Plus que jamais, l’extrême droite avance à visage découvert
Cela fait aujourd’hui 8 ans jours pour jour que Clément Méric, 18 ans, a perdu la vie. Tué par une bande de néo-nazis. C’était le soir du 5 juin 2013.
À l’époque, l’extrême droite descendait dans les rues pour manifester son homophobie. Lors des «Manif pour tous», complaisamment relayées par les chaînes de télévision. Plusieurs émeutes d’extrême droite avaient lieu en plein Paris. Les agressions homophobes se multipliaient. Les groupes les plus violents passaient à l’acte.
C’est dans ce contexte qu’une bande de néo-nazis parade le 5 juin en plein cœur de la capitale avec des T-Shirts : «White power» et «100% pure race». Ce qui aurait été, il n’y a pas si longtemps, un réflexe minimal et partagé – s’opposer à la présence de nazis dans nos rues – n’était assumé ce jour là que par une poignée de militants. Clément, jeune étudiant, refuse de baisser les yeux face à l’extrême droite raciste et violente. Il est frappé à coups de poing américain en plein visage, il perd la vie. Une vie volée. Celle d’un trop jeune camarade.
Dans les jours qui suivent ce drame, on assiste à un incroyable retournement de situation. Les antifascistes, qui ont été les seuls à avoir une réaction saine en répondant aux néo-nazis, sont traînés dans la boue. Et même qualifiés «d’agresseurs». La mémoire de Clément est souillée post-mortem. La chaîne France 2 diffuse au JT un montage en images de synthèse qui met en scène Clément en train d’attaquer de dos un fasciste. Mensonge, aujourd’hui démonté par l’enquête. Mais qui se soucie aujourd’hui de la vérité ?
Comble de l’ignominie, on invite alors des militants néo-nazis tels que Serge Ayoub, qui vient s’expliquer tranquillement sur les plateaux télés. Les crapules ont toujours le droit à des tribunes médiatiques après avoir commis leurs crimes. La voix des antifascistes, elle, est alors réduite à néant, dans une cacophonie politicienne et médiatique. Et l’extrême droite, fidèle à son abjection, se régale de la mort d’un jeune de 18 ans sur les réseaux sociaux. L’antifascisme devient presque une insulte ou un synonyme de radicalité, alors qu’il devrait s’agir d’un socle minimal pour toutes et tous.
Huit années ont passé. Nous savons à présent que les néo-nazis impliqués dans l’affrontement se sont vantés par SMS le soir même : «j’ai frappé avec ton poing américain», «on les a défoncés». On sait que le tueur de Clément a arboré pendant des années des tatouages fascistes. On sait que la bande d’extrême droite était proche d’un autre groupe criminel, appelé «Picard Crew», arrêté depuis pour banditisme, détention de nombreuses armes, violences et tentatives d’homicides. On connaît les liens entre l’extrême droite radicale et certaines franges de la police, notamment à Lille, où un militant identitaire trafiquait des armes de guerre avec la complicité d’un gendarme.
On constate surtout depuis 8 ans l’explosion des violences fascistes, sur fond de libération générale de la parole raciste. Le 7 mai 2017, deux adolescents étaient tabassés par une bande de 5 néo-nazis à Nantes. L’un des jeunes, Erwan, faisait un arrêt cardiaque. Sauvé de justesse, il gardera à vie des séquelles d’une agression dont presque personne ne parle en dehors de Nantes. Des agressions homophobes, racistes et islamophobes ont désormais lieu chaque semaine, à Lyon, Paris, Angers, ou Nantes, revendiquées publiquement par l’extrême droite, en toute impunité. Quant aux représentants du fascisme : ils sont chaque jour à la télévision, certains ont même leurs propres émissions quotidiennes. Le nazisme n’est plus une exception : la présence des nostalgiques de dictatures fascistes au sein de la police, de l’armée ou des cercles de pouvoir ne se cache même plus.
Le procès en appel des tueurs de Clément a lieu cette semaine. Comme d’habitude, justice et médias maquillent une agression fasciste en «bagarre entre bandes» et tentent de mettre à égalité des héritiers d’Hitler et des militants pour la justice et l’égalité. C’est aussi la stratégie du gouvernement en place, qui met dos à dos «les extrêmes», mais laisse agir les groupes comme Génération Identitaire, alors qu’il réprime avec une extrême férocité les Gilets Jaunes, les luttes étudiantes, lycéennes, ou salariales.
Le combat contre le fascisme ne se gagnera ni dans les tribunaux, ni dans les médias verrouillés par les milliardaires, ni en faisant appel à des autorités largement complices. Clément, comme les autres victimes de l’extrême droite, vivent dans nos luttes. C’est pour eux, plus que jamais, alors que les loups sont de retour, qu’il faut s’organiser et faire face en reconstruisant un rapport de force populaire, dans les têtes comme dans la rue.
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