Le projet d’autoroute A69 entre Castres et Toulouse se caractérise par «l’absence de raison impérative d’intérêt public majeur justifiant la dérogation espèces protégées». En conséquence, les arrêtés autorisant la construction de l’autoroute A69 doivent être annulés. Autrement dit, le chantier doit être stoppé, car son utilité n’est pas démontrée, au regard des dégâts qu’il va commettre sur la faune et la flore. C’est la décision rendue par le rapporteur public du tribunal administratif de Toulouse ce mercredi 20 novembre.
Dans ce genre de procédure très technique, le rapporteur rend un avis qui est, dans la grande majorité des cas, suivi par le tribunal lors d’une audience qui a lieu plus tard. La décision concernant l’A69 sera rendue le 25 novembre, dans 5 jours. Cela pourrait signifier le coup d’arrêt de ce grand projet écocidaire, dont le coût est évalué à 500 millions d’euros, dont une partie d’argent public, et qui est en train de détruire plus de 400 hectares de terres, notamment des forêts aux arbres centenaires qui sont rasées sur une bande de 60 kilomètres de long.
Après des années de contestation, de rapports scientifiques prouvant la nocivité de ce projet, de pétitions, de grèves de la faim, d’expropriation, d’expulsions et de sabotages… un magistrat valide finalement les arguments de l’opposition. On est tenté de dire : tout ça pour ça.
Le collectif La Voie et Libre, qui résiste à l’A69, salue néanmoins des conclusion «sans appel» et exige l’arrêt immédiat des travaux, rappelant que «le chantier de l’A69 est encore loin d’être achevé».
Malgré tout, le temps de la justice est plus lent que celui des bétonneurs. Atosca, l’entreprise qui construit l’A69, se vante déjà du fait que l’autoroute prenne «véritablement forme», évoquant un «chantier où travaillent actuellement 1000 personnes» et soulignant que «100 % des terrassements ont démarré et 45 % ont été réalisés». L’entreprise ajoute que 70% des ouvrages d’art prévus pour enjamber la future route sont déjà installés.
Ce chantier est maudit. Début novembre, alors que la pluie s’abattait sur la région, le périmètre des travaux était inondé. Le système d’évacuation des eaux ne fonctionnait pas, les eaux polluées se déversaient partout, les terrains des habitations alentours étaient touchés. En effet, l’autoroute va imperméabiliser toute la zone et les opposant-es estiment que le tracé de la route pourrait être submergé sur 500 mètres en cas de crue et aggraverait les risques d’inondations aux alentours.
En octobre, l’un des ponts de la future autoroute devait être détruit alors qu’il venait d’être terminé, parce qu’il n’avait pas été construit au bon niveau. Voûté, large de 7 mètres, long de 40 mètres, il devait permettre de traverser un ruisseau, mais il aurait dû se situer plus bas d’un mètre pour permettre l’écoulement du cours d’eau. La construction flambant neuve est en cours de démolition, ce qui représente des centaines de milliers d’euros gaspillés et des centaines de tonnes de pièces en béton à retirer.
Auparavant, durant l’été, une milice autoroutière qui n’a toujours pas été identifiée avait mené des actions visant à terroriser les habitant-es et les opposant-es. Par exemple, le jardin d’une famille résidant sur le tracé de l’autoroute A69 avait été incendié deux fois, pour la forcer à quitter le domicile.
Au même moment, des dizaines d’arbres avaient été abattus, alors que plusieurs écologistes y étaient perchés dans des cabanes. Plusieurs avaient été gravement blessés.
Et pour imposer ce projet, l’État français a déboursé au moins 2.760.000€ rien que pour déployer en permanence 250 gendarmes qui surveillent le tracé, pour envoyer des blindés et des hélicoptères et financer les milliers de grenades tirées sur la population.
Si le 25 novembre, l’A69 est enfin mise à l’arrêt par la justice administrative, ce sera un soulagement pour les luttes écologistes. Mais ce ne sera que le début des recours – l’entreprise en charge du projet fera appel – et il sera difficile de ne pas ressentir d’amertume quant aux dégâts matériels et humains qu’a déjà causé cette autoroute.
Une réflexion au sujet de « La justice administrative sur le point de stopper le chantier de l’A69 ? »