Chroniques lecture


Deux conseils par notre consultante littérature et révoltes


La société de vigilance, de Vanessa Codaccioni, éditions Textuel

Après l’indispensable ouvrage « Répression, l’État face aux contestations politiques », Vanessa Codaccioni revient chez Textuel avec un livre sur la surveillance, et plus particulièrement sur la façon dont l’État nous utilise pour nous surveiller et nous réprimer les uns les autres. Elle démontre que, dans nos sociétés ultra sécuritaires, les gouvernements déploient diverses technologies et techniques tout en mettant à contribution notre responsabilité individuelle afin de mieux nous contrôler.

Nous ne sommes plus seulement des êtres surveillés, nous participons également à cette surveillance et adoptons des comportements policiers. Même si le principe de délation existe depuis plusieurs siècles, l’autrice observe que de nos jours, de nombreux moyens se mettent en place dans notre vie quotidienne pour créer une soi-disante «société de vigilance». Faire de nous des «citoyen.n.e.s antiterroristes» qui aident l’État.

Il s’agit évidemment de stigmatiser une partie de la population afin de mieux la réprimer. Plus qu’une simple vigilance c’est derrière, en réalité, tout un processus qui incite à plus de contrôle et qui vise l’obéissance de chacun.e d’entre nous.

La Terreur féministe, petit éloge du féminisme extrémiste, Irene, éditions Divergences

Cette semaine est sorti ce livre explosif de la militante féministe Irene aux éditions Divergences. On l’a lu et on a adoré, parce qu’Irene dégomme le préjugé selon lequel les femmes seraient forcément pacifistes. Elle nous plonge dans un aspect du féminisme quasi invisible et pioche aussi dans sa propre histoire, faisant de ce livre un texte assez personnel.

Partant de ce célèbre slogan « Le féminisme n’a jamais tué personne, le machisme tue tous les jours », l’autrice nous rappelle qu’au contraire le féminisme a déjà tué et peut encore tuer. Car la violence est un moyen de se défendre parfois nécessaire quand tout a été tenté en vain. Irene met en lumière des personnages féminins forts (Judith, Lisbeth) et sort surtout de l’oubli des histoires de vies brisées par le patriarcat. Des femmes qui n’ont eu d’autres moyens de lutter que de faire appel à la violence physique voire au meurtre.

Alors oui, l’autrice balaye un préjugé pour nous mettre en face d’une réalité : le recours à la non violence est un privilège que certaines ne peuvent pas se permettre. Cet éloge du féminisme extrémiste est un bel hommage à toutes ces inconnues qui ont combattu pour leur survie et celle des autres.

Ce livre prend la forme d’une réhabilitation. Que sait-on de ces femmes qui ont tué des hommes ? Pour ainsi dire rien. Il y a donc tout un travail de mémoire important à faire pour ne pas les oublier et ne pas les rejeter. Intégrer cette histoire à nos luttes, c’est permettre aussi de questionner le rôle de la violence et sa place dans la révolution contre le patriarcat.


« Dans les pages de ce livre, je ne vous parlerai pas de banderoles à paillettes ni de chants inspirants, mais bien de meurtres, de violence, de bombes et de kérosène. J’écrirai, noir sur blanc, les noms des femmes qui ont pris les mesures les plus radicales pour survivre au système patriarcal. Et ce à travers les siècles et les continents. »


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