Répression : ne nous laissons pas terroriser


Quelques réflexions pour refuser la peur organisée par le pouvoir


En haut : photo d'un homme torse nu au milieu de policiers, du sang coule de son oreille.
En bas : des dizaines de personnes assises contre des murs, arrêtées au hasard par la police.

Depuis trois jours, le régime organise des centaines d’arrestations, notamment des rafles massives à Paris. Les images de la capitale sont terrifiantes : des charges, des étranglements, des tabassages au sol. Plus de 500 interpellations en trois nuits rien qu’à Paris. Samedi soir, de véritables rafles, avec des dizaines de personnes alignées en rangs serrés contre les murs, dans une ruelle sombre, par des policiers cagoulés : les images d’une dictature. Il est nécessaire de montrer ce qu’il se passe, la gravité extrême de la situation politique française, et en même temps…

Comment ne pas tomber dans le piège du pouvoir ? Il cherche à nous terroriser, à briser moralement ce mouvement social massif. Et pour cela, quoi de mieux que de mettre en scène des escadrons de la mort frappant et arrêtant des centaines de personnes à Paris ? Que peuvent générer de telles images ? Une rage décuplée, ou un sentiment de peur généralisée qui va dissuader beaucoup de gens de retourner dans la rue ?

Il est donc nécessaire d’opposer à la terreur d’État le récit de nos victoires. Pendant trois nuits de suite, la police a été mise en échec à Paris, mais aussi dans des dizaines d’autres villes. Depuis jeudi, nous assistons à une multiplication des gestes de résistances, et à un élargissement des pratiques de luttes offensives. Jeudi et samedi, des barricades sont apparues dans de nombreuses villes, même celles réputées calmes. Des dizaines de milliers de personnes ont vécu des moments d’intensité et de joie partagée, l’impression, enfin, de relever la tête. Tout cela, nous ne l’avions pas ressenti depuis les Gilets Jaunes. Hier à Paris, la police a embarqué une cinquantaine de manifestant-es d’un seul coup dans un bus, mais leur solidarité et leur puissance sont restées intactes : ils et elles ont continué à chanté dans le fourgon. À Nantes, malgré une répression sauvage, la détermination n’a jamais été aussi élevée. C’est cela qu’il faut retenir ! Nous ne sommes pas condamnés à perdre. Si le pouvoir sort les crocs, c’est qu’il a peur.

Durant les Gilets Jaunes, après trois premiers actes fabuleux, une répression terrible a semé la peur dans les cœurs et les esprits. Les centaines de vidéos de manifestant-es blessé-es ont provoqué l’effroi collectif. C’était le but du gouvernement. Après le 8 décembre 2018, le mouvement n’a pas réussi à franchir d’étape supplémentaire.

Dénoncer la violence d’État est essentiel, nous y contribuons et continuerons de le faire. Mais il faut veiller à ce que cette dénonciation donne corps à la révolte, plutôt que de la pétrifier. Ne relayer que les images d’arrestations et de coups rentre dans le storytelling du pouvoir. Celui qui nous dit que manifester est dangereux, que contester vous expose à des violences morales et physiques. Oui, la situation est pré-fasciste. Mais nous pouvons encore agir, faisons-le tant qu’il est temps, tant que la colère est là, massive, soutenue. Nous sommes des millions, pluriels, soutenu-es par la quasi-totalité de la population.

Nous sommes engagé-es dans un combat, et c’est le moment ou jamais de se défendre, de rendre les coups.


???? : QG et Louis Witter

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Une réflexion au sujet de « Répression : ne nous laissons pas terroriser »

  1. Si la peur saisissant le gouvernement devait indiquer sa fragilité, il faut alors supposer que cette peur est un minimum rationnelle. Mais si ce n’était pas le cas ? Et si sortir les crocs indiquait autre chose ? En tout cas je me méfie des narratifs simplistes.

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