Violences sexistes : comment boycotter la police ?


Nous n’avons pas besoin de la police pour prendre nos plaintes


On sait pertinemment que la police ne sert à rien d’autre qu’à maintenir le système établi, un ordre patriarcal, raciste, inégalitaire, au moyen d’une répression violente à l’encontre des classes populaires, des personnes racisées et sexisées. La police tue, mutile et viole. La police torture dans les commissariats, brise des vies, mutile et viole dans les manifs et dans les quartiers.

Et pourtant on continue d’entendre que la police peut être utile pour aider les victimes. Une chimère qui permet de donner bonne conscience et légitimer la présence de plus en plus constante des forces de l’ordre dans l’espace public. Pourtant, concrètement, que fait la police pour les victimes ? Concernant les victimes de leurs propres exactions, il est bien évident qu’elle ne fera rien, avec le soutien complice de la Justice. Mais qu’en est-il des autres?

La police a toujours défendu l’ordre bourgeois et capitaliste. Historiquement elle s’est construit sur ces bases, depuis Louis XIV voulant purger la Cour des Miracles à la naissance de la Police Nationale sous Vichy. Aujourd’hui, les seules victimes que la police peut entendre sont les Tesla brûlées, les vitres de banques brisées, les bourgeois et les patrons volés de quelques euros, les hommes violents, voilà les seules victimes crédibles aux yeux de la police.

Le féminisme washing à gerber qui émerge depuis quelques années dans la police n’est là que pour faire oublier que le ministre de l’Intérieur lui-même est un violeur, que les policiers sont les premiers masculinistes violents, et que la domination patriarcale est leur religion. Pour toutes celles et ceux qui connaissent la violence de la police, le souhait de déposer plainte nous place dans une situation particulièrement inconfortable de dissonance cognitive. Déposer plainte pour des violences sexistes et/ou racistes, c’est également pendre le risque de nouvelles violences. Derrière les murs clos du commissariat, dans les bureaux fermés des agents, les violences verbales, la culpabilisation, le mépris et parfois même simplement le refus de prendre une plainte sont monnaie courante.

Mais alors que faire pour celles et ceux qui souhaitent déposer plainte ? Pas nécessairement par croyance absolue en l’institution judiciaire, mais par besoin de reconnaissance «officielle», pour qu’un nom soit inscrit quelque part, que l’histoire soit écrite ailleurs que dans nos seuls cauchemars. Pour que, peut-être, cela puisse aider une prochaine victime et rendre «crédible» son témoignage aux yeux de la justice, pour une fois. Peu importe les raisons, le souhait de déposer plainte est un choix personnel, propre à chacun-e. Mais ce qu’on ignore souvent c’est que nous n’avons pas besoin de la police pour prendre nos plaintes. Oui, il est possible de déposer plainte par courrier auprès du Procureur de la République. Cela permet, d’une part, de restituer nos récits précisément, avec nos mots, sans le biais d’agent-es de police trop souvent incapables de retranscrire correctement la parole des victimes et surtout loin d’être impartiaux sur les questions de violences racistes ou sexistes.

Habituellement, le dépôt de plainte au commissariat est suivi d’un appel au service de traitement en temps réel du tribunal. L’officier de police judiciaire résume par téléphone la plainte de la victime, avec ses mots de keuf, et c’est sur la base de ce résumé incomplet et subjectif qu’un-e substitut du proc de permanence prendra, en quelques minutes, la décision de poursuite ou non. En quelques minutes, ce substitut va donc prendre une décision déterminante : faire le choix d’engager une enquête et de poursuivre l’affaire devant un tribunal, de recourir à des alternatives aux poursuites lorsque l’auteur est connu ou bien tout simplement de classer sans suite.

En terme de respect des droits des victimes, le classement sans suite est souvent d’une grande violence. Bien souvent parce qu’en matière de violences policières, de violences masculines ou de violences racistes, ces classements sans suite habituels ne sont absolument pas justifiés. Les procureurs ne respectent que rarement la loi qui les obligent à informer les victimes du classement. Et les motifs de classement restent souvent bien obscurs. La procédure qui permet de consulter le dossier de procédure est parfois un chemin semé d’embûches, un moyen de dissuader les personnes victimes de prendre conscience du total mépris de la justice envers certaines populations. Il existe des recours, certes, mais qui ne sont pas anodins, en terme d’engagement et de risques notamment financiers pour la victime.

La possibilité de se passer de la police, en tant que victime, est peu connue du grand public. Ce silence n’est peut être pas un hasard. Car si on sait désormais que nous n’avons pas besoin de la police pour déposer plainte, que nous pouvons créer des collectifs pour s’entraider pour celleux qui ne maîtrisent pas la rédaction… si l’on sait tout ça, alors à quoi sert la police ?

À RIEN.

Ne nous faisons toutefois pas d’illusions sur l’institution judiciaire, elle aussi gangrenée par le racisme, le sexisme et la culture du viol. Cela n’empêchera peut-être pas nos plaintes d’être classées, mais nos récits n’auront au moins pas été modifiés, coupés, insultés. Ne nous reposons pas sur des magistrat-es représentant-es de l’ordre bourgeois et colonial pour rendre justice. Créons des solidarités, organisons-nous collectivement. Menons des contre-attaques féministes, antifascistes, antiracistes… inversons le rapport de force pour que la peur change de camp. C’est le seul langage que peuvent entendre ceux qui nous dominent et nous écrasent depuis trop longtemps.

Décider de boycotter la police c’est une action politique, en refusant de donner bonne conscience aux keufs, en refusant de s’exposer à leurs violences… Une manière de démontrer que la seule chose que savent faire les flics, c’est casser, brutaliser, violenter, mutiler, tuer les arabes, les trans, les pauvres, les travailleur-ses du sexe, les femmes, les militant-es, les écolos, les noir-es… tout en protégeant à tout prix les classes dominantes et le capitalisme.

Ne participons pas à restaurer l’image crade et puante de la police. Boycottons-la. Et organisons la riposte !


L’article du code de procédure pénale obligeant les procureurs à recevoir les plaintes : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006574932/2023-07-31/

Modèle de courrier pour porter plainte : https://www.service-public.fr/simulateur/calcul/Porter_plainte

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