Une augmentation des subventions de 23.000% depuis 2017 pour le lobby de la chasse
30 octobre 2021, Joël, 67 ans, roule dans sa voiture entre Nantes et Rennes. Il reçoit une cartouche de 9,3 mm dans la gorge. Il meurt quelques jours plus tard à cause du tir d’un chasseur. Willy Schraen, patron de la Fédération des Chasseurs, assène dans les médias sans la moindre empathie : «Le risque zéro n’existe pas, c’est comme ça».
À propos des promeneurs tués par des chasseurs, il déclare également : «Pour éviter les accidents, ils n’ont qu’à le faire chez eux. La nature n’est pas à tout le monde». Quelques mois plus tard, Willy Schraen affirme, toujours dans les médias : «Qu’est-ce que c’est que le bien être animal ? Un animal, il peut se reproduire et il peut manger, c’est tout».
En juin 2021, le chef des chasseurs français se vautre carrément dans le négationnisme climatique sur la chaîne RMC : «Il va faire chaud pendant trois jours, bizarre, entre le premier et le deuxième tour. On nous explique du matin au soir depuis deux jours attention l’écologie machin… Dites-le carrément au niveau de la météo, votez la NUPES. On a bien compris on est pas débile». La canicule serait un complot pour faire perdre Macron ? C’est l’analyse du patron des chasseurs.
Willy Schraen n’est pas un obscur guignol trumpiste. L’homme est régulièrement invité dans les médias dominants et côtoie les cercles du pouvoir. Il est notamment lié à Macron, ce qui explique la complaisance dont bénéficie. Par exemple, Willy Schraen est reçu en grande pompe au château de Chambord par le Président en 2018. Macron et le patron des chasseurs passent un accord au début du mouvement des Gilets Jaunes : la fédération appelle à boycotter le mouvement des ronds-points. En échange, le gouvernement fait de gros cadeaux aux chasseurs.
Aux Élections Européennes, la Fédération soutient En Marche. Le même Willy Schraen souhaite que les chasseurs «jouent un rôle en matière de police de proximité» – donc littéralement la création de milices rurales. Son souhait est exaucé durant le confinement de 2020 : les chasseurs peuvent sortir et sont chargés de surveiller les promeneurs qui ne respecteraient pas les restrictions.
Les comptes de la Fédération nationale des chasseurs viennent d’être dévoilés par le média «Lanceur d’Alerte». Les chasseurs bénéficient aujourd’hui d’un véritable trésor grâce à Macron, et payé avec l’argent public :
- En 2019, Macron baisse massivement les prix du permis de chasse, vieille demande du lobby. Cela a pour effet de faire exploser les cotisations : plus de 28 millions d’euros en 2020 et en 2021, alors qu’elles étaient autour de 11 millions d’euros les années précédentes. Un quasi triplement des recettes, joli cadeau.
- Le gouvernement distribue directement l’argent de l’État à la Fédération. 11,46 millions d’euros ont été versés en 2021, alors que la structure ne recevait que 27000 euros de subventions en 2017. Cela représente une augmentation de 23.000% entre 2017 et 2021 ! Et dire que des associations vitales, comme le planning familial ou des structures sociales, ont vu leurs subventions fondre au même moment !
- Enfin, la Ligue de Protection des Oiseaux dénonçait le 7 mars 2022 l’attribution de plus de 2 millions d’euros au monde de la chasse par l’Office français de la biodiversité, soi-disant pour sa contribution «à la protection et la reconquête de la biodiversité». Un fonds donné sans contrôle. Orwellien.
Pour rappel, la chasse est un «loisir» meurtrier. Outre les dizaines de millions d’animaux abattus chaque année en France, il y a aussi des dizaines de personnes blessées et des tuées accidentellement par des chasseurs. En 20 ans, plus de 410 personnes ont perdu la vie lors de parties de chasse, et plus de 2500 blessées. Plus que lors d’attentats sur la même période.
La chasse est aussi très polluante : 30 à 40.000 tonnes de plomb intoxiquent l’écosystème en Europe, pour l’immense majorité à cause de cartouches de fusils de chasse. Une pollution de masse, majoritairement concentrée en France.
L’alliance entre Macron et la Fédération des chasseurs et l’usage de chasseurs comme auxiliaires de police sont des signes très inquiétants d’autoritarisme. Le pouvoir achète le soutien d’un lobby armé et présent sur tout le territoire.
Cette débauche d’argent public rappelle la subvention versée à l’association «Avenir Lycéen» par le ministère de l’Éducation en 2019 : un groupuscule inexistant avait reçu des dizaines de milliers d’euros pour promouvoir le gouvernement auprès des lycéens. Les quelques jeunes macronistes de cette structure avaient dépensé l’argent dans des hôtels, des restaurants, des soirées et des produits Apple.