Surveillance généralisée : 80 caméras supplémentaires à Nantes cette année


Socialisme : 330 mouchards qui surveillent l’espace public, 20 millions d’euros de facture en vidéosurveillance, 110 millions en dépenses sur la sécurité


Des caméras de surveillances installées à Nantes

Nantes serait une ville gangrénée par l’insécurité. Cnews n’arrête pas de le dire : la chaîne de Bolloré avait même osé titrer ses reportages «Nantes plus dangereuse que Bogota» ou encore «Peur sur la ville», en envoyant des équipes spécialement chargées de présenter la Cité des Ducs comme un coupe-gorge. Ce délire a rapidement infusé dans beaucoup d’autres médias, du Figaro en passant par BFM ou M6.

Campagne mensongère

Les classements officiels se succèdent : factuellement, Nantes est loin d’être une ville dangereuse. Selon une récente étude du gouvernement sur le site «Data.ville», basée sur les chiffres officiels de la délinquance, Nantes n’est même pas dans les 10 villes les plus «dangereuses» de France. Elle est même loin derrière Lille, Bordeaux ou même Angoulême. Loin, très loin de ce qu’affirme régulièrement la propagande médiatique.

Répéter 1000 fois le même mensonge ne le rend pas vrai pour autant, mais il contamine les cerveaux. Nantes est une ville de province en expansion, plutôt calme en-dehors des moments de colère révolutionnaire qui font la fierté locale. Pourtant, il n’est pas rare d’entendre ou de lire sur les réseaux sociaux que Nantes serait une ville ultra-dangereuse où l’on ne peut pas sortir la nuit.

Bien souvent, ce jugement émane de personnes qui n’y habitent même pas et ne connaissent rien de Nantes, ni de son histoire. C’est donc factuellement un mensonge. La ville était d’ailleurs bien plus pauvre et tendue dans les années 1980, à l’époque où il y avait encore un grand port et des quartiers populaires dans le centre-ville par exemple.

Pourquoi avoir imposé un tel mensonge ? Pourquoi les médias des milliardaires ont organisé une telle fixation autour de Nantes ? Probablement pour imposer, dans une ville dont la tradition rebelle n’est plus à démontrer, de grands moyens sécuritaires. Suite à cette campagne de désinformation, le gouvernement a décidé d’implanter une compagnie de CRS 8les «super-CRS» ultra-violents de Darmanin – un nouveau Centre de rétention, de nombreux effectifs de police et des caméras absolument partout.

Évidemment, ces moyens présentés comme permettant de «lutter contre l’insécurité» ont été immédiatement déployés pour réprimer les contestations sociales et harceler la jeunesse précaire. Mais le prétexte de la «délinquance» a rendu acceptable le fait que Nantes soit un laboratoire d’expérimentations sécuritaires depuis des années. Une aubaine.

Des millions pour la surveillance

Ces rappels étant posés, venons-en au fait : la mairie socialiste s’est précipitée dans une fuite en avant sécuritaire.

Jeudi 25 avril 2024, la maire de Nantes Johanna Rolland a annoncé l’augmentation du nombre de caméras de vidéosurveillance dans la ville. En 2023, elle avait déjà accéléré massivement le déploiement des caméras : 250 sont déjà installées. Ce sont désormais 80 caméras supplémentaires d’ici la fin de l’année 2024 qui sont prévues, donc 330 au total. À ce rythme, Nantes va bientôt rattraper les grandes villes gouvernées par l’extrême droite, comme Nice.

Combien ça coûte ? Une fortune. De 2018 à fin 2023, l’investissement pour le «Centre de Supervision Urbaine», un bâtiment spécialisé avec une salle couverte d’écrans, qui centralise toutes les images captées dans la ville, scrutées par des professionnels rivés devant les images 24 heures sur 24, a coûté 6,4 millions d’euro. Le fonctionnement du service, avec 22,5 équivalents temps plein, représente de son côté une somme de trois millions d’euros par an pour la ville de Nantes depuis 2018 selon le média Actu.fr.

Pour 2024, l’ajout des 80 caméras supplémentaires coûtera 2,4 millions d’euros, à raison de 30.000 euros environ par appareil toujours selon Actu.fr. Rien que les 330 caméras ont donc coûté près de 10 millions d’euros.

Avec le Centre de Supervision Urbaine et les salaires des surveillants, on arrive quasiment à 20 millions d’euros en quelques années, juste pour surveiller les rues à distance. Les nantais qui votent socialiste par habitude depuis 30 ans seront heureux d’apprendre où part leur argent.

Surveiller et punir

Et tout ça pour quoi ? Pour quel résultat ? «Nombre d’enquêtes aboutissent par l’exploitation des caméras de surveillance» se vantait un policier auprès de Ouest-France en 2021. Pas les enquêtes sur les agressions d’extrême droite ou les violences policières en tout cas. Plusieurs cas de mutilations de manifestants ont été classés suite à une « panne » malencontreuse des caméras.

Depuis l’ouverture du Centre de Supervision Urbaine il y a 6 ans, «près de 3.000 extractions et 1.080 opérations coordonnées entre services de la police ont été recensées» explique France Bleu. Une «opération» tous les deux jours en moyenne. Par exemple, ces images ont servi à enquêter sur des faits très graves comme ce manifestant qui avait pris un drapeau français des mains d’un militant d’extrême droite durant les mobilisations contre le Pass Sanitaire en 2021, et qui a été jugé pour «outrage au drapeau». Ou encore ce manifestant qui avait fait un tag durant le mouvement social contre la réforme des retraites en 2023. De l’argent bien investi, pour mater les résistances.

La mairie compte même installer de nouvelles caméras dans des quartiers comme Chantenay et de Doulon, à l’écart du centre-ville. Cela fera rire les nantais.e.s : ce sont des quartier paisibles, truffées d’épiceries bio et de SUV électriques, colonisés par la nouvelle bourgeoisie métropolitaine.

Il faut ajouter à ce tableau les centaines de caméras présentes dans tout le réseau de transports en commun, et celles installées par des entreprises privées, sur les banques et autres. Enfin, il arrive que la police installe ses propres caméras sur le parcours des manifestations. Bientôt, il ne restera plus un centimètre carré d’espace nantais sans surveillance permanente.

Enlaidir la ville

Cette surveillance de l’espace public passe par un enlaidissement de la ville. Prenons l’exemple de Commerce, au cœur de Nantes.

En 2019, la plupart des arbres qui entouraient la croisée des trams ont été abattus. 70 platanes en moins dans cette zone très passante, disparus, et tous les magnolias coupés pour y implanter un magasin. Le résultat : une vaste esplanade rocheuse, glissante sous la pluie, caniculaire au soleil. Il s’agissait pour les architectes d’imaginer un urbanisme de la surveillance. La police adore ces esplanades sans arbres, sans recoins. Les caméras de la mairie peuvent ainsi surveiller toute la zone, les forces de l’ordre quadriller tout l’espace. Et en cas de manifestation, c’est un champ de tir, extrêmement favorable pour réprimer, blesser ou arrêter.

La mairie ne s’en cachait même pas dans Ouest-France : «l’espace rendu aux piétons, est aussi plus “transparent”, sans recoin, dans le but lutter contre l’insécurité, la délinquance et les trafics».

Aujourd’hui, face aux innombrables plaintes des riverains sur la laideur et l’hostilité de cet espace, la mairie propose de replanter des arbres, mais il est un peu tard.

De même, la suppression des Halles de la Place du Bouffay, qui permettaient de s’abriter, de finir la nuit entre fêtards ou d’organiser des brocantes, a laissé place à une zone totalement dégagée : une aubaine pour les commerçants mais aussi pour les caméras qui surplombent la zone, très fréquentée les jours de manifestations.

Cerise sur le gâteau, la mairie embauche toujours plus de policiers municipaux, qui sont de plus en plus armés. 50 nouveaux postes sont prévus en 2024, en plus des 140 existants, pour aller jusqu’à 235 agents à l’horizon 2026. Une véritable petite armée au service de la mairie, en plus des centaines de policiers nationaux. Et en bonus, la création d’une «police métropolitaine des transports en commun», avec une trentaine d’agents. Bientôt un flic par habitant ?

La Métropole « sociale-écologiste »

La maire Johanna Rolland est contente : «Jamais la Ville de Nantes n’a consacré autant de moyens aux questions de sécurité. Depuis que je suis maire et présidente de la métropole, ce sont 110 millions d’euros qui ont été investis sur cette thématique». Une fortune.

Et pendant que la ville dépense ces sommes pharaoniques pour surveiller, punir, et autres gadgets merveilleux, il n’y a pas d’argent pour loger les personnes sans-toit ou lutter contre les inégalités qui se creusent dans la ville, qui se gentrifie à vitesse accélérée. Décidément, c’est beau une métropole de gauche.


Il y a quelques semaines, la ville de Brest essayait d’imiter celle de Nantes : alors qu’il n’y avait encore aucune caméra dans l’agglomération bretonne, la mairie PS a cédé à la tentation de la vidéosurveillance, en installant ses premières caméras dans un quartier connu pour ses lieux militants. Quelques jours après, deux des six nouveaux mouchards scrutant une place ont été rendues inopérants par des jets de peinture

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