En novembre 2023, un surveillant noir de la prison de Nantes dépose plainte pour les injures racistes et le harcèlement qu’il subit de la part d’un de ses collègues. C’est la troisième plainte engagée au sein de la prison de Nantes pour des faits similaires. Les trois surveillants ayant dénoncé des actes racistes sont depuis en arrêt.
C’est un scandale de plus dans cette prison indigne où 875 prisonniers s’entassent dans des cellules insalubres, prévues pour 508 personnes, et où les suicides sont nombreux.
Depuis plusieurs mois, l’un de ces surveillants subit des insultes et remarques racistes continuelles, retrouvant par exemple des bananes pourries dans ses chaussures… et face à cela, il dénonce la silence de sa hiérarchie qui «ne fait rien, même pas un rappel à l’ordre général».
Plus grave, la plainte déposée évoque également des faits similaires, antérieurs, commis à l’encontre de deux autres collègues racisés. Ces derniers avaient déjà porté plainte pour «injures non publiques envers une personne à raison de son origine, son appartenance, ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée» explique Ouest France.
Ils relataient dans leurs plaintes les comportements particulièrement violents d’un des matons : «il s’approche de moi, me renifle, et dit que je pue». «Alors que j’avais mal aux pieds, il m’a dit que je devais être habitué avec mes chaînes et mes boulets». Un autre est qualifié par mail de «gorille à casquette».
Des insultes ouvertement racistes «toujours en rapport avec ma couleur de peau, mes origines…» D’autres victimes sont également évoquées par les plaignants : «les Mahorais, les Antillais, les Africains, les Arabes…» Pour autant, malgré des faits accablants, réitérés, des victimes multiples, une violence raciste inacceptable et assumée publiquement, le grand procureur de Nantes, Renaud Gaudeul revendique à Ouest France d’avoir classé cette plainte sans suite !
Le motif invoqué à ce classement étant que «les injures raciales commises par M.X. ont été inscrites dans un courriel qui avait vocation à demeurer confidentiel». De telles injures sont donc tout à fait acceptables pour le représentant nantais du Ministère public à partir du moment où celles-ci restent dans le cadre privé ? On n’ose imaginer le contenu de ses propres mails… Et on peut fortement s’inquiéter pour les détenus : si les matons racistes traitent ainsi leur propres propres collègues en toute impunité, comment se comportent-il avec des détenus non blancs ?
Le responsable local de Force Ouvrière pénitentiaire, William Cozic, ne semble pas non plus voir l’absolue gravité de ce genre de comportements délictuels, ni le caractère systémique de ce type d’infractions. Un «épiphénomène» selon lui. Ajoutant même «je n’ai pas le sentiment que ce type d’événement soit récurrent. De toute façon, on est à l’image de la société… c’est totalement intolérable MAIS pour moi c’est de la bêtise». Un déni complice…
Selon les informations recueillies par Ouest France, le maton mis en cause a été suspendu 4 mois de ses fonctions avant d’être muté dans un autre établissement pénitentiaire… De nouveau en exercice, il attend tranquillement la décision de la commission nationale de discipline de l’administration pénitentiaire à Paris.
Un maton dénonce dans l’article de Ouest-France «un climat malsain». Pour cause, en 2014 déjà, lors d’une manifestation pour la Bretagne une bande de cranes rasés se faisait remarquer dans un tramway, en hurlant des cris racistes et en faisant des saluts nazis. Le petit groupe avait aussi agressé des agents de la régie de transports venus les calmer. Quatre types étaient arrêtés et deux condamnés quelques semaines plus tard. Parmi ces néo-nazis : des surveillants pénitentiaires ! Il s’agissait de Jean-Charles T. et de Julien L. matons dans les prisons de Nantes pour l’un, dans les Côtes d’Armor pour l’autre.
Comment s’étonner de ce type de comportements et de l’impunité qui règne venant de la part d’une institution carcérale profondément raciste et imprégnée de relents colonialistes… Mais cette affaire démontre également la connivence du Parquet et des responsables syndicaux à protéger ses petits soldats racistes.