Fuite en avant : service militaire pour la jeunesse, manuel de survie pour la population


Comment nos dirigeants nous préparent à la guerre


Emmanuel Macron en discours devant des militaires pour préparer la France à la guerre

Nous assistons à un cauchemar, et les contre-pouvoirs sont absents. Macron, présenté comme un «centriste», un «démocrate», un «modéré faisant barrage à l’extrême droite» il y a 8 ans, a poussé au maximum tous les curseurs de l’autoritarisme. Arrivé en fin de règne, il est en train d’organiser une fuite en avant vers la guerre. Quand nous l’écrivions il y a quelques années, nous passions pour des oiseaux de mauvais augure voire des fous. Aujourd’hui, le plan est assumé au grand jour.

Macron détruit le sens du mot «engagement»

Le 27 novembre, sur une base militaire de l’Isère, entouré de militaires, le président désormais largement détesté, a prononcé ces mots qui donnent envie de l’insulter : «Vous incarnez la jeunesse de France qui se tient prête, qui se tient debout, qui vibre au son de la Marseillaise, qui n’a pas peur de s’engager pour les autres, qui est fière de son pays». Pour cause, il avait fait installer autour de lui des dizaines de jeunes soldats.

«Oui, notre jeunesse a soif d’engagement. Il existe une génération prête à se lever pour la patrie. Je demandais au ministre des armées, au chef d’état-major des armées, de formuler des propositions pour donner à notre jeunesse le choix de servir en renforçant les rangs de nos armées. Comment accueillir cet élan de notre jeunesse ? Un nouveau service national va être institué progressivement dès l’été prochain».

Macron délire complètement. Il répète sur tous les tons que la jeunesse rêve de faire la guerre et lui réclame de rétablir le service militaire. C’est un discours d’autocrate, qui nie totalement le réel. Macron martèle le terme «engagement» pour le vider de son sens. Oui, la jeunesse est engagée, et elle l’a montré sans relâche depuis son élection. Elle était là, dans les rues, par centaines de milliers dans les manifestations écologistes, sur les ZAD et dans les cortèges contre les lois néolibérales. Elle faisait la fête dans les Free Party, elle se révoltait après l’assassinat de Nahel.

À chaque fois, cette jeunesse a été matraquée, gazée, éborgnée. Macron a broyé la créativité et l’engagement de la jeunesse, partout, tout le temps. Il a envoyé la police dans les lycées et les facs, il a fait gazer la moindre fête de rue. Et c’est lui qui ose parler «d’engagement» lorsqu’il s’agit d’envoyer les jeunes faire la guerre ! Révoltant.

Mettre la jeunesse au garde à vous

Non seulement, avec son service militaire volontaire, Macron débloque 2 milliards d’euros pour mettre au garde à vous des dizaines de milliers de jeunes, mais il ouvre la possibilité de «mobiliser d’autres jeunes» en cas de «crise majeure».

Concernant le service en tant que tel : il sera lancé dès l’été 2026, destiné principalement aux 18-19 ans, et ne concernera que 3.000 jeunes pour la première promotion, puis 10.000 en 2030 et 50.000 en 2035. Autant dire qu’on va manger de la propagande de guerre pour au moins une décennie.

Le service durera 10 mois et sera rémunéré au moins 800 € minimum mensuels, avec hébergement, nourriture et équipement fournis. C’est une manière d’embrigader toujours plus de personnes en plus des soldats professionnels. Il s’agit de recruter de «la masse», selon les termes utilisés par les militaires, pour l’envoyer sur le front comme chair à canon. Une armée de réserve qui coûte moins cher que l’armée de métier, celle qui est en caserne et bien équipée et qui peut être «dépensée». Il y a quelques jours, le grand chef de l’armée française demandait à la population «d’accepter de perdre ses enfants». Cette réserve de jeunes, c’est aussi une façon de faire pénétrer l’armée dans l’espace public et au cœur des familles. Les militaire parlent «d’augmenter la surface de contact» avec la population.

Ce n’est pas tout. «En cas de crise majeure, le Parlement pourra autoriser une mobilisation au-delà des seuls volontaires». C’est donc toute la jeunesse qui, demain, peut être utilisée de force pour une guerre intérieure ou extérieure.

Un manuel de survie anxiogène

Il avait été annoncé au mois de mars, il vient d’être officialisé le 20 novembre. Ce «Manuel de survie» destiné aux français commence par la phrase : «Chaque jour, vous êtes témoins d’un monde en crise. Notre société doit s’adapter pour être plus forte. Chaque citoyen est acteur de sa sécurité et de celle de la Nation».

Cette brochure prétend «préparer» la population aux catastrophes naturelles, commerciales, nucléaires, sanitaires, et aux guerres. Comme si la guerre était un aléas parmi d’autres, indépendant de la volonté des dirigeants. Dans cette optique terriblement sombre, l’État invite chaque famille à se constituer «un kit d’urgence». C’est un message extrêmement anxiogène : ce manuel dit à la population que l’État n’est plus en capacité de la protéger, et qu’en cas de crise, c’est chacun pour soi.

C’est l’idéologie de la résilience. Il faut «apprendre à être heureux» dans un job toxique sur une planète mourante. Préparer son petit «kit» personnel en cas de frappe nucléaire. Être résilient, c’est être adaptable dans un monde qui fonce vers le désastre. Des ministres français déclaraient par ailleurs qu’il fallait apprendre à vivre avec un monde à +4°C, comme si la catastrophe était inéluctable, et qu’ils n’y étaient pour rien. Maintenant, il faut s’organiser individuellement pour survivre à une guerre.

Dans le manuel, la menace est présentée comme généralisée, elle concerne l’économie, les feux de forêt, des cyberattaques ou les conflits militaires. Le monde est hostile, la société n’existe pas, la menace est partout. C’est du pur néolibéralisme autoritaire.

Entre deux conseils infantilisants, par exemple qu’il faut «bien s’hydrater», le document demande aux citoyens de bien «respecter les consignes des autorités diffusées sur les canaux officiels» et appelle au patriotisme. Bien évidemment, il exige : «Chaque citoyen se doit d’être utile que ce soit par un engagement au sein des Forces armées ou au sein de diverses réserves opérationnelles». Là encore, pas de solidarité, pas de mobilisation collective en amont, uniquement une réponse militarisée et docile.

Macron chef de guerre

Macron en bout de course touche du doigt son rêve. Ce président qui n’a jamais connu le service militaire s’est toujours rêvé en chef de guerre. Dès son élection en mai 2017, il avait choisi d’être intronisé sur un véhicule militaire, entouré d’une garde prétorienne sur les Champs Élysées, alors que ses prédécesseurs s’étaient contentés de voitures de luxe. Quelques semaines plus tard, le nouveau président convoquait la presse sur une base de l’armée de l’air, déguisé en aviateur. Il avait aussi posé dans le sous-marin nucléaire «le Terrible» en uniforme de la Marine, et enfilé un casque de l’armée à bord d’un hélicoptère de combat lors d’une visite aux soldats déployés au Mali.

En mars 2022, il était photographié à l’Élysée avec un sweat floqué du logo d’un Commando parachutiste. En 2020, il était le seul président à répéter qu’il était en «guerre» contre un virus, utilisant un vocabulaire militaire pour traiter d’une question sanitaire. En 2023, le président est le premier à proposer une «coalition internationale» pour bombarder Gaza avec Israël, avant de se rétracter. Il était aussi le seul en Europe à envisager l’envoi de troupes françaises directement face à la Russie. Pour démarrer l’année 2024, il martelait le mot de «réarmement», entendu dans un sens beaucoup plus large que la question militaire : il devait être «civique» et même «démographique». Les femmes étaient sommées de produire de la chair à canon. L’objectif de la fin de règne est de transformer le pays en caserne.

En 2024, le gouvernement français a acheté 42 avions de guerre supplémentaires, pour la somme de 5 milliards d’euros. Macron vient d’annoncer la «modernisation» de la base aérienne de Luxeuil pour qu’elle puisse «accueillir la prochaine version du Rafale et son missile nucléaire hypersonique». À présent, ce sont des milliards d’euros qui sont débloqués en plus chaque année pour produire plus de canons, de missiles et d’engins de mort. Nos dirigeants, sans légitimité, impopulaires et corrompus, rêvent de guerre pour se maintenir au pouvoir. Macron pourrait même invoquer l’Article 16 ou l’état de siège, qui lui offriraient des pouvoirs dictatoriaux.


Quoi de mieux qu’un conflit armé pour mettre tout le monde au pas, imposer des mesures ultra-libérales et créer l’Union sacrée autour du gouvernement ?


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