Armement et argent public : petits arrangements entre amis


Corruption dans le service qui gère les commandes du Ministère de l’Intérieur


Des grenades lacrymogène usagées : avant d'être tirées sur la foule, elles passent d'abord par des commandes publiques, comme le reste de l'armement policier.

Sur Contre Attaque, nous évoquons régulièrement les commandes d’armement du ministère de l’Intérieur : ces achats sont publics et consultables sur le site du Bulletin officiel des annonces des marchés publics – BOAMP.

En novembre 2022, juste après l’élection de Macron, ce ministère lançait un énorme appel d’offres pour l’achat de munitions policières : 38 millions d’euros de budget, ce qui équivaut à plusieurs millions de grenades.

En 2021, il commandait 90 nouveaux blindés répondant au doux nom de «Centaure», aujourd’hui déployés en Kanaky et contre les luttes écologistes. Coût total de l’opération : 70 millions d’euros. En 2023, il achetait pour 4,88 millions d’euros de matraques télescopiques en métal. En 2024, le journal Politis a révélé que l’Intérieur s’est doté d’une nouvelle arme qui permet de tirer 12 grenades lacrymogènes en un seul tir. Le Ministère a aussi lancé un appel d’offres pour acheter pour 27 millions d’euros de grenades de désencerclement il y a quelques semaines.

Derrière ces achats faramineux d’armes destinées à terroriser et blesser la population, il y a des fonctionnaires et des intermédiaires. Et justement, Médiapart vient de dévoiler qu’une enquête judiciaire du Parquet national financier (PNF) vise ce service du Ministère de l’Intérieur, pour des soupçons de corruption, notamment au cours de l’année 2022.

Conséquence de cette enquête, le général de gendarmerie Xavier Lejeune, un pilier du service chargé des commandes d’équipements pour la gendarmerie et la police, a été suspendu en 2023. Il avait été nommé à ce poste au sein de la sous-direction de la logistique et de l’approvisionnement depuis 2019, donc depuis les Gilets Jaunes. Ce militaire a été placé en garde à vue et son bureau du ministère perquisitionné dans le cadre de l’enquête. C’est donc sous sa responsabilité qu’ont été passées quasiment toutes les commandes énumérées précédemment.

Les faits sont tellement sérieux que, malgré un recours de Xavier Lejeune contre sa suspension, le Conseil d’État a considéré que «la gravité et la vraisemblance des faits [reprochés] et des inconvénients que présente le maintien de l’intéressé dans ses fonctions» justifiaient la sanction.

L’enquête se penche en particulier sur un business de sérigraphie de véhicules de la gendarmerie, qui a été attribué à une entreprise francilienne. Cette structure, qui a donc bénéficié d’argent public pour floquer les véhicules, est dirigée par un homme qui a «officié dans un curieux mélange des genres» explique Médiapart. Cet homme prénommé Gérard a été consultant auprès de la direction générale de la gendarmerie pour l’aider dans sa politique d’achat. On remarque sans ambigüité le souci d’indépendance : comment un patron qui bénéficie des achats de la gendarmerie pourrait-il être chargé de conseiller le Ministère sur ses achats de façon neutre ?

En 2018, le Ministère lui a également donné pour mission de rédiger un dossier sur les «possibilités d’équipement des forces de la gendarmerie avec des matériels militaires déclassés». Un rapport jamais rendu.

Selon Médiapart, ce patron bénéficie d’un «important tissu de relations au sein du ministère de l’intérieur, où il est connu pour être l’organisateur de tournois de golf pour policiers et militaires», et il est aussi proche du cercle présidentiel, puisqu’il revendiquait dès 2017 avoir accès à l’entourage direct de Macron.

Pourtant cet homme, qui sert d’intermédiaire pour l’achat de fournitures aux forces de l’ordre, a été condamné en 2011 à six mois d’emprisonnement avec sursis et 50.000 euros d’amende pour trafic d’influence dans le cadre d’un contrat auprès du ministère de la défense – 120 millions d’euros – qu’il a obtenu au profit d’une filiale du groupe Thales – firme de marchands de canon, qui arme notamment Israël.

Toujours selon Médiapart, ce chef d’entreprise, franc maçon, bénéficiait à travers ce réseau de liens occultes avec la Direction Générale de l’Armement, qui s’occupe justement des achats pour l’armée française. Des amitiés qui valent de l’or. Ce CV chargé et cette condamnation en justice passée ne l’ont pas pourtant empêché de travailler auprès du Ministère de l’Intérieur pour la fourniture de matériel de répression. Ni de décrocher un contrat.


Gestion clanique du pouvoir, arnaqueurs chargés du matériel répressif, tournois de golf entre affairistes et policiers : bienvenue dans la République en Moonwalk.


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2 réflexions au sujet de « Armement et argent public : petits arrangements entre amis »

  1. L’ État n’est qu’un principe mafieu qui enchaîne le peuple pour le livrer à la violence patronale et industrielle qui détruit l’humanité et le monde du vivant pour les intérêts des tyrans sanguinaires, des milliardaires, des grands bourgeois cossus et les dictateurs assassins

  2. La bourgeoisie possède l’exclusivité des pouvoirs, ‘l’argent, les flics et l’ armée, ainsi que l’ensemble des moyens de productions industriels, nous ( le prolétariat) avons le nombre et l’espoir d’un renversement Étatique, impossible que cette classe dominante qui détruit le monde du vivant par la production Industrielle et l’humanité par l’enchaînement des corps et des esprits aux États mafieux , puisse s’en sortir sans aucun dommage

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