La phase finale du nettoyage ethnique, et une menace adressée au monde
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«L’histoire se répète deux fois» écrivait Karl Marx, «la première fois comme une tragédie, la seconde fois comme une farce». En 2025, il semble que le monde soit définitivement en train de basculer dans un grand n’importe quoi sanglant, une bouffonnerie militariste et génocidaire généralisée, une époque dans laquelle toutes les certitudes et les valeurs les plus élémentaires sont balayées.
Alors que le Premier Ministre israélien Netanyahou est visé par un mandat d’arrêt international pour «crimes contre l’humanité», il est tranquillement reçu en grande pompe dans la première puissance mondiale. Donald Trump a décidé qu’il serait son premier invité d’honneur.
Mardi 4 février, le président des USA a lancé à la presse, sur un ton badin, une série d’annonces d’une gravité absolue, assis dans un fauteuil à côté de Netanyahou qui rigolait.
Annexion de Gaza
D’abord, les USA vont «prendre le contrôle de Gaza, et nous allons aussi nous mettre au travail. Nous en serons propriétaires» a-t-il prévenu. Cela veut dire que Trump, en-dehors de tout cadre légal, de tout accord international, de toute règle et respect de l’histoire, va annexer sans aucune négociation un territoire appartenant au peuple palestinien. «Avec notre stabilité et notre force, en la possédant […], nous serons un bon gardien», dans l’intérêt de «tout le Moyen-Orient» a-t-il expliqué.
Un journaliste lui a demandé s’il comptait envoyer des troupes à Gaza, il a répondu : «nous ferons le nécessaire». Une autre, choquée, lui a posé cette question : «vous parlez ce soir de la prise de contrôle d’un territoire souverain par les États-Unis. Quelle autorité vous autoriserait à faire cela ? Parlez-vous d’une occupation permanente ?» Réponse : «J’envisage un statut de possession de long terme […], ça n’a pas été une décision prise à la légère ; tous les gens à qui j’ai parlé aiment cette idée des Etats-Unis possédant ce pan de territoire».
Selon lui, il faut que Gaza «ne soit plus jamais une menace», et cela passe donc par une annexion pure et simple du territoire par les USA.
Déportation
Deuxième point, la déportation de toute la population civile de Gaza. «Gaza ne doit pas traverser un processus de reconstruction et d’occupation par les mêmes personnes qui ont vécu ici, qui se sont battues pour ça, qui y sont mortes [sic], qui y ont vécu une misérable existence», a-t-il annoncé.
«Les Palestiniens n’ont pas d’autre choix que de quitter Gaza. Ils sont là parce qu’ils n’ont pas d’alternative [ …], je ne sais pas pourquoi ils voudraient rester. C’est un site de démolition». Déporter un peuple entier, mais pour son bien.
Trump a poursuivi : «On parle probablement de 1,7, peut-être 1,8 million de personnes. Je pense qu’elles vont toutes être réinstallées dans des zones où elles peuvent vivre une belle vie sans avoir peur de mourir chaque jour». Une belle vie après avoir vu leurs proches massacrés, leurs maisons détruites, sans obtenir justice, et en étant arrachées à la terre où elles ont toujours vécu. Notons aussi les chiffres donnés par Trump : avant le 7 octobre, la population de Gaza était évaluée à plus de 2,2 millions de personnes. Il en fait « disparaître » 500.000 dans ses chiffres. A-t-il des informations que nous n’avons pas ?
Le président des USA compte sur les pays voisins pour recevoir les rescapés : selon lui, ces États sont «immensément riches» et devront financer les nouvelles habitations. «Nous nous assurerons que ce soit quelque chose de vraiment spectaculaire», a-t-il promis. «Ils disent qu’ils n’accepteront pas. Je dis qu’ils vont le faire, et je pense que d’autres pays vont aussi le faire», a assuré Trump.
Projet immobilier
Troisième point, Trump, qui a fait sa fortune en tant que promoteur immobilier à New York, veut lancer un projet de construction pharaonique sur les amas de ruines et de cadavres. D’abord, faire table rase : «Nous nivellerons le site et nous nous débarrasserons des bâtiments détruits. Nous nivellerons le site».
Une fois Gaza totalement réduite à l’état de poussière, il veut en faire un endroit touristique et vendre du rêve : «le potentiel de la bande de Gaza est incroyable» et pourrait, selon lui, ressembler à la «côte d’azur du Moyen-Orient». «Ça pourrait être si magnifique». Il avait déjà dit durant la campagne présidentielle que Gaza pourrait ressembler à Monaco.
Le niveau d’irresponsabilité et d’inhumanité d’un tel projet, annoncé tranquillement dans une conférence de presse, alors que des milliers de cadavres se décomposent dans les ruines de Gaza, donne le vertige.
Le rêve messianique exaucé
Depuis plusieurs mois, l’extrême droite israélienne appelle à déporter la population de Gaza. Netanyahou avait déclaré à ses supporteurs du Likoud qu’il voulait «réduire la population de Gaza à son minimum», son ministre Smotrich avait annoncé un objectif chiffré : «100.000 ou 200.000 Arabes à Gaza». Itamar Ben Gvir, autre ministre, déclarait «Gaza est à nous pour l’éternité».
Dès octobre 2023, juste après le démarrage du génocide, le Ministère de l’Information israélien proposait déjà un plan pour «déplacer» les habitants de Gaza. En décembre 2023, un promoteur immobilier israélien diffusait une publicité volontairement provocatrice pour vendre de nouveaux lotissements qui seraient construits sur les ruines. Nous y sommes. Trump compte accomplir le projet messianique et exterminateur de l’extrême droite israélienne.
Plus d’armes, moins d’humanitaires
Ce n’est pas tout. Le 4 février, le président des USA a aussi décrété le retrait de son pays de l’UNRWA, l’agence des Nations Unies pour les réfugiés palestiniens. Priver cette organisation humanitaire, qui a maintenu en vie des centaines de milliers de palestiniens ces dernières années, est un crime absolu. En parallèle, les écoles et dispensaires de l’UNRWA viennent de fermer dans la partie arabe de Jérusalem, sur ordre du gouvernement israélien.
La Maison Blanche a annoncé mardi l’envoi d’un milliard de dollars de bombes et de bulldozers blindés à Israël. Et Israël s’est retiré du Conseil des droits de l’homme de l’ONU. Il n’y a plus aucune apparence à sauver, le droit international est mort.
Il n’y a plus non plus d’espoir de «solution à deux États» : Gaza est anéantie, la Cisjordanie est colonisée et transformée en confettis. Soit la Palestine est vouée à disparaître sous les chenilles des blindés israéliens, soit les résistances, en Palestine comme dans le reste du monde, permettront d’espérer un État pluriethnique et multiconfessionnel, laïque et égalitaire, de la mer au Jourdain.
Enfin, ce qui se joue sous nos yeux, dans une sidération générale, est une menace pour le monde entier. Des États militarisés et impérialistes se donnent le droit d’éliminer un peuple entier de façon décomplexée et revendiquée. C’est un message. Quiconque résiste à l’Empire peut être rayé de la surface de la Terre.
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