Reportage dessiné au procès des opposants aux mégabassines


Jeudi 5 janvier 2023, tribunal de La Rochelle. Deux prévenus sont appelés à comparaître au tribunal correctionnel pour avoir volontairement détérioré la mégabassine de Cramchaban, le 6 novembre 2021.


Devant le tribunal, environ 300 militant-es anti bassines ont répondu à l’appel pour soutenir les prévenus et montrer leur détermination à poursuivre le mouvement. Prises de paroles, slogan… ils font bloc jusqu’à la fin du procès. Sur une place un peu à l’écart, une quarantaine d’agriculteurs pro-bassines sont là aussi. Leur présence aurait été à peine remarquée si une partie d’entre eux n’avaient pas été escortée par un cordon de CRS jusqu’à l’entrée du tribunal pour assister au procès, alors même qu’un seul s’est porté partie civile. Pied de nez aux dizaines de militant-es anti-bassines qui attendent déjà devant le tribunal et dont seulement une vingtaine pourront rentrer, après une longue attente. Traitement de faveur pour rappeler de quel côté se tient la justice.

Les débats commencent et, très rapidement, on comprend qu’aucune preuve matérielle sérieuse n’est avancée contre les prévenus. Le dossier d’enquête, pourtant conséquent, ne comporte que des actes de surveillance de la part de la gendarmerie. Des moyens colossaux ont été utilisés pour répondre à leur quête désespérée de trouver des coupables. Finalement, sur la base de photos floues, les deux prévenus sont visés et traqués durant 3 mois. Résultat de cette surveillance quotidienne : les gendarmes constatent que les prévenus possèdent des vêtements qui ressemblent à ceux portés par deux personnes sur les vidéos de la manifestation. Preuves accablantes, un vrai travail de professionnels de la part des enquêteurs.

En résumé, aucune certitude quant à leur présence sur le lieu de la manifestation ni aucune preuve qu’ils aient participé au débâchage de la bassine. Les prévenus gardent le silence au sujet des faits qui leur sont reprochés, préférant utiliser leur temps de parole pour rappeler l’urgence qu’il y a à réagir face à l’assèchement des sols au profit d’une agriculture intensive et polluante.

Face aux faibles arguments de la partie civile, quatre témoins du côté de la défense évoquent tour à tour les aspects juridiques, sociaux et environnementaux de la nécessité absolue de s’opposer à l’accaparement de l’eau. Christian Amblard, hydrobiologiste et chercheur au CNRS, rappel notamment que le stockage de l’eau implique une évaporation de 20 à 30%, le développement de cyanobactérie la rendant toxique et l’écoulement d’une eau polluée dans les nappes phréatiques lors de l’irrigation des sols.

Les avocats de la défense font valoir la nécessité de la désobéissance civile dans une situation comme celle-ci. Ils pointent également le choix du ministère public de poursuivre des militants sans jamais engager de procédure contre les exploitants faisant usage illégalement des méga-bassines. En effet, ces dernières font l’objet d’une procédure depuis plus de 13 ans, dont la dernière décision, le 17 mai 2022 annule l’autorisation préfectorale d’en faire usage.

Lors des réquisitions teintées d’ironie et de mépris, le ministère public requiert 5 mois d’emprisonnement avec sursis contre les deux prévenus, auquel s’ajoute un mois de sursis pour celui qui a refusé de donner son ADN. Le délibéré sera rendu le 2 mars 2023 à 13h12…

Pour rappel, un rassemblement national est prévu le 25 mars 2023 contre les méga-bassines.


Dessins et compte-rendu : Ana Pich’ notre envoyée spéciale pour Contre Attaque

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