Le Conseil Constitutionnel censure l’interdiction préventive de manifester. La mesure est anticonstitutionnelle.
Dans sa fuite en avant autoritaire, le gouvernement aura frappé sur tous les plans. Dans la rue d’abord, avec les plus féroces violences d’État depuis des décennies contre des manifestations. Dans les tribunaux, avec des milliers d’arrestations délirantes et des centaines de peines de prison. À l’assemblée enfin, en faisant passer une loi extrêmement liberticide : la «loi anti-casseurs», qui est en fait une loi anti-manifestants.
Ce jeudi 4 avril, le Conseil Constitutionnel a censuré l’article prévoyant des interdictions administratives de manifester. Macron souhaitait permettre aux préfets d’interdire à toute personne «susceptible de commettre des troubles», c’est-à-dire fichée par la police politique, d’être privée d’un droit fondamental : celui de manifester. Les opposants fichés auraient été préventivement assignés à résidence le temps des manifestations, avec potentiellement l’obligation de pointer au commissariat. Et ceci sans limite dans le temps. Donc, potentiellement, à vie. Cette mesure effrayante ne passera pas.
Pour résumer, le Conseil estime que cette disposition voulue par Macron va beaucoup plus loin que les interdictions de manifester mises en place en 2016 dans le cadre de l’état d’urgence, pourtant déjà très graves. Trop larges, trop floues, ces interdictions de manifester portent une trop grave atteinte aux libertés les plus élémentaires. Une atteinte, selon l’institution, «pas adaptée, nécessaire et proportionnée». Et pourtant, le Conseil Constitutionnel est loin, très loin d’être un repaire de progressistes.
En langage administratif ça donne ceci : «les dispositions contestées laissent à l’autorité administrative une latitude excessive dans l’appréciation des motifs susceptibles de justifier l’interdiction».
C’est donc l’article phare de la proposition de loi contre les Gilets Jaunes qui est censuré. C’est un camouflet pour Macron.
Mais il n’y a pas de quoi sauter au plafond : le reste de la loi va être appliqué. C’est-à-dire les contrôles et les fouilles aux abords des manifestations, ou la pénalisation très lourde de la dissimulation du visage, entre autres. La militarisation de l’espace public et la criminalisation des mobilisations continuent donc de se renforcer.
Du reste, rien ne dit que le gouvernement ne va pas tenter de préciser sa loi ou en écrire une autre, afin de priver réellement ses opposants de la possibilité de manifester…
Affaire à suivre.
La décision du Conseil Constitutionnel : https://www.conseil-constitutionnel.fr/actualites/communique/decision-n-2019-780-dc-du-4-avril-2019-communique-de-presse