Grande purge dans les médias


L’extrême droite n’est même pas encore officiellement au pouvoir, mais la purge dans les médias publics et privés et la répression contre les journalistes qui font encore leur travail s’intensifie déjà. Les mécanismes visant à donner le contrôle de l’opinion aux fascistes sont déjà enclenchés.


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Mis à pied pour avoir signé une tribune contre l’extrême droite

Cinq journalistes de France Télévisions ont été «mis en retrait» pour avoir pris position contre l’extrême droite. Il y a quelques jours, une tribune, qui avait été signée par plus de 80 médias, appelait à défendre la liberté de la presse face aux menaces du Rassemblement National. S’inquiéter du manque de pluralité en cas de régime autoritaire : cela parait logique de la part de journalistes, pensez-vous.

Pas pour France Télévision. Les 5 journalistes, membres de la société des journalistes (SDJ), sont désormais interdits de couvrir les élections législatives. Une décision justifiée par la direction comme une mesure de «prévention des conflits d’intérêts».

Il s’agit en réalité de représailles. Dans le même temps, des chroniqueurs tenant des propos ouvertement mensongers, diffamatoires et réactionnaires sont invités sur les antennes publiques comme privées sans aucun problème.

Rappelons que c’est bien France 2, donc le groupe France télévision, qui a propulsé la carrière du fasciste Eric Zemmour dès les années 2000 en lui offrant une tribune grassement rémunérée tous les soirs, pour étaler ses propos révisionnistes, misogynes et racistes. Ce qui lui a permis de vendre ses livres et de se lancer en politique.

Rappelons aussi que le 28 septembre 2022, la fanatique macroniste Aurore Bergé a été nommée au conseil d’administration de France Télévisions. En 2023, elle a été remplacée par une autre macroniste, la députée Céline Calvez. Pour ces gens, dénoncer le fascisme est plus grave qu’en faire la promotion.

BFM toujours plus à droite

Il faut mettre à l’antenne davantage «d’éditorialistes de droite et droite +» : c’est littéralement la consigne donnée par la direction de BFMTV à ses programmateurs, révèle Médiapart. Ce document comporte même une liste d’éditorialistes d’extrême droite qu’il faut inviter : un ex-communiquant du RN et des journalistes de «Valeurs actuelles» et du «JDD».

BFM choisit ainsi de faire la promotion d’un hebdomadaire condamné pour racisme. En 2020, Valeurs Actuelles a publié des dessins et un récit particulièrement abject, sur la députée noire Danièle Obono, qualifiée «d’africaine», représentée en esclave enchaînée. L’hebdo avait été condamné. Valeurs Actuelles avait déjà été condamné pour «incitation à la haine» après une couverture infâme sur les Roms et suscite régulièrement des polémiques par ses Unes ouvertement islamophobes, anti-féministes, diffamatoires… C’est son fond de commerce.

Les «chroniqueurs» de ce journal d’extrême droite sont invités plusieurs fois par jour sur les plateaux. «Le magazine est l’un des médias les plus représentés sur la chaîne d’info. On a fait les comptes» explique le média Arrêt sur Image, qui a comptabilisé ses interventions. «Du lundi 10 au vendredi 14 juin inclus : pas moins de quatre journalistes du magazine d’extrême droite s’y sont succédés, jusqu’à 7 fois par jour, dans 21 passages au total».

Le média se demande ironiquement «s’il existe un taxi faisant constamment la navette entre les bureaux de Valeurs actuelles et les studios de BFMTV, tant leur parole est omniprésente». Pourtant, Valeurs Actuelles est en perte de vitesse, et perd des lecteurs depuis des années, tellement sa ligne est radicalement à droite.

Faisons un peu de politique fiction : imaginez que des journalistes de L’Humanité, de Médiapart ou de Contre Attaque soient invités 7 fois par jour en direct sur cette chaine de télé. Le Front Populaire serait majoritaire dès le premier tour.

Ce que fait BFM, c’est donc du matraquage néofasciste délibéré. Nous assistons à une manipulation de masse, assumée, de l’opinion publique français.

Une journaliste en garde à vue

Pendant que les propagandistes néofascistes, qui n’ont absolument rien de vrais journalistes, ont la parole en permanence, les journalistes de terrain sont de plus en plus réprimés. Dernier exemple en date, une reporter du média Blast qui couvrait une action pour la Palestine à Paris.

Cette mobilisation visait l’entreprise Exxelia, qui produit des composants électroniques utilisés par l’armée israélienne, et qui est citée dans une information judiciaire ouverte à Paris en 2018 pour complicité de crimes de guerre.

Mardi 18 juin, la journaliste qui couvrait l’envahissement des locaux d’Exxelia a été interpelée avec six autres personnes, avant d’être placée en garde à vue. Pendant plus de 34 heures, elle a été gardée en cellule, les policiers ont tenté de la forcer à livrer des informations et à déverrouiller son téléphone, violant le droit de la presse. La procédure a finalement été classée sans suite, a fait savoir le parquet mercredi.

«La priver de liberté pendant trente-quatre heures, la faire dormir dans une cellule puant l’urine et tenter de la contraindre à donner accès aux notes et documents de travail contenus dans son téléphone constituaient donc non seulement une tentative de violation du secret des sources, mais aussi une opération de dissuasion de cette journaliste et, au-delà d’elle, de tous ceux qui s’intéressent aux crimes de guerre commis par Israël, de l’intimidation en d’autres termes» explique sont avocat. Blast a dénoncé sur une «énième tentative de violation du secret professionnel» et «une intimidation inacceptable afin de connaître ses sources».


Sous Macron, la répression contre les journalistes s’est brutalement accélérée : reporters blessés par la police en manifestation, matériel confisqué, gardes à vue, et même auditions par la police anti-terroriste ont jalonné les dernières années, dans une indifférence glaçante de la profession.


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