Le 6 décembre 2018 : la rafle des lycéens de Mantes-la-Jolie


Ne pas oublier malgré l’impunité


Des dizaines de lycéens mineurs, à genoux, menottés, les mains sur la tête et humiliés par la police à Mantes-la-Jolie.

Ce sont des images de guerre civile qui avaient choqué la France. Elles datent du 6 décembre 2018, il y a 6 ans maintenant, au plus fort du mouvement des Gilets Jaunes, à Mantes-la-Jolie.

Des dizaines de lycéens mineurs, à genoux, menottés, les mains sur la tête, entourés par des policiers qui les humilient et parfois les frappent. Une rafle. Les policiers avaient filmé la scène et l’un d’eux avait commenté en ricanant : «Voilà une classe qui se tient sage».

Ce 6 décembre, 151 arrestations d’un coup à Mantes. Des centaines d’autres mineurs interpellés dans d’autres villes. Pour rappel, 700 lycéens avaient été arrêtés rien que le 6 décembre ! Plusieurs adolescents avaient été gravement mutilés lors de blocus lycéens cette même semaine. En décembre 2018, le régime de Macron avait organisé de véritables persécutions policières contre des jeunes qui manifestaient, pour étouffer la révolte.

En ce qui concerne Mantes-la-Jolie, des plaintes avaient été déposées. Au mois de mai 2019, la «police des police», l’IGPN, s’était prononcée : «il n’y a pas de faute». Il avait fallu 6 mois à cette officine pour rendre un rapport qui n’avait servi qu’à dédouaner les forces de l’ordre. Deux mois plus tard, en juillet, la procureure de Nanterre déclarait à son tour que la «position à genoux et les mains entravées» des lycéens était justifiée.

Un lycéen de 15 ans, arrêté à Mantes-la-Jolie, avait témoigné qu’avec des dizaines d’autres jeunes, il avait été agenouillé de force pendant des heures, puis couché au sol, et avait reçu des coups de matraque. Son téléphone portable, qui était dans son sac, était cassé par ces coups. Un agent lui avait écrasé le dos, marché dessus. Ce jeune de 15 ans avait ensuite été placé en garde à vue. Les policiers lui avaient fait du chantage en lui disant que s’il voulait un avocat, il devait attendre une nuit de plus. Il a donc été entendu sans avocat. Finalement, il n’avait eu qu’un rappel à la loi.

Un autre, âgé de 17 ans, avait expliqué qu’il avait été placé en garde à vue durant 26 heures au commissariat de Mantes-la-Jolie, «entassé» avec 15 autres jeunes «dans une cellule prévue pour cinq». Une pure humiliation, une vengeance d’État sur des mineurs. Une opération de terreur.

En mai 2020, l’enquête sur les arrestations de Mantes-la-Jolie avait été relancée suite à une nouvelle plainte et à la pugnacité des familles. Une enquête était ouverte, cette fois-ci avec les chefs de «torture par personne dépositaire de l’autorité publique», «torture sur mineur de 15 ans», «atteinte arbitraire à la liberté par personne dépositaire de l’autorité publique», «violence aggravée», «diffusion sans son accord d’une personne identifiable menottée et mise en cause pénalement».

En 2022, deux lycéens arrêtés étaient enfin auditionnés par les juges d’instruction. Les policiers, eux, n’avaient pas encore été convoqués, 4 ans après les faits.

L’avocat des victimes, Arié Alimi, soulignait alors dans la presse : l’enquête «commence enfin». Il espérait l’audition des 151 lycéens, des témoins, des policiers mis en cause ainsi qu’une reconstitution.

En parallèle, il avait déposé plainte fin 2021, pour «déni de justice», pour qu’une procédure soit ouverte contre «l’inaction supposée des magistrats instructeurs» dans cette affaire.

Ce 6 décembre 2024, cela fait donc 6 ans que la rafle de Mantes-la-Jolie a eu lieu, et aucun procès n’est encore annoncé. On ne sait même pas si les policiers, pourtant parfaitement identifiables, ceux qui s’amusaient que les jeunes qu’ils humiliaient se «tiennent sage», ont été simplement entendus.

L’affaire de Mantes-la-Jolie fait partie des centaines d’enquêtes ouvertes pour violences policières lors des Gilets Jaunes. À ce jour, pas une seule d’entre elles n’a débouché sur quoique ce soit. En revanche, des dizaines de policiers qui ont exercé la répression pendant les Gilets Jaunes ont été médaillés dès 2019 par le gouvernement.

La jeunesse, quant à elle, subit une répression policière toujours plus insupportable. Et elle paie le prix fort de toutes les offensives néolibérales et liberticides du pouvoir – précarisation du travail, casse de l’éducation, embrigadement militariste dans le SNU.


Autant d’attaques qui visent à la « tenir sage », la privant d’avenir et d’espoir.


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