En marche vers la privatisation de l’Éducation Nationale


Pour détruire un service public, la recette des néolibéraux est connue


EN MARCHE VERS LA PRIVATISATION DE L’ÉDUCATION NATIONALE

La recette : il suffit de l’asphyxier en réduisant ses moyens pour le rendre de mauvaise qualité, et en parallèle de le mettre en concurrence avec un service privé qui, lui, aura été favorisé. Ainsi, progressivement, s’installe l’idée que le secteur privé serait «plus efficace», et vous pourrez tranquillement privatiser ou liquider le service public. C’est ce qui est en cours dans le domaine postal, ferroviaire, hospitalier… mais aussi éducatif.

Côté pile : des cadeaux monstrueux à l’enseignement privé

On a tendance à croire que ces écoles privées religieuses s’autofinancent avec les frais d’inscription que doivent payer les familles, mais pas du tout. L’État subventionne l’école privée, qui reçoit autour de 8 milliards d’euros d’argent public par an. Les collèges et lycées privés sont financés pour 65,7% par l’État et regroupent 2 millions d’élèves en 2022. L’écrasante majorité de ces structures est catholique : 96%.

Financé par l’État, le privé est gagnant sur toute la ligne : l’argent public s’ajoute aux frais versés par les familles, ce qui permet à ces établissement d’avoir de meilleurs bâtiments, une meilleure qualité de cours, des classes moins remplies et des activités extra-scolaires… Au détriment des écoles publiques !

Parmi ces financements, ce sont les régions qui sont obligées de couvrir les frais de fonctionnement comme le chauffage, l’eau ou le matériel. Mais elles peuvent aussi choisir d’aller plus loin, en versant des enveloppes «facultatives», c’est à dire d’utiliser leur budget, c’est à dire nos impôts, pour offrir des bonus à ces écoles privées. Ce qui a pour effet de rendre le privé toujours plus attractif et concurrentiel, en le sur-finançant au détriment des services publics.

Ainsi, Médiapart révèle un chiffre faramineux : entre 2016 et 2023, ce sont au minimum 1,2 milliard d’euros de fonds publics qui ont été offerts à des lycées privés par les régions métropolitaines, au-delà de leurs obligations légale.

Mediapart précise : «sachant que les financements obligatoires des régions se sont élevés à 3 milliards d’euros entre 2016 et 2023, la somme de 1,2 milliard découverte par Mediapart représente une «rallonge» de quasiment un tiers». C’est un détournement massif d’argent vers les établissements qui en ont le moins besoin.

Et en tête des régions qui cajolent le plus le privé, l’Auvergne-Rhône-Alpes dirigée par Laurent Wauquiez qui a versé plus de 260 millions d’euros de subventions facultatives aux lycées privés, et les Pays de la Loire, avec 234 millions d’euros. Cela représente plus de 3.000 euros de subvention facultatives par élève et par an dans ces deux régions. Autant de fonds qui auraient pu aider l’école publique en difficulté.

Pour illustrer le scandale que constituent ces cadeaux, prenons l’exemple du lycée privé catholique Stanislas à Paris, dont on a beaucoup parlé puisque la Ministre de l’Éducation y avait mis ses enfants. Cet établissement pour riche n’a aucun besoin : on y trouve 7 gymnases et deux piscines, 21 laboratoires, 3 amphis, 2 murs d’escalade, une cantine haut de gamme, le tout sur 3 hectares dans un beau quartier. Pourtant la région Île-de-France a versé près de 1,8 million d’euros en 2023 à l’établissement, dans lesquels elle a ajouté 487.000 euros supplémentaires de subventions facultatives. Dans le même temps, des lycées de banlieue parisienne prenaient l’eau et manquaient de chauffage !

Côté face : pénurie de moyens et mal être généralisé dans l’école publique

Selon le ministère de l’Éducation nationale 3.185 postes d’enseignants du premier et second degré ne seront pas pourvus pour la rentrée 2024. Depuis trois ans, l’Éducation Nationale fait face à une pénurie de professeurs. «Au-delà de la rentrée, cette pénurie qui se perpétue pose la question de l’avenir du service public d’éducation», expliquait la secrétaire du principal syndicat enseignant sur France Info.

Cette pénurie est due au nombre de recrutement «alarmant» et à «une hausse des départs volontaires», selon le syndicat FSU, «sur 10 ans, plus de 10.000 postes ont été perdus». Et les démissions explosent, car les enseignants français du public sont parmi les plus mal payés de tous les pays de l’OCDE, en plus de subir des conditions indignes.

Lorsque l’on devient prof après un concours, on peut être parachuté dans un établissement à l’autre bout de la France, loin de sa famille, et devoir payer un logement dans un endroit qu’on ne connaît pas, et sans aucune contrepartie. Revenir dans sa région d’origine prend de longues années, et est de plus en plus compliqué : 21% de profs ont vu leur demande de mutation géographique acceptée en 2024, contre 46% il y a 20 ans. Salaire de misère, conditions de pire en pire, classes surchargées, mépris de la direction et en plus, un éloignement forcé à des centaines de kilomètres de chez soi. On comprend les démissions.

Ce manque de prof s’ajoute à la pénurie d’AESH, les personnels chargés de l’accompagnement des élèves handicapés. Ainsi, des milliers d’enfants handicapés se retrouveront à la rentrée sans solution de scolarisation adaptée, selon l’une des principales associations dans le secteur du handicap.

Enfin, selon le ministère de l’Éducation, le nombre de postes de chefs d’établissement adjoint vacants est passé de 161 à la rentrée 2021 à 579 en 2023. Selon une enquête de 2021, plus d’un personnel de direction sur deux souffre de dépression modérée à sévère et 77 % des sondés estiment vivre «sous le joug des injonctions hiérarchiques».


Récapitulons : d’un côté, un enseignement privé qui bénéficie d’un double financement, et qui permet donc aux plus privilégiés d’étudier dans un cadre favorisé, dans des écoles presque toutes catholiques, en violation totale de la fameuse «laïcité» dont un parle tant. De l’autre, une école publique qui ne peut plus remplir ses missions essentielles, et renforce les inégalités pour les élèves venant de milieux défavorisés. La guerre de classe commence dès l’école.


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2 réflexions au sujet de « En marche vers la privatisation de l’Éducation Nationale »

  1. Après ça le bloc bourgeois viendra nous parler d’économie à travers l”education, la santé et de la dette publique, mais la question est : Où sont les véritables parasites ? ces assistés qui profitent du système ? Qui sont celleux qui viennent nous déshabiller pour aller se draper alors qu’ ils ont déjà l’argent pour éviter ça ?

  2. Les décideurs, les gouvernants ont acheté leurs diplômes aux écoles privées et nous imposent leurs idées sans fondements collectifs. L’éducation publique est la seule qui peut mener la société à l’évolution positive nationale et internationale.

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