Explosion de bipeurs au milieu de la population libanaise : un nouvel épisode de terrorisme d’État


Israël fait près de 3.000 blessés et 9 morts au Liban, le jour de la date anniversaire du massacre de Sabra et Chatila


Un bipeur explosé et un blessé au sol : les conséquences du terrorisme d'État qui a frappé le Liban.

«Terrorisme : ensemble d’actes de violence (attentats, prises d’otages, etc.) commis par une organisation ou un individu pour créer un climat d’insécurité, pour exercer un chantage, pour satisfaire une haine à l’égard d’une communauté, d’un pays, d’un système».
Définition du dictionnaire Larousse


Ce mardi 17 septembre 2024 au Liban, les services secrets israéliens ont fait exploser, à distance et en même temps, des centaines de bipeurs portés par des membres du Hezbollah – une puissante milice pro-palestinienne liée à l’Iran – au milieu de la population libanaise.

Les bipeurs, ou «pager», sont des appareils qui permettent de capter des messages radio et se portent à la ceinture. C’est une technologie plus rudimentaire que les téléphones portables connectés qui était très utilisée dans les années 1990. Cette technologie est considérée comme plus difficile à surveiller et pirater qu’un smartphone.

Le bilan provisoire de ces centaines d’explosions simultanées est évalué à 9 morts et 2750 personnes blessées et mutilées, dont de nombreux enfants. 200 personnes seraient dans un «état critique» Une fillette de 8 ans a été tuée par l’explosion d’un de ces bipeurs. Les membres du Hezbollah sont présents partout dans la population au Liban, et Israël le sait parfaitement. Du reste, un bipeur peut passer de mains en mains, et il est aussi utilisé par des médecins et des travailleurs. Certains d’entre eux ont également été touchés.

Israël aime les symboles et les dates. Cette opération tombe le jour anniversaire du massacre de Sabra et Chatila, commis du 16 au 18 septembre 1982 au Liban. Des milices d’extrême droite chrétiennes, supervisées par Israël dans le cadre d’une attaque sur le pays, avait commis d’abominables massacres dans un camp de réfugiés palestiniens.

Comment une telle vague d’explosions est-elle matériellement possible ? Les services secrets israéliens ont placé une petite quantité d’un produit nommé PETN, ou pentrite, l’un des plus puissants explosifs connus, sur les batteries des appareils. Ensuite, il suffisait de déclencher : la pentrite est sensible aux décharges électrostatiques et aux fortes températures. À distance, les agents israéliens ont donc pu provoquer les détonations en envoyant un signal.

Le Mossad avait infiltré la chaîne logistique des bipeurs pour les piéger il y a des mois, bien avant qu’ils ne soient distribués au Liban, aux membres du Hezbollah mais aussi à des civils et des diplomates.

Ce qui s’est passé au Liban n’est pas seulement une attaque contre le Hezbollah. De nombreuses vidéos, notamment des caméras de surveillance dans des commerces, montrent le moment où ces bipeurs explosent au milieu de gens qui font leurs courses ou qui marchent dans la rue. D’autres montrent des files interminables de personnes – y compris des enfants – agonisantes ou mutilées, la main ou le visage déchiqueté, dans les hôpitaux libanais, pays déjà en grave crise économique. Faire exploser par centaines des appareils de communication civile sans connaître précisément l’identité de leurs détenteurs n’est pas un acte de guerre. C’est un acte terroriste.

Imaginez qu’un jour, en France, des centaines de téléphones explosent en même temps par surprise dans la poche ou près de l’oreille de personnes dans la rue, et blessent aléatoirement des civils à proximité.

Ou imaginez que des combattants palestiniens aient fait exploser les téléphones et talkie-walkies de soldats israéliens hors service au milieu de magasins à Tel Aviv ou Hébron, tuant et mutilant des passants. Le monde entier dénoncerait avec effroi une attaque terroriste. Mais dans ce cas, le monde «civilisé» salue un coup tactique, et certains israéliens célèbrent l’opération.

De leur côté, les autorités libanaises ont demandé aux citoyens possédant des bipeurs de «s’en éloigner au plus vite». Les écoles libanaises sont fermées ce mercredi. Le gouvernement a décrété «l’arrêt des travaux administratifs et préparatoires dans les établissements, en signe de protestation contre l’acte criminel perpétré par l’armée israélienne contre les citoyens».

Rappelons qu’Israël ne recule devant aucune méthode pour assouvir ses objectifs. Le 30 janvier une unité israélienne s’est infiltrée dans l’hôpital Ibn Sina, situé à Jénine, déguisée en docteurs portant des blouses blanches ou en patients en fauteuil roulant.

Une fois dans l’hôpital, ce faux personnel médical a sorti des armes de guerre équipées de silencieux et assassiné de sang froid trois hommes soignés dans l’hôpital. Le directeur de l’établissement expliquait que l’un des palestiniens tué ne pouvait «plus bouger du tout». Israël a créé des unités dont la spécialité est de combattre déguisées en civil, comme «l’unité Duvdevan», qui commettent des exécutions extra-judiciaire en zone palestinienne sans être repérés. Non seulement ces pratiques – le fait d’exécuter des blessés qui ne peuvent plus bouger, par surprise – sont bien peu courageuses, mais elles violent le droit de la guerre le plus fondamental.

Dans le même registre, Israël avait déjà assassiné Yahia Ayache, un membre du Hamas, le 5 janvier 1996 avec un téléphone piégé. Les services secrets de l’État hébreux avaient placé une mini-bombe dans son téléphone portable, et l’avaient fait sauter au moment où il répondait à un appel de son père, le tuant sur le coup.

Revenons à l’affaire des bipeurs : non seulement c’est une attaque contre le Liban, mais c’est une énième provocation d’Israël envers le Hezbollah, après plusieurs frappes sur Beyrouth, alors même que l’organisation fait comprendre depuis des mois qu’elle ne veut pas rentrer en conflit direct avec Israël. «Je pense que cette fois-ci, le Hezbollah est obligé de riposter et ce sera sans doute une riposte militaire alors qu’il n’en avait pas l’intention» explique Guillaume Ancel, ancien officier de l’Armée française. L’explosion des bipeurs marque une «escalade extrêmement inquiétante» selon la coordinatrice spéciale de l’ONU pour le Liban.

Après avoir terminé de dévaster Gaza, Netanyahou veut embraser toute la région et porter la guerre dans les pays voisins pour se maintenir au pouvoir. Son état-major ne cache pas son envie d’envahir le Liban depuis des mois. Mais pour cela, il a besoin d’une riposte du Hezbollah qui justifierait une offensive terrestre en retour.


Avec cet acte de terrorisme d’État, Netanyahou risque de l’obtenir.


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5 réflexions au sujet de « Explosion de bipeurs au milieu de la population libanaise : un nouvel épisode de terrorisme d’État »

  1. Bonjour, entièrement d’accord avec la qualification de terrorisme d’état. Je me pose la question suivante : si un de ces bipeurs avait explosé dans un avion de ligne, Près d’un camion transporteur de carburant, quelles en auraient été les conséquences ?

  2. Après de tels actes de terrorisme contre le Liban venant de l’extrême droite Israëlienne, quelle bonne parole les médias inféodés et la classe politique vérolée française vont venir prêcher ? Quelle sera la réaction de sa Majesté (fouteur de merde neoliberal de Macron) et soutien inconditionnel des terroristes Israéliens ?

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