien les mouvements sociaux ont-elles été consultées ? Évidemment pas, et c’est un scandale. La déclaration de Macron ce jour ne sert d’ailleurs qu’à les humilier, qu’à montrer à ceux qui le maintiennent à flot qu’il les méprise, et qu’il ne cherchera même pas à donner une quelconque illusion de compromis.
N’attendons rien d’en haut, organisons-nous.
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