Une contre-attaque qui crépite
Agressions d’extrême droite, mesures liberticides, meetings pétainistes, mépris gouvernemental, racisme décomplexé. Le climat est irrespirable dans ce pays où quelques milliardaires ont fait main basse sur les médias, et imposent un agenda toxique. Ce vendredi 21 janvier, une marche antifasciste, pour la justice et les liberté a lieu à Nantes. L’événement a été annoncé dans la ville par des collages massifs et des banderoles au-dessus des grands axes.
Vendredi 21 janvier, à 19h, des centaines de personnes répondent à l’appel. Des torches s’enflamment et illuminent la nuit. Des feux d’artifice crépitent. Plusieurs banderoles apparaissent, et emmènent le cortège le long des rues. «L’horizon dit rien de bon, faire bloc, seule solution», «Entends-tu le vol noir des corbeaux sur nos plaines?» ou «Mettre une extrême gauche à l’extrême droite».
Un serpent de deux mètres de haut, allégorie du fascisme, est en tête de la manifestation. Visuellement, la mobilisation est impressionnante. Un petit journal titré «Faire bloc» circule. Premier arrêt Place de la Bourse : une statue de Georges Villebois-Mareuil, militaire du 19ème siècle né à Nantes, auteur de massacres en Algérie et membres fondateur du groupuscule nationaliste et royaliste l’Action Française, est dénoncée. Le bronze reçoit de la peinture alors que détonnent les feux d’artifice.
Le cortège monte vers la Place Graslin. L’ambiance est de plus en plus chaude, les tags fleurissent, les fumigènes sont innombrables, les slogans résonnent. Sur la place, le serpent géant représentant le fascisme prend feu. Devant la Maison du Peuple, centre social essentiel, expulsée à plusieurs reprises pour implanter un complexe résidentiel et commercial haut de gamme, les soutiens s’expriment par la peinture et par la voix. Plus loin, les premières grenades lacrymogènes sont tirées. La vitrine d’une boutique Zara, qui fait des profits sur le travail d’Oïghours réduits en esclavage, vient de tomber.
Devant la préfecture, le dispositif policier est de plus en plus menaçant. Le cortège bifurque vers la Cathédrale. Sur la Place Foch, anciennement baptisée Place Louis XVI, des royalistes ont organisé un rassemblement pour rendre hommage au roi décapité le 21 janvier 1793. Nantes est la seule grande ville avec une colonne à la gloire du roi déchu. En chemin, une altercation éclate devant un bar réputé pour accueillir des militants d’extrême droite. Nouvelle salve de gaz.
Le cortège est repoussé rue de Strasbourg par des tirs de grenades. Une vitrine tombe. L’étau se resserre. Des charges ont lieu devant le CHU. Plusieurs personnes sont interpellées. Il est 21h30, et la manifestation a fait grand bruit.
Les forces de l’ordre patrouillent encore quand la maire socialiste et la présidente de région, très à droite, ont déjà publié des communiqués outrés. Elles qualifient le défilé «d’extrêmement grave», «condamnent avec force» et rendent «hommage» à la police. Classe politique illégitime et indigne qui a installé le pire. Ce qui est «extrêmement grave» en réalité, c’est que de telles mobilisations contre le climat pré-fasciste en France n’aient pas lieu dans toutes les villes, chaque semaine. Ce qui est grave, c’est la tenue d’un grand rassemblement néofasciste au Zénith de Nantes, le 30 octobre dernier, avec l’accord de la métropole PS. À Nîmes, ce même vendredi soir, un groupe d’extrême droite tabassait des personnes opposées à Zemmour, sous l’œil de la police.
Face à l’asphyxie ambiante, une partie de la jeunesse a décidé de ne pas détourner le regard, de ne pas se soumettre, et commence à faire bloc.
Images : Estelle Ruiz, Marion Lopez, NR
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