Faut-il supprimer le ministère de l’Éducation Nationale ?


Quel crime ont commis les profs pour mériter ça ?


En quelques années, à la tête du Ministère de l’Éducation, ils ont vu se sont succéder Jean-Michel Blanquer, vieux réactionnaire à l’allure de béluga qui méprisait les enseignants au point de partir en vacances à Ibiza au moment d’annoncer un protocole scolaire à la veille de la rentrée. Puis l’éphémère Pap Ndiaye, jadis intellectuel anti-raciste qui s’est instantanément transformé en paillasson en se convertissant au macronisme et qui mettait ses enfants dans une école privée d’élite. Ensuite, c’est Gabriel Attal, héritier millionnaire dont la particularité est carrément de n’avoir jamais mis les pieds dans une école publique de sa vie, qui est arrivé au Ministère ! Enfin, l’incroyable Amélie Oudéa-Castera qu’on ne présente pas pour éviter d’écrire des grossièretés. Celle-ci aura eu le mérite de donner des rêves de guillotine à plusieurs millions de français.

À présent, c’est Nicole Belloubet qui reprend le flambeau de ce ministère maudit, à la tête d’un enseignement humilié, saboté, dont le personnel est déprimé et démissionne en masse.

Belloubet, c’est une ancienne ministre de la justice de Macron, qui avait provoqué un mouvement de colère jamais vue dans les tribunaux. Avec ce nouveau poste à l’éducation, un article qu’elle avait écrit en 2016 vient de réapparaître, il est intitulé : «Supprimer le Ministère de l’Éducation Nationale ?»

L’actuelle Ministre expliquait que son titre était d’une «provocation source de réflexion». C’est pourtant un vieux rêve néolibéral formulé de plus en plus clairement par ceux qui veulent privatiser ce qu’il reste de l’enseignement.

En s’interrogeant sur le bien-fondé d’une suppression de l’Éducation Nationale, Belloubet multipliait les formules creuses et les expressions managériales à base de «synergie», «ressources humaines» et «autonomie». Elle plaidait pour une «décentralisation» de l’Éducation, donc la fin d’un système unifié au niveau national, géré par les collectivités locales, voire même une création «décentralisée» des programmes scolaires. Ce qui risquerait d’aggraver considérablement les inégalités territoriales : comment imaginer les mêmes moyens dans une région rurale, désindustrialisée et pauvre que dans une zone riche et «attractive» ? De même, en cas de région gérée par la droite et l’extrême droite, les élus pourraient de modifier les programmes à la sauce Puy-du-Fou.

Belloubet proposait néanmoins d’augmenter les salaires des enseignants, une idée qui, évidemment, ne verra jamais le jour, et pointait ceux qui fuient «le service public pour rejoindre l’entre-soi des classes homogènes dans l’enseignement privé». Comme ses prédécesseurs donc.

Quoiqu’il en soit, l’anecdote est cocasse. Imaginez que Darmanin ait écrit une tribune appelant à supprimer le Ministère de l’Intérieur et la police nationale. Les syndicats policiers seraient déjà en train de manifester, lourdement armés, devant l’Élysée, et il devrait démissionner dans l’heure qui suivrait en s’excusant.

Jadis, l’enseignement était un des secteurs les plus combatif et revendicatif, menant parfois des grèves longues et offensives et arrachant des victoires. Par exemple 500 postes supplémentaires en Loire-Atlantique obtenus après des mois de lutte en 2002. 20 ans d’essorage néolibéral ont rendu la profession complètement atone. Pourtant, avec plus de 700.000 enseignants dans le public, cet énorme secteur de l’État aurait la possibilité de paralyser le pays et d’affronter sérieusement le gouvernement. Sans compter tous les personnels faisant fonctionner l’éducation, AED et AESH en tête.

Et pourquoi pas, rêvons un peu, supprimer ce Ministère de l’Éducation Nationale lamentable. Mais pas dans un objectif néolibéral : pour proposer un enseignement vraiment public, inclusif, émancipateur et libertaire.

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