Depuis la terre et la mer : tracteurs et bateaux bloquent le port de La Rochelle


Récit de la mobilisation à La Rochelle, ce samedi 20 juillet, poing d’orgue de 5 jours de rencontres internationales sur un village de l’eau qui a accueilli plus de 10.000 personnes, après une manifestation en plein champs vendredi devant la coopérative Terrena et le désarmement naturaliste d’une bassine appartenant à une ferme-usine. Par Les soulèvements de la terre.


La journée a démarré avec le blocage surprise du port et de l’entreprise de négoce en céréale Soufflet, par un convoi de tracteurs surgissant depuis le pont de l’île de Ré au nez et à la barbe du dispositif policier. Ils ont été rapidement rejoints par un cortège caché dans le port avec une banderole « Paysan·nes, travailleurs, autonomes, unissez vous ! » Loin des oppositions binaires mises en scène par le gouvernement entre écologistes et agriculteurs, ce blocage marque une fois de plus l’engagement paysan dans la lutte anti-bassines.

Aujourd’hui, les paysann·es comme le reste des manifestant·es avaient pour but de cibler des ennemis communs majeurs : les méga-coopératives et entreprises de négoce du port de la Pallice. Celles-ci appuient en effet la construction des méga-bassines pour rentabiliser leurs investissements dans l’agrandissement du port. Elles s’accaparent le revenu des paysan·nes pour maximiser leurs profits et les poussent à une course folle au rendement au détriment des terres, de l’eau et des populations.

Relevant une nouvelle fois le défi des interdictions systématiques de manifester et malgré les nombreux blocages policiers, plus de 8000 personnes ont réussi à se réunir dans le parc Charruyer. Elles ont été ralliées tout au long de l’après-midi jusqu’à atteindre 10.000 manifestantes. Durant les prises de parole initiales, une délégation internationale, composée de 200 personnes venu·es du monde entier a souligné à quel point ce port est un outil majeur de l’extractivisme néocolonial. En effet, la moitié des flux du port alimentent le complexe agro-industriel, l’autre moitié l’industrie du pétrole et du BTP. Le port est le catalyseur d’un capitalisme fossile qui nous fait foncer tout droit dans le bouleversement climatique.

On y retrouve pêle-mêle : Total, CMA-CGM, Lafarge, et bien sûr Bolloré. Celui-ci ne se contente pas d’intoxiquer nos esprits avec sa propagande néo-fasciste, il intoxique le monde avec ses industries responsables, entre autre, de déforestations massives pour l’huile de palme ! Il a été l’un des principaux investisseurs de l’agrandissement du Port de La Rochelle où il est toujours bien présent via son pôle énergie. Jadis, c’est le port négrier qui a fait la fortune des négociants rochelais. Aujourd’hui, la fortune de ces multinationales est toujours directement issue du pillage de l’Afrique et des guerres que celui-ci engendre.

Après les prises de parole, les manifestant·es se sont divisé·es en deux cortèges pour ruisseler vers le port avec pour objectif d’établir différents points de blocages festifs aux alentours et tenter une approche par la mer. Le premier cortège a longé la côte en faisant jonction avec les 10 tracteurs paysans copieusement gazés par la police en fin de matinée avant d’être obligés de quitter leur piquet.

Comme promis le cortège côtier a réussi à entrer sur la plage la plus proche du port de la Pallice et à partir le bloquer par voie marine avec de nombreuses embarcations et des nageurs·euses longeant la côté. Ils ont été rejoints par une flottille de catamarans et kayaks déjà en route malgré les interdictions de naviguer.

Le second cortège qui a emprunté les boulevards en direction du port a quant à lui été rapidement nassé, gazé et lourdement chargé dans la ville, mais à fini par s’extraire du piège policier. Les deux cortèges ont fini par se rejoindre en milieu d’après-midi en faisant une haie d’honneur aux tracteurs dans une ambiance de fête, en chantant malicieusement « Et tout le monde déteste La Pallice » ou encore « siamo tutti antibassini », marquant ainsi la jonction des luttes écologistes et antifascistes.

Les forces de l’ordre ont de nouveau attaqué la manifestation avec des gaz et canons à eau. Plusieurs interpellations ont eu lieu dont plusieurs avec des violences des forces de l’ordre. Ils ont fait face à des manifestant·es de tout âge et de toutes conditions physiques, mais extrêmement solidaires, déterminé·es à se protéger ensemble des coups et à ne pas se lâcher.

À l’heure où nous écrivons ce communiqué une partie de la manifestation se dirigeait vers la plage de la concurrence pour clore la journée.

Nous avons déployé aujourd’hui différentes manières de bloquer le port de La Pallice. Nous y reviendrons tant que ses multinationales détruisent nos vies, nos fermes, nos bassins versants et ceux des populations de l’autre côté de l’océan.

Un an et demi après Sainte-Soline, ces deux journées de manifestation démontrent l’inventivité et les capacités de rebond du mouvement anti-bassines, et ce malgré une pression politique et policière sidérante. Chaque chantier de bassines et les entreprises responsables vont continuer à être combattus pieds à pied localement et nationalement. Il est temps de faire bassine arrière, de statuer sur un moratoire et d’ouvrir la voie à une bascule agro-écologique.

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