Le 1er ministre flatte sa garde prétorienne avant d’attaquer les droits sociaux
Certains gestes symboliques valent tous les discours. Alors que les violences policières et le racisme dans la police sont dénoncés massivement, que des agents de Seine-Saint-Denis sont au cœur d’un énorme scandale de trafic, d’agressions et corruption qui durait depuis des années, Jean Castex a organisé dimanche 5 juillet une «visite surprise» au commissariat de la Courneuve pour «soutenir» la police du 93. C’est son premier acte politique en tant que Premier Ministre.
Accueilli par des policiers en armes, et accompagné du sinistre préfet Lallement, le chef du gouvernement a déclaré : «Je suis ce soir au contact de celles et ceux qui s’engagent pour protéger nos concitoyens. Je sais qu’ils attendent de nous des actes. Ils viendront. Ils attendent aussi de la reconnaissance et du soutien, ils seront sans failles». L’ancien conseiller de Sarkozy affirme d’entrée de jeu une ligne de droite extrême, faisant corps derrière les forces de l’ordre. Il l’a dit lors de son premier discours sur TF1, les «valeurs de la république» ne sont pas, pour lui, «Liberté, égalité, fraternité», mais autorité, répression et inégalités.
En Seine Saint-Denis, la fresque en hommage à Adama Traoré a été vandalisée hier, et la police locale est régulièrement mise en cause dans des affaires graves, et toujours impunies. Ce déplacement a valeur de symbole. Ce lundi, le préfet de Paris autorise officiellement les «courses poursuites» de la police en banlieue. Une pratique qui n’avait jamais cessé, mais qui avait été limitée depuis 2015. Ici encore, il s’agit d’un symbole : la bride est lâchée.
Dans l’Antiquité romaine, s’assurer du soutien de l’armée et de la garde prétorienne était indispensable pour un homme de pouvoir qui voulait régner sur l’Empire. Se plier aux volontés de la police et de ses puissants syndicats est aujourd’hui un préalable indispensable pour s’assurer du pouvoir dans une République. Le Premier Ministre met en scène son allégeance aux forces de l’ordre. Au point qu’on ne sait plus si c’est la police qui sert le gouvernement, ou le gouvernement qui sert la police.
On peut légitimement se demander s’il ne s’agit pas de flatter les troupes avant une nouvelle vague de répression pour mater les mobilisations, qui arriveront nécessairement lorsque le gouvernement relancera la réforme des retraites, entre autres attaques sociales.