Yvan Colonna est mort. L’annonce officielle a été diffusée hier. Le militant indépendantiste Corse était plongé dans un profond coma depuis le 2 mars, après une agression sauvage, qui a provoqué trois semaines de révoltes sur l’île. Les conditions de cet assassinat posent question : comment ce détenu «particulièrement signalé» a pu être laissé seul, pendant une période aussi longue, en compagnie d’un détenu psychotique très violent ? Pourquoi Yvan Colonna n’a pas été rapatrié en Corse alors qu’il le demandait depuis des années ?
Le militant Corse avait été condamné à la réclusion criminelle à perpétuité pour l’assassinat du préfet Claude Erignac en 1998. Il avait été condamné à la suite d’une procédure douteuse, avec des doutes émis y compris par un légiste et des rétractations de témoins. Yvan Colonna n’a jamais cessé de clamer son innocence, sans changer de version. La colère va s’amplifier en Corse.
La prison tue. Dans les geôles françaises, on compte en moyenne un décès tous les deux ou trois jours. La plupart du temps par suicide. En 2020, 119 personnes incarcérées sont décédées par suicide et plus de 120 en 2021. La France demeure l’un des pays qui présentent le niveau de suicide en prison le plus élevé de l’Europe. En avril 2021, un jeune homme de 18 ans s’est donné la mort à la prison de Saint-Brieuc où il était incarcéré depuis le mois de janvier. Il aurait dû être libéré en juillet prochain. Il était enfermé pour un simple vol !
Il y a aussi ces morts suspectes qui ne seront probablement jamais élucidées. Le 17 janvier dernier, dans la prison de la Farlède dans le Var un détenu de 20 ans était retrouvé mort dans sa cellule. Il portait des traces de coups. En 2020 dans la prison de Perpignan, Taoufik Belrhitri, père de famille, meurt. Mais sa famille ne l’apprendra que 23 jours plus tard. Pourquoi ? Les morts en prison sont généralement classés comme des «suicides», souvent sans véritables enquêtes.
La France incarcère toujours plus. En janvier 1970, il y avait en France 28.000 détenus. En 1990, ils étaient 45.000. Au 1er octobre dernier, 70.818 personnes étaient détenues dans les prisons françaises. Leur nombre a plus que doublé depuis 1970, alors que la population française a, proportionnellement, bien moins augmenté. Parmi les détenus, un tiers est en détention provisoire, donc présumées innocentes. Des dizaines de milliers de personnes sont donc enfermées en attente d’être jugées. Parmi elles, un tiers aussi est enfermé dans un établissement occupé à plus de 150%. Dans des conditions inhumaines.