Manu, Gilet Jaune touché à la tête par une grenade, a perdu son œil

Manu est un ouvrier du Nord, un intérimaire dans l’industrie automobile de Valenciennes. Travailleur précaire, il fait partie de ceux qui subissent plein fouet des politiques économiques violentes des gouvernants. Manu a 41 ans, il est venu manifester avec sa compagne samedi 16 novembre. Il est Gilet Jaune depuis le début, et ne pouvait pas manquer l’anniversaire du mouvement à Paris. Manu ne verra plus jamais de ses deux yeux.

C’est lui qui reçu un tir tendu de grenade lacrymogène en pleine tête alors qu’il discutait sur la Place d’Italie. Il n’a même pas vu arriver la munition, tirée à l’horizontale, par un lâche en uniforme, pour faire le plus de dégâts possibles. Il plaisantait avec d’autres manifestants, loin des affrontements.

«On était encerclés par les policiers mais tranquilles à l’écart, en train de parler de banalités. On n’a même pas eu le temps de voir arriver le projectile» raconte sa compagne au journal Libération.

«D’un seul coup, la cartouche est arrivée, hyper vite. Au moment de l’impact, en voyant les étincelles, j’ai su que ce n’était pas un tir de lanceur de balles de défense. Manu «souffrait extrêmement»

Un street medic explique : «Au début, je constate que l’arcade saigne abondamment et que l’œil présente un hématome important. En retirant doucement la compresse, il y avait, en plus du sang, une substance vitreuse et translucide qui ne pouvait venir que de l’œil.»

«Ils ont essayé de regarder dans son œil, mais ils n’ont pas pu bien voir, car le sang giclait dès qu’il l’ouvrait, explique Séverine. Les os en dessous de son œil sont fracturés, ce qui fait que tous les muscles au-dessus tombent et ne maintiennent pas le globe oculaire.»

Hier soir, Manu sortait du bloc opératoire avec un verdict définitif : son œil gauche est perdu.

«On veut simplement vivre de nos salaires et on se bat aussi pour nos enfants», explique Séverine, sa femme.


Force à Manu, à sa famille et ses amis !


PRÉCISIONS TECHNIQUES : UNE TENTATIVE D’HOMICIDE ?

Qu’est-ce qui a blessé ce père de famille ? Il ne s’agit pas du tir d’un «Lanceur de Balles de Défense», mais bien d’une grenade lacrymogène de type MP7. Celles qui, normalement, explosent en l’air en projetant des palais incandescents qui libèrent du gaz.

Cette munition est plus lourde, plus dure, et plus grosse qu’une balle en caoutchouc de LBD. Ces grenades sont tirées par des fusils appelés « lanceurs Cougar », qui peuvent les propulser à 50, 100 ou 200 mètres. Il est absolument interdit d’utiliser ce lanceur en tir tendu : les grenades envoyées à l’horizontale peuvent tuer. Le fusil «Cougar» est d’ailleurs conçu spécialement pour empêcher les tirs tendus : la crosse de l’arme est inclinée pour forcer le tireur à envoyer les cartouches vers le ciel, en tir «en cloche».

Le policier qui a mutilé Manu a donc délibérément incliné son arme illégalement, de façon à ce qu’elle s’oriente à l’horizontale, vers la foule, pour faire le plus de dégâts possible. C’est une tentative d’homicide.


À propos de l’usage «détourné» du lanceur de grenade qui a mutilé Manu : illustrations pour bien comprendre :

De haut en bas :

  • Un «lanceur Cougar» : on voit clairement que l’outil est conçu pour éviter les tirs tendus de grenades (potentiellement mortels). La crosse est inclinée pour que le canon soit toujours orienté légèrement vers le ciel. Par ailleurs, les forces de l’ordre sont censées utiliser ces armes toujours orientées en l’air, au dessus de la foule.
  • Usage «standard» du «lanceur Cougar» par des gendarmes, avec le canon orienté en l’air, pour propulser les grenades lacrymogènes en cloche, où elles explosent et libèrent le gaz
  • Deux photos du bas : des CRS inclinant délibérément leur «lanceur Cougar» pour envoyer les grenades à l’horizontale, pour faire le plus de dégâts humains possibles. C’est formellement interdit, et extrêmement dangereux. C’est ce qui s’est passé dans le cas de la blessure de Manu.
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