Le plan Trump pour Gaza : un projet colonial et un chantage visant à poursuivre le génocide


On vous explique le «plan pour la paix» de Donald Trump, qui met Gaza dans une voie sans issue, avec la complicité des pays arabes


Trump, Netanyahou et Tony Blair : trois artisans du "Plan pour la paix" qui vise à rendre le peuple palestinien responsable de son propre génocide.

Lundi 29 septembre, Trump et Netanyahou s’affichaient tout sourire à la Maison Blanche pour annoncer leur «plan de paix» pour Gaza. Disons le immédiatement : il s’agit d’un chantage odieux. Ce plan est un projet colonial pur et dur, qui ne peut pas être accepté par les palestiniens. L’annonce de ce «plan» est donc une mise en scène, une manipulation de niveau mondial pour continuer le génocide tout en prétendant que les fautifs sont les palestiniens qui n’ont pas accepté la «généreuse» offre des USA et d’Israël.

Lors de son discours, Donald Trump a d’abord fait mine d’accepter des concessions : son projet de déporter les deux millions de gazaouis, projet annoncé plusieurs fois ces derniers mois, est mis au second plan. Ce pseudo-geste de clémence est lourd de menaces, il sous-entend : si vous acceptez mon plan, il n’y aura pas de nettoyage ethnique total. On peut néanmoins se demander comment les rescapés du génocide en cours pourraient encore vivre sur un territoire réduit à l’état de poussière et de charnier.

Mais venons-en au cœur de ce plan. Les Palestiniens de Gaza doivent accepter de renoncer à tous leurs droits politiques, et que le territoire soit directement annexé par Donald Trump lui-même. C’est délirant, c’est un retour au XIXème siècle, quand des dirigeants occidentaux se nommaient eux-mêmes administrateurs de territoires conquis par la force. Les nouveaux maîtres de Gaza seraient membre d’un «conseil de la paix», un nom particulièrement cynique, qui serait dirigé par l’ancien Premier Ministre anglais Tony Blair. Ce sinistre individu est une sorte de Manuel Valls britannique : élu en 1997 pour appliquer une politique de gauche après des années de néolibéralisme, il avait accentué de toutes ses forces les privatisations et dérégulations dans son pays quand il était au pouvoir. Il avait aussi aligné sa politique internationale sur les USA de Bush. C’est ainsi que l’Angleterre a été un fer de lance de la guerre en Irak, de ses centaines de milliers de morts et de ses crimes de guerre. Blair est l’un des serviteurs les plus zélés de l’Empire étasunien.

Pour autant, cet ancien politicien n’a aucune légitimité à gouverner un territoire palestinien. Symboliquement, c’est même un choix particulièrement honteux, puisque l’Angleterre était le colonisateur de la Palestine jusqu’en 1948, et que c’est le colonialisme britannique qui est largement responsable de la tragédie qui déchire le Moyen-Orient depuis des décennies. Il n’y a pas de hasard : l’ancien Premier ministre anglais a fondé le Tony Blair Institute, une ONG qui a travaillé ces derniers mois sur des projets de «reconstruction» de Gaza sous l’égide d’hommes d’affaire…

Concernant les otages : le Hamas serait tenu de rendre tous ses captifs israéliens, pour qu’Israël se retire de Gaza en trois phases et libère 1500 Palestiniens. Ce qui laisserait 13.500 Palestiniens retenus dans les prisons israéliennes dans des conditions épouvantables. Pour autant, Gaza resterait sous occupation : Trump compte sur ses «partenaires arabes et internationaux pour mettre en place une Force internationale de stabilisation (ISF) qui doit être immédiatement déployée à Gaza». Pour illustrer, ce serait un modèle façon Pétain : les occupants allemands avaient délégué la répression et les exactions au gouvernement de Vichy qui lui obéissait.

À Gaza, il n’y aurait même pas besoin de l’armée israélienne sur le territoire, puisque la domination des gazaouis serait appliquée directement par des régimes arabes, à savoir l’Égypte, la Jordanie, l’Arabie Saoudite et le Qatar, chargés de désarmer l’ensemble des factions palestiniennes et de tenir le terrain. Les régime qui ont laissé se dérouler le génocide depuis deux ans seraient désormais les sous-traitants de la colonisation pour le compte de Netanyahou. Machiavélique.

Ce «plan» piétine totalement le droit international, car l’ONU n’y joue aucun rôle, alors que c’est en principe sa fonction de rétablir la paix et d’envoyer des forces d’interposition. Comme depuis 2023, elle resterait spectatrice, et uniquement autorisée à distribuer de l’aide humanitaire. Le projet d’un État palestinien est évidemment enterré dans le cadre de ce plan : les récentes décisions des gouvernements britannique, français, canadien et australien de reconnaître l’État de Palestine sont jetées à la poubelle.

Enfin, Trump a répété que les USA «soutiendront totalement Israël si le Hamas devait refuser l’accord». Netanyahou a complété : «Si le Hamas refuse ou tente de modifier le plan, Israël finira le travail, par la manière forte ou de manière pacifique, mais nous finirons le travail dans tous les cas». C’est ici que l’on comprend qu’il s’agissait d’une fausse proposition : en annonçant un plan que les factions palestiniennes ne peuvent pas accepter, il rend responsable les palestiniens eux-mêmes de la poursuite du génocide. En clair, quelle que soit l’issue, soit la reddition sans condition dans le cadre d’une mise sous tutelle de Gaza par un triptyque USA-Israël-Tony Blair, soit un refus, les palestiniens sont perdants.

Ce «plan pour la paix» est un piège pour faire accepter la poursuite des massacres. Soit Gaza devient protectorat colonial israélo-étasunien avec un champ politique anéanti et à la merci des génocidaires, soit Netanyahou tue tout le monde.

Pourtant, l’Arabie Saoudite, le Qatar, les Émirats Arabes Unis mais aussi la Turquie, l’Égypte, la Jordanie, le Pakistan et l’Indonésie ont validé ce plan ultra-colonial. Dans un communiqué, ces pays ont exprimé «leur volonté de s’engager de manière positive et constructive avec les États-Unis et les parties prenantes afin de finaliser l’accord et d’assurer sa mise en œuvre». C’est un enterrement de l’autodétermination de la Palestine.

Les États arabes ont déjà souvent mis à mal la cause palestinienne. En 1970, le royaume de Jordanie, dont la population est majoritairement composée de réfugiés palestiniens, avait décidé de chasser l’Organisation pour la Libération de la Palestine par une répression sanglante. Le clan El-Assad avait commis plusieurs tueries et fourberies contre les exilés palestiniens. Et en 2020, Trump, Netanyahou et plusieurs pays arabo-musulmans avaient signé les accords d’Abraham, visant à rétablir des relations économiques et diplomatiques «normales», abandonnant les palestiniens pour de bon. Le 7 octobre 2023 est d’ailleurs une réaction à ces accords, afin d’empêcher la disparition de la question palestinienne sur la scène internationale, et l’abandon total de la Palestine par les pays prétendument «alliés». Enfin, l’Égypte du Maréchal Al-Sissi a réprimé les mobilisations pour la Palestine sur son territoire, tout en laissant se dérouler les pires atrocités à ses frontières.

La validation du «plan de paix» par ces pays est une nouvelle trahison, mais d’une ampleur encore inédite. Gaza risque d’être démembrée, vendue aux plus offrants comme les pétromonarchies du golfe, ou aux intérêts égyptiens et turcs. Le peuple palestinien fait face à une voie sans issue, à moins que la mobilisation internationale, déjà massive et déterminée, ne monte d’un cran pour empêcher ces plans funestes de se réaliser.

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