La semaine qui vient de s’écouler a vu un nouveau pic de répression des voix pour la Palestine en France. Alors que les crimes de masse continuent en Cisjordanie comme à Gaza, les collectifs Urgence Palestine et Palestine Action France ont été visés par des opérations répressives brutales, pendant que les réseaux pro-israéliens restent impunis et protégés en France. On fait le point.

Antiterrorisme contre le porte-voix d’Urgence Palestine
5 novembre, à l’aube. Des policiers débarquent au domicile d’Omar Alsoumi, lui-même palestinien en exil et porte-parole du collectif Urgence Palestine. Il est perquisitionné devant sa famille, les forces de l’ordre saisissent notamment son matériel informatique, et l’embarquent au commissariat. Il passe deux jours en cellule. Le motif ? «Apologie du terrorisme». Comme des dizaines d’autres personnes en France, il subit cette procédure d’exception uniquement pour avoir critiqué Israël. Ces mesures se généralisent pour faire taire la contestation, en particulier quand elles dénoncent le colonialisme, et ont fait perdre tout leur sens au mot même de «terrorisme». Mais elles permettent une répression très efficace pour intimider et faire taire.
Depuis plusieurs mois, Omar Alsoumi subit aussi le gel de ses avoirs bancaires sur décision administrative, ce qui le plonge, lui et sa famille, dans une situation de précarité. C’est une autre forme de répression perverse. Et le collectif Urgence Palestine est lui-même visé par un projet de dissolution, qui n’a pas abouti pour le moment.
Le 7 novembre, le militant palestinien est sorti du tribunal avec une convocation le 6 mai 2026 pour «apologie du terrorisme et refus de remise de la convention secrète de déchiffrement». Il subira jusqu’au procès, donc pendant de longs mois, un contrôle judiciaire qui va restreindre ses libertés fondamentales.
En sortant de cellule, Omar Alsoumi déclarait : «Nous faisons l’objet d’une persécution politique. On est traité de terroristes alors que nous défendons le droit du peuple à lutter contre la tyrannie coloniale et le génocide à Gaza !» Son avocate Elsa Marcel estime que «cette procédure s’inscrit dans la continuité de l’acharnement à l’encontre des soutiens de la Palestine».
Passages à tabac et arrestations à la Philharmonie de Paris
«Israël assassin» : le cri résonne le 6 novembre dans une salle de la Philharmonie de Paris, un lieu accueillant des concerts de musique classique dans la capitale. Une jeune militante jette des tracts qui mentionnent : «Israël, tu joues la symphonie de ton armée génocidaire» avant d’être évacuée manu militari et arrêtée.
Quelques minutes plus tard, un fumigène est allumé dans la salle, pour dénoncer à nouveau l’État israélien. Pour cause : l’orchestre qui se produit est celui d’Israël. Il se présente lui-même comme «ambassadeur culturel» de l’État colonial, et va d’ailleurs terminer sa représentation en jouant l’hymne israélien. C’est une méthode insidieuse de propagande, qui passe par la musique et la culture. D’ailleurs, la Philharmonie de Paris le sait très bien, puisque ce lieu a boycotté les orchestres russes depuis plusieurs années, considérant que les accepter reviendrait à valider les actes de Poutine en Ukraine. Du temps de l’apartheid en Afrique du Sud, un boycott des produits matériels et culturels sud-africains était également généralisé. Il n’y a donc aucune raison de laisser Israël se produire à Paris. De nombreuses organisations de gauche avaient d’ailleurs appelé à l’annulation de ce concert, sans succès.
Il ne restait qu’une solution : perturber cet événement scandaleux. Sauf que les militants pro-palestiniens qui ont allumé le fumigène ont subi un déferlement de violence de la part du public, largement composé de sionistes. Les images sont édifiantes : on voit un homme âgé, pacifique, roué de coups par une foule enragée, sous les applaudissements du public. Un lynchage.
Pourtant, aucun agresseur sioniste n’a été arrêté : ce sont trois militants pro-palestiniens qui ont été menottés et embarqués, soit quatre en tout avec la jeune femme interpelée peu avant. Ils et elle vont subir près de trois jours d’enfermement, avec une reconduction de leurs gardes à vue et un déferrement au tribunal, pour avoir simplement organisé une perturbation non-violente. L’action a été revendiquée par le collectif Palestine Action France.
Samedi 8 novembre, alors qu’un rassemblement de soutien avait lieu devant le commissariat où étaient enfermé·es les militant·es, des milices sionistes ont organisé une attaque du rassemblement, provoquant une nouvelle interpellation du côté des soutiens pro-palestiniens. Finalement, c’est ce dimanche que les membres de Palestine Action commençaient à sortir.
Torrent de diffamations
Si nous n’étions pas en pleine fascisation, tout le monde s’inquièterait de voir une procédure antiterroriste s’abattre sur un militant palestinien. Il y aurait un vrai débat sur le fait que la Philharmonie de Paris accueille un concert qui sert au soft power israélien, ou que des personnes soient tabassés par des sionistes pour avoir émis une opinion.
Dans la France de 2025, tout cela n’est même pas un sujet. Au contraire, un torrent de diffamations s’est abattu sur celles et ceux qui luttent. L’essayiste islamophobe Florence Bergeaud-Blackler, proche de Macron, a comparé l’action avec un fumigène à l’attaque du Bataclan, qui a fait près de 100 morts. La direction de la Philharmonie de Paris annonce porter plainte et déclare: «La violence n’est pas un débat. Et la faire entrer dans une salle de concert est très grave», alors que les seules violences établies sont celle des spectateurs pro-israéliens qui se sont déchaînés.
Retailleau, jamais en reste pour salir la réalité, a qualifié les manifestants de «vrais fascistes». Il faut dire qu’il s’y connaît bien, puisqu’il vient de l’extrême droite vendéenne et qu’il affiche sa complicité avec les mouvances néo-nazies. Aurore Bergé et Rachida Dati ont évidemment qualifié les actions pour la Palestine «d’antisémites», mais qui croit encore à cette accusation qui a tellement été utilisée qu’elle ne veut plus rien dire ?
Olivier Faure du PS, s’est empressé d’aboyer avec le reste de la meute : «On n’interdit pas un orchestre israélien de jouer à la philharmonie de Paris parce qu’on combat Netanyahu. La musique ne bombarde personne».
Derrière cette double répression, policière et médiatique, l’objectif reste de criminaliser et d’assimiler à du terrorisme la dénonciation d’un génocide colonial. Mais les illusions et mensonges du camp pro-israélien se dissipent et, jusqu’à présent, cette répression n’entame en rien la détermination des combattants et combattantes pour la dignité et la justice.
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