Nantes : laboratoire raciste et sécuritaire


Rafles hebdomadaires, fichage des personnes étrangères, tags racistes et Centre de rétention… avec l’appui enthousiaste du PS


En haut : quatre CRS fouillent une personne portant une capuche, de dos.

En bas : des croix celtiques taguées par des racistes sur le siège de la CIMADE à Nantes.
Les Croix celtique taguées sur la Cimade.

Si vous êtes Nantais-e, vous vous êtes sûrement aperçu-e que la présence policière s’était faite très oppressante ces dernières semaines dans le centre-ville. Et pour cause, la surenchère sécuritaire et raciste que connaît la ville depuis quelques années s’est encore durcie.

Saturation policière et traque aux indésirables

Mardi 21 janvier une “vaste opération de police” selon Ouest France, une rafle selon nous, était menée à Nantes à grand renfort de la CRS 82, cette unité ultra violente créée par Darmanin. 26 personnes ont été interpellées. La police nationale a indiqué cibler des crimes aussi gravissimes que… le trafic de cigarettes de contrebande. Dormez sur vos 2 oreilles, la police vous protège de dangereux criminels ! Pour parquer les personnes arrêtées, des places spéciales au CRA – le Centre de Rétention Administrative – d’Olivet dans le Loiret ainsi qu’en région parisienne ont été mises à disposition à l’avance. Et depuis le 21 janvier, ces rafles se produisent une fois par semaine. L’un des camarades interpellés lors de ces rafles nous a indiqué qu’un policier l’avait prévenu que ces contrôles allaient continuer, et qu’ils avaient intérêt à ne pas rester dans le quartier de Commerce. «Le centre-ville, je n’y vais plus», confie un autre.

Des contrôles d’identité de la douane avec brigade cynophile ont également lieu à la gare de Nantes, ainsi que dans les trams. Bref, le territoire est quadrillé pour que toute personne jugée indésirable en soit expulsée. Problèmes de communication ? Le ministère de l’intérieur a d’abord confirmé que ces contrôles ciblaient les étrangers en situation irrégulière, puis fait marche arrière. La préfecture contredit, affirme qu’il s’agit d’une opération de lutte contre les stupéfiants. Ils s’emmêlent les pinceaux dans leur racisme, et oublient parfois que le RN n’est pas encore au pouvoir.

La soit-disant lutte contre la drogue n’a en réalité qu’un objectif : justifier a priori les contrôles au faciès, pour pouvoir légitimer les arrestations massives de personnes sans papiers. Et que font les soi-disant élu-es de gauche pour lutter contre ces offensives racistes ? Rien, au contraire, ils et elles applaudissent des deux mains et en redemandent.

Le Parti Socialiste dans ses œuvres

Lors de ses vœux du 9 janvier 2025, la maire PS Johanna Rolland a même placé la sécurité en tête de ses préoccupations : «protéger, c’est d’abord assurer la sécurité. Nous menons avec les services de police et la justice une action globale sur l’ensemble de la chaîne, de la prévention à la sanction républicaine. Grâce à ce travail soutenu et quotidien depuis plusieurs années, nous avons collectivement progressé et franchi des étapes. Les résultats sont encourageants et nous invitent à poursuivre collectivement notre mobilisation.» Des propos que ne renieraient pas un élu de droite.

Elle avait déjà annoncé en avril 2024 augmenter le nombre de caméras de surveillance de la ville à 330, et recruter 50 nouveaux policiers municipaux. Pascal Bolo, adjoint PS en charge des finances ajoute “ne pas avoir de problème avec l’idée de renvoyer des gens qui n’ont pas vocation à rester sur le territoire”. Le même, quand il était chargé de la sécurité, avait publié un tweet en 2022 contre les «indésirables» à Nantes, accompagné de photos de jeunes attendant le tram dans le centre-ville, dont le seul tort était, selon l’élu, de porter des survêtements. A cette occasion, le parti Reconquête d’Eric Zemmour avait félicité le socialiste.

Le Parti Socialiste n’est pas qu’un parti de traîtres, il est un parti fascisateur. Il a troqué un vague discours social pour une logique clairement néolibérale dès les années 1980, avec des politiques de privatisation et de précarisation. Le PS a mis en œuvre, avec plus d’efficacité que la droite, le saccage des acquis sociaux issus de la Résistance, y compris par la violence, comme lors de la Loi Travail en 2016. Une fois au pouvoir, François Hollande a imposé l’état d’urgence, et expulsé plus de réfugiés que la droite dure de Nicolas Sarkozy. Mais ce n’est pas tout, les dirigeants socialistes se permettent depuis des années des déclarations ouvertement d’extrême droite, parlant de «colonisation à l’envers», de «partition» et de conflits ethniques. Après les propos racistes de François Bayrou sur la “submersion migratoire”, vocabulaire directement emprunté à l’extrême droite, le PS a fait mine d’en être scandalisé deux minutes, puis a repris les négociations dès le lendemain matin. A l’échelle nantaise, ville contrôlée depuis 30 ans par les socialistes, ils font la même chose.

Fichage illégal des étrangers

Le 21 février, le préfet des Pays de la Loire Fabrice Rigoulet-Roze présentait dans un vocabulaire guerrier son “plan de bataille”, le PADRSQ, pour “plan d’action départemental de restauration de la sécurité du quotidien”. En clair : faire de Nantes une ville sous surveillance et contrôle policier incessants. Il s’est réjoui des 26 opérations “place nette” menées en à peine un mois et demi, avant de donner la parole au nouveau procureur de la République, Antoine Leroy qui lui aussi s’est enthousiasmé des rafles : « les opérations “Place nette” sont un succès en termes de lutte contre la délinquance. Elles génèrent un nombre important de procédures. »

Une note de service de la police nationale de Loire Atlantique a également exposé une nouvelle procédure : la création d’une “fiche navette”. Sur cette fiche, en plus d’éléments comme l’identité et la nationalité, on retrouvera les dates de validité du titre de séjour. Mais surtout, un chapitre “faits judiciaires” avec les dates de placement en garde à vue, motifs de l’interpellation et procès verbaux de garde à vue. Ces fiches pourront être directement transmises à la direction des migrations et de l’intégration de la préfecture, laquelle pourra décider d’un retrait ou refus de titre de séjour, et d’une éventuelle mesure d’éloignement ou placement en CRA. Ces fiches navettes, en plus d’être infamantes, n’ont aucun cadre légal et violent directement le secret de l’enquête et la présomption d’innocence.

Pour un simple placement en garde à vue, pour quelque motif que ce soit, même s’il n’y a ni jugement ni condamnation par la suite, le titre de séjour pourra être retiré. Il est question de faire régner la terreur, punir et enfermer les étrangers, rien de plus.

Un CRA flambant neuf

Et l’État est capable de verser des sommes colossales pour réprimer et chasser les personnes exilées. La preuve, le projet de CRA – Centre de rétention administratif – avance à Nantes, et devrait voir le jour début 2028. Coût minimum de l’opération : 30 millions d’euros. Alors que le budget de la région a été massacré au nom de l’austérité budgétaire, enfermer des personnes sans papiers est une priorité pour ces extrémistes. Le lieu apparaît même déjà sur Google Maps, alors que les travaux n’ont pas encore commencé et accusent déjà un retard considérable. Situé près de la maison d’arrêt de Nantes-Carquefou, c’est en octobre 2022 que le projet a pris forme, lorsque Johanna Rolland (encore elle) se rendait dans le bureau de Gérald Darmanin pour le supplier de lui donner plus de moyens pour «lutter contre l’insécurité», dans un contexte de discours médiatique anxiogène sur Nantes.

Tags néo-nazis

Ces violences institutionnelles qui s’efforcent de vouloir mettre un signe = entre immigration et délinquance donnent également un blanc seing aux nervis d’extrême-droite qui sentent le vent tourner en leur faveur. Ainsi, dans la nuit du samedi 22 février les locaux de la Cimade – une association de soutien aux étranger-es – ont été recouverts de tags représentant des croix celtiques. Un symbole suprémacistes blanc. Ce n’est pas la première fois, puisqu’en 2023 l’association avait été la cible de tags haineux.

Des attaques contre une organisation humanitaire sont encouragés par les discours politiques. Le Ministre de l’Intérieur Retailleau annonçait en janvier son intention de s’en prendre aux associations d’aide aux exilés. «Je ne vois pas pourquoi l’État financerait des associations qui luttent contre la politique que souhaite le peuple français» a-t-il déclaré. En racontant que «des associations se sont dévoyées», Retailleau vise nommément la Cimade, association fondée en 1939, juste après le début de la seconde guerre mondiale, par des chrétiens protestants, pour aider les réfugiés et les victimes de la guerre. Cette association a notamment sauvé des centaines de juifs pendant l’occupation. Ses bénévoles agissent pour les droits des réfugiés et des migrants à travers le monde depuis 86 ans. C’est cette structure que Retailleau veut asphyxier financièrement. Et que les fascistes prennent pour cible à Nantes.


Une seule solution : l’organisation et la solidarité. Des associations comme le Gasprom et la Cimade se mobilisent pour soutenir les personnes subissant de plein fouet cette escalade raciste. Deux dates sont à retenir pour lutter contre leur logique mortifère : l’Assemblée générale contre le CRA au B17 (17 rue Paul Bellamy) le 20 mars à 18h, et la mobilisation du 22 mars pour la journée mondiale contre le racisme et le fascisme.


AIDEZ CONTRE ATTAQUE

Depuis 2012, nous vous offrons une information de qualité, libre et gratuite. Pour continuer ce travail essentiel nous avons besoin de votre aide.

Faites un don à Contre Attaque, chaque euro compte.

Laisser un commentaire