Soudan : la plus grande crise humanitaire du monde au cœur d’une guerre entre impérialismes


Où que l’on regarde, l’ombre gagne du terrain, de Gaza au Soudan. Explication sur un nettoyage ethnique passé sous silence.


Un bâtiment ravagé par la guerre au Soudan

Des femmes et des enfants pendus à des arbres, des piles de cadavres visibles depuis des images satellites, des corps affamés et des maisons incendiées. Ce sont les images indicibles captées ces derniers jours au Soudan. Dans ce pays d’Afrique de l’Est, situé au sud de l’Égypte, une guerre civile terrible dure depuis plus de deux ans, provoquant la pire crise humanitaire du monde. À l’origine ? Une révolution écrasée suivie d’une guerre entre puissances impérialistes qui s’affrontent sur le territoire soudanais, par milices interposées.

Ces deux derniers jours, plus de 2000 civils ont été massacrés après la prise de la ville d’El Fasher, à l’ouest du pays, dans la zone du Darfour. Entre autres atrocités, plus de 460 personnes auraient été tuées dans une maternité de cette ville selon l’OMS. Ces crimes contre l’humanité ont lieu depuis qu’El Fasher a été prise par un groupe paramilitaire : les «Forces de Soutien Rapide», qui prétendent combattre les «frères musulmans».

Il s’agit d’une milice soutenue et financée par les Émirats Arabes Unis. Vous savez, cette théocratie enrichie grâce à la vente de pétrole, alliée de l’occident, et qui cultive son image grâce à la ville de Dubaï, vitrine du pays sur les réseaux sociaux, grâce aux influenceurs décérébrés qui s’y précipitent.

Les «Forces de Soutien Rapide» multiplient depuis deux ans les atrocités : viols de masse, famine organisée, massacres… Cette milice est elle-même issue d’un groupe ayant commis un génocide au Darfour dans les années 2000. Le Soudan est enfermé dans un cycle de massacres et de vengeances causé par des seigneurs de guerre et des puissances étrangères depuis des décennies. Une révolution populaire a été écrasée, donnant lieu à la situation actuelle. Vu de France, la situation est complexe, et presque jamais abordée dans les médias dominants.

En résumé, en 2018, une révolution renversait le tyran qui était en place depuis trois décennies au Soudan. Le pays était une dictature militaire : l’armée soudanaise accapare les quatre cinquièmes du budget de l’État, alors que la misère y est massive. Après trois ans de processus révolutionnaire, de manifestations et de tentatives de gestion populaire et démocratique, un coup d’État militaire renverse le gouvernement intérimaire en 2021. Cette nouvelle dictature coupe l’accès internet et tire sur des contestataires.

En 2023, une guerre civile éclate entre deux factions militaires rivales, soutenues chacune par des puissances extérieures. D’un côté, les Émirats Arabes Unis, la faction libyenne de Khalifa Haftar lui-même soutenu par Israël, qui financent et soutiennent les «Forces d’Action Rapide» responsables des massacres en cours. On trouve dans cette milice des combattants tchadiens, libyens, ukrainiens, sud-soudanais, nigériens et éthiopiens.

De l’autre côté, se trouvent l’Égypte, la Russie ou la Chine, qui soutiennent les forces militaires au pouvoir, celles du général Abdel Fattah Al-Burhan. Toutes ces puissances utilisent le Soudan comme un terrain d’affrontement pour leurs propres intérêts, et alimentent les bandes rivales en armes. Au détriment du peuple, dont la révolution a été étouffée, et qui subit à présent une guerre atroce, dans laquelle il n’a aucun intérêt.

Des puissances impériales font ainsi durer un conflit sans fin, qui a ravagé Khartoum, la capitale, et déplacé des millions de personnes. La grande ville est aujourd’hui largement dévastée et désertée. Le gouvernement central, qui a repris Khartoum aux «Forces d’Action Rapide», a abandonné le Darfour et la ville d’El Fasher à la merci de la famine, des viols et des assassinats.

Pourquoi une telle guerre sur ce territoire ? Car le Soudan est un pays au sous-sol riche en ressources. En toile de fond, l’enjeu réel est l’accaparement des richesses minières du Soudan et du pétrole ou encore de la gomme arabique. Les milices se financent en vendant l’or extrait du sous-sol sur le marché international. Et dans un pays qui manque de tout, à commencer par de la nourriture et des médicaments, les armes abondent, livrées depuis l’étranger.

Enfin, rappelons que la France est un grand partenaire commercial des Émirats Arabes Unis, principal responsable des massacres actuels. Les échanges entre notre pays et cette théocratie pétrolière ont atteint 8,5 milliards d’euros en 2024, et les Émirats sont le premier acheteur d’armes de la France. Des composants français, produits par les firmes Lacroix et KNDS ont également été retrouvés dans les armes des «Forces de Soutien Rapide» au Darfour.

Un embargo total sur les armes est donc une urgence absolue pour la survie du peuple soudanais et l’arrêt des offensives impériales pour piller les ressources.

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