La bourgeoisie prépare les esprits à la guerre civile
L’ancien préfet de Paris Didier Lallement tente de revenir sur le devant de la scène. Il sort un livre intitulé «L’ordre nécessaire» et donne des interviews. Dimanche 6 novembre, le journal patronal L’Opinion lui donnait la parole. Lallement estime qu’il restera «le préfet des Gilets jaunes», une image qu’il aime cultiver alors qu’il n’est arrivé à la préfecture de Paris qu’en mars 2019, alors que le soulèvement avait déjà été quasiment anéanti par la répression. En revanche, une fois en poste, il n’a jamais cessé de durcir la répression et de militariser la police, avec des pratiques et un discours d’une extrême brutalité.
L’ex-préfet de Paris estime que la classe moyenne est entrée «dans la violence politique et la révolte», alors qu’en réalité ce sont les politiques néolibérales qui ont prolétarisé des millions de personnes. Ce n’est pas la «classe moyenne qui entre dans la violence» mais des pans de plus en plus larges de la population qui sont confrontés à la violence sociale, à la précarité, aux difficultés de fin de mois, aux prix qui explosent…
Plus intéressant, Didier Lallement estime que les forces de l’ordre devront ouvrir le feu contre des manifestations. «Cela risque d’arriver un jour» déclare-t-il, comme pour préparer l’opinion. «On entrera dans une autre dimension» ajoute-t-il.
En décembre 2018, au plus fort des Gilets Jaunes, des tireurs d’élite avaient été déployés à Paris car le pouvoir craignait un embrasement total et l’envahissement de lieux de pouvoir. Des policiers à moto avaient dégainé leurs armes de service face à des manifestants le long des Champs-Élysées. Depuis, il est courant de voir des gendarmes avec des fusils d’assaut autour des cortèges, et il est arrivé plusieurs fois que des agents sortent une arme pour intimider la foule. En mars 2019, les soldats de l’opération Sentinelle étaient déployés face aux Gilets Jaunes et le gouverneur militaire de Paris n’excluait pas «l’ouverture du feu».
Le gouvernement vient d’ailleurs de commander 90 véhicules blindés équipés de lance grenades et d’un fusil mitrailleur capable de tirer 1000 coups à la minute sur le toit. Une arme pilotée depuis l’intérieur du véhicule grâce à une caméra intégrée. La bourgeoisie et ses forces armées se préparent à la guerre.
Tirer sur le peuple est un vieux fantasme refoulé des élites françaises. À la radio, Luc Ferry, ancien ministre de l’Éducation réclamait en 2019 que les policiers se «servent de leurs armes» et que les militaires tirent à balles réelles sur les manifestations : «On a la quatrième armée du monde, elle est capable de mettre fin à ces saloperies».
Des membres du gouvernement expliquaient dans la presse qu’ils étaient prêts à «assumer» de «faire des blessés voire pire», notamment de rendre «tétraplégique» un participant au Black Bloc. Le présentateur Yves Calvi évoquait sur son plateau à plusieurs reprises l’idée de parquer les opposants dans un stade «avec tout ce que sur le plan historique et imaginaire, ça provoque», c’est-à-dire comme au Chili de Pinochet ou lors des rafles du Vel’ d’Hiv’.
En 2020, le député Eric Ciotti estimait à la suite d’un tir de feu d’artifice sur un commissariat qu’il «faut que la police puisse tirer. La racaille doit être éradiquée quoi qu’il en coûte», et la chroniqueuse Zineb El Rhazoui criait sur le plateau de Cnews son souhait «que la police tire à balles réelles» sur les «délinquants de banlieue». Depuis, les tirs explosent pour des refus d’obtempérer.
Au sein de l’élite, l’appétit de guerre civile et d’élimination du peuple, qui n’a jamais été totalement rassasié depuis la Commune de Paris, redevient lancinant. On se souvient encore de ces habitants du 16ème arrondissement de Paris, qui encourageaient les policiers en hurlant “tuez-les” alors qu’ils pourchassaient des Gilets Jaunes. Il n’y aura pas d’étape intermédiaire en cas de nouveau soulèvement : une révolution totale ou un écrasement dans le sang. Didier Lallement vient de l’annoncer de nouveau.