⁨«Le Jarl» Yovan Delourme a passé une mauvaise semaine


Condamnation en justice, boycott, révélations sur ses escroqueries, fermeture de sa boite… Retour de bâton ?


Yovan Delourme, dit "Le Jarl", interviwé sur Europe 1, Sud Radio, IA+ et sur TPMP.

Il y a exactement une semaine, une sinistre personnalité de Rennes était projetée sur le devant de la scène médiatique : Yovan Delourme. Cet homme qui se fait modestement surnommer «Le Jarl» – «chef de guerre» dans la culture Viking – gère une boite de nuit nommée le 1988, dans le centre-ville de Rennes.

En tant que chef de la sécurité, il réalise des vidéos d’extrême droite. Il se met en scène en train de recaler des clients devant sa boite, tenir des discours racistes et réactionnaires ou «chasser les dealers». Par le prisme de ses vidéos, on croirait que Rennes est devenue Gotham City, et que son équipe de vigiles serait une bande de justiciers vengeurs faisant régner l’ordre au milieu du chaos. Et le pire, c’est que des centaines de milliers de ses fans décérébrés y croient.

Samedi 8 mars, des collectifs étudiants organisaient une soirée antifasciste dans un cinéma désaffecté depuis 6 ans, non loin de la boite de nuit. L’enjeu n’était pas que de faire la fête contre l’extrême droite, selon le collectif Écran Total qui organisait la soirée, mais aussi de protester contre un projet urbain baptisé EuroRennes.

Un de ces programmes de gentrifications désormais courant dans les métropoles : celui-ci vise à relier la gare au centre-ville, en faisant place nette sur le lieu où se trouvent le cinéma et la boite de nuit, en construisant un quartier d’affaire. Le même genre de plan a été mis en œuvre à Nantes, avec le projet EuroNantes, un quartier immobilier hideux et hostile. C’est la nouvelle métropole, bourrée de caméras, de flics, et excluant les pauvres qui est au programme, et Yovan Delourme en est le chien de garde.

Bref, cette soirée sympathique et autogérée dans un lieu abandonné ne concernait en rien Yovan Delourme et son équipe. Mais comme ce dernier se sent pousser des ailes grâce à son succès sur les réseaux sociaux, il n’a pas pu s’empêcher d’envoyer sa milice attaquer la soirée. Ses hommes ont envoyé du gaz lacrymogène dans le cinéma où se trouvaient des dizaines de fêtards, ce qui est extrêmement dangereux dans un lieu clos. Les personnes gazées ont ensuite été expulsé-es sous la menace.

D’autres images montrent ses vigiles, cranes rasés, cagoulés pour certains, cogner la tête d’un homme sur le sol, procéder à des arrestations totalement illégales, ou gazer en plein visage des jeunes femmes qui passaient par là… Et Delourme a même réalisé un montage vidéo pour revendiquer ses exactions.

Ces scènes ont choqué la France. Cependant, puisque le paysage médiatique dominant est intégralement fascisé, ce ne sont pas les victimes des agressions de Yovan Delourme qui ont eu la parole à l’antenne, mais l’agresseur. Le «Jarl» autoproclamé a pu faire le tour des plateaux télés toute la semaine : Sud Radio, Hanouna ou Cnews, Europe 1… Il a pu dénoncer «l’ultra-violence» de la société, sans que personne ne lui pose la moindre question sur sa propre violence. Il a déroulé un tas de mensonges, se victimiser et même vanter le système carcéral du Salvador. Pour autant, ce soutien total des médias des milliardaires n’a réussi à sauver ni l’image ni les affaires de Yovan Delourme.

Lundi 10 mars, il était condamné pour «pratique commerciale trompeuse» par le tribunal de Rennes. Sur les réseaux sociaux, il avait laissé entendre qu’il était de coach de MMA alors qu’il n’avait pas les diplômes requis. Il a été condamné à 5.000 € d’amende, et il lui est interdit de diriger une entreprise. En plus d’être un chef de milice d’extrême droite, c’est un escroc. Le comble, c’est que sur ses réseaux sociaux, Delourme s’était mis en scène en train d’entraîner des forces de l’ordre au sport de combat il y a quelques années.

Le même jour Frédéric Delavier, un bodybuilder, dessinateur et auteur d’ouvrages sur la musculation, diffusait une vidéo pour dénoncer Delourme. Il y a plusieurs années, les deux hommes étaient devenus copains, Delavier avait investi son argent pour ouvrir une maison d’édition et publier un livre avec Delourme. L’ouvrage, consacré au MMA, s’était bien vendu.

Mais un jour, le «Jarl» Delourme avait trahi son propre associé : il avait détourné et utilise les droits d’auteurs de Delavier pour sortir un livre seul, de son côté, consacré au développement personnel. Le bodybuilder parle de 100.000 € disparus, qu’il n’a jamais pu récupérer car Delourme avait pris soin d’organiser son insolvabilité. Delavier explique même que Delourme est un habitué des arnaques, et a déjà utilisé l’argent des autres pour ouvrir des entreprises qu’il a rapidement liquidé. Décidément, ce «Jarl» qui prétend faire régner la justice est un exemple de vertu.

Dans la même vidéo, on apprenait aussi que Yovann Delourme avait essayé de rentrer dans la gendarmerie, et qu’il en avait éjecté après que l’institution ait découvert ses condamnations. Pour être rejeté de la police ou de la gendarmerie, il faut vraiment faire partie des fonds de tiroir. Dans un article publié par Ouest-France en 2019, on apprenait que Delourme aurait fait un passage chez les CRS. A-t-il été aussi recalé des spécialistes du maintien de l’ordre ? Mystère.

Ce n’est pas tout. La scène électro rennaise a appelé a un boycott de son établissement, dans un communiqué diffusé le 11 mars. «Nous avons choisi de ne plus organiser d’évènements dans cet établissement» expliquent plus de 60 collectifs artistiques. Il ne va plus rester grand monde pour jouer dans le 1988. Dans la foulé, le Made Festival, un événement électro important de Rennes a annoncé l’annulation de sa future soirée dans l’établissement. L’organisation a justifié cette décision par sa volonté de cesser toute collaboration avec le club : «Nous ne pouvons pas maintenir un partenariat avec un lieu dont la gestion de la sécurité est remise en question».

En conséquence, jeudi 13 mars, le 1988 annonçait qu’il fermait ses portes. Temporairement pour l’instant. Une tentative d’éteindre la polémique et surtout d’éviter des représailles. C’est le signe que la toute puissance du «Jarl» et de sa bande est émoussée, et que le rapport de force pourrait bien s’inverser si une mobilisation s’organise. Sur un média d’extrême droite baptisé «L’Incorrectible» dans une énième interview diffusée le 14 mars, le Jarl, la superstar des masculinistes «solides» et des «lourds chevaliers patriotes» fondait en larmes. Le monde est trop injuste dès qu’il faut assumer ses actes.

La direction du club a annoncé une mise à l’arrêt de l’établissement qui ne devrait durer qu’une semaine. Mais on peut se demander ce qu’il se passera lors de la réouverture d’un tel lieu, dont tout le monde sait qu’il est gardé par des nervis fascistes… Si une réouverture a bien lieu.


Le dernier bouquin de Yovan Delourme s’intitule «Ça va mal finir». Oui, mais pour qui ?⁩


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