Commission d’enquête parlementaire sur les “groupuscules violents” : deux membres des Soulèvements de la Terre poursuivis

C’était au printemps dernier, en pleine déferlante sociale et écologique, alors que des millions de personnes manifestaient pour les retraites et que la contestation des mégabassines était férocement réprimée.

Le gouvernement lançait avec le Rassemblement National, le 10 mai 2023, une commission d’enquête parlementaire sur les «groupuscules, auteurs de violences à l’occasion [des] manifestations». Cette commission avait pour but d’enquêter sur «la structuration, le financement, les moyens et les modalités d’action» de ces groupes, sur une période allant du 16 mars au 3 mai 2023. Donc entre l’usage du 49-3 et les diverses manifestations spontanées qui y ont répondu jusqu’au 1er mai particulièrement déterminé, en passant par la mobilisation de Saint-Soline.

Quelques jours plus tôt, Gérald Darmanin avait menacé la Ligue des Droit de l’Homme. Dans cette Commission sur les «groupes violents», on trouvait l’association altermondialiste Attac, qui se retrouvait convoquée, ainsi que deux organisations engagées pour la justice sociale et climatique : Extinction Rebellion et Dernière rénovation. La définition de «l’ultra-gauche» est devenue extensible pour le régime. Une véritable chasse aux sorcières.

«Ces groupuscules entravent la liberté de manifester et attaquent nos forces de l’ordre jusqu’à tenter de les tuer», avait accusé le député Macroniste Florent Boudié, alors que son collègue nantais Mounir Belhamiti expliquait que cette commission devait servir à «comprendre l’organisation de ces groupuscules de casseurs, investiguer sur leurs sources de financement, leurs modes d’intervention, pour mieux combattre leurs atteintes à la vie quotidienne des citoyens et aux valeurs de la République».

Cette mascarade a abouti a un rapport, paru à l’automne 2023, avec des propositions toujours plus liberticides : interdictions de manifester, dissolutions d’associations facilitées et autres mesures dont rêvent les dictateurs.

Dans ce cadre, deux porte-paroles des Soulèvements de la Terre, Léna Lazare et Basile Dutertre, avaient refusé de se rendre physiquement à l’Assemblée pour répondre à l’interrogatoire des députés.

Ce mercredi 24 janvier 2024, ces porte-paroles ont été convoqué-es au commissariat et se retrouvent poursuivi-es. En effet, il est en principe obligatoire de répondre à ce type de convocation au Parlement. Les deux écologistes avaient néanmoins répondu au questionnaire par écrit, de même que d’autres personnes sollicitées par la Commission Parlementaire, mais ce sont les seul-es à être convoqué-es en justice.

Ces poursuites sont inédites sous la Cinquième République. «Alexandre Benalla s’était certes présenté devant une Commission d’Enquête Parlementaire, mais avait refusé de répondre et n’avait pas été poursuivi» rappellent justement les Soulèvements de la Terre.

Le mouvement écologiste explique : «Après le rapport à charge de la Commission et la condamnation de plusieurs porte-paroles d’organisations (dont les Soulèvements) pour la manifestation de Sainte-Soline, ces poursuites s’inscrivent dans un acharnement politique et judiciaire à l’encontre de notre mouvement […] après l’annulation de notre dissolution, et visent à passer sous silence la brutalité policière effroyable qui s’est abattue le 25 mars».

Il ajoute : «Il est flagrant de voir comment la règle politique du “deux poids, deux mesures” s’applique au détriment de l’égalité devant la loi quand il s’agit d’actions écolo ou des manifs retraites».

Les deux porte-paroles passeront en procès le 24 novembre prochain. Ce sera l’occasion d’une tribune sur les mobilisations écologistes et l’acharnement répressif qu’elles subissent.

En attendant, il est possible d’aider pour les frais de justice : https://lessoulevementsdelaterre.org/soutenir

Faire un don à Contre Attaque pour financer nos articles en accès libre.

Pour ne rien manquer de nos publications, suivez-nous sur nos réseaux



Laisser un commentaire