Nucléaire : du tritium dans l’eau potable


Nouveau record ! Le cap des 10 millions d’habitants impactés par de l’eau radioactive est sur le point d’être franchi. Il s’agit bien d’un record car une précédente étude en 2019 du Canard Enchaîné révélait déjà la présence de tritium, produit radioactif issu des centrales nucléaires, dans l’eau potable consommée par 6,4 millions de personnes. Cette fois c’est Mediapart qui révèle que l’eau du robinet est largement contaminée au tritium, la forme radioactive de l’hydrogène.


NUCLÉAIRE : DU TRITIUM DANS L’EAU POTABLE

L’ensemble des réacteurs nucléaires français et une large partie des réacteurs nucléaires mondiaux génèrent un sous-produit involontaire, le tritium. Dans la réaction nucléaire, les neutrons rencontrent des atomes de bore et le tritium se forme. Le bore permet de contrôler la réaction nucléaire afin que celle-ci ne s’emballe pas. Le tritium est donc un sous-produit connu et inévitable. Ce tritium est ensuite rejeté «au moment jugé le plus opportun par EDF», dans les cours d’eau qui bordent les centrales nucléaires afin de l’éliminer. Cette contamination n’est donc pas accidentelle, mais organisée.

EDF, surveillée par l’ASN – Autorité de sûreté nucléaire – assure que ces rejets sont «soumis à une réglementation très stricte encadrant les conditions sous lesquelles ces rejets peuvent être effectués». Néanmoins les motifs pour lesquels ces rejets sont autorisés sont ceux de la nécessité de maintenir la production en évacuant le tritium quand les zones de rétention sont pleines.

Ce sont des choix économiques qui induisent ces rejets, des bâches de rétention supplémentaires pourraient être installées. La filière nucléaire est pourtant sans cesse présentée comme une énergie d’avenir, rentable économiquement, alors que les coûts de son démantèlement ne sont pas intégrés à ces calculs, que son fonctionnement repose sur du néocolonialisme, notamment au Niger. S’il fallait une preuve de plus pour montrer que le nucléaire n’est rentable qu’au détriment des populations qu’il alimente ou non, c’est chose faite.

En France, cinq cours d’eau, la Garonne, la Loire, le Rhône, la Seine et la Vienne sont bordés de centrales nucléaires. Ainsi ils contiennent tous du tritium rejeté consciemment par EDF. L’ensemble des stations d’eau potable situées en aval des centrales peuvent donc puiser de l’eau contenant du tritium. Mécaniquement, Nantes, Paris, Lyon, Agen et de multiples autres villes et communes sont concernées.

La Loire-Atlantique, qui se situe à l’embouchure de la Loire et qui subit donc les rejets de plusieurs centrales en amont, est même dans le premier département en nombre de communes concernés. Et étonnamment, le bassin nazairien, par ailleurs pollué par l’industrie chimique, connaît un pic de cancers. Cela signifie aussi qu’en cas d’accident plus grave et de déversement d’eau lourdement chargée en particules radioactives, cette même part de la population française ne pourra plus consommer d’eau potable sans s’empoisonner.

Si le tritium peut être rejeté dans de telles quantités dans les cours d’eau, c’est aussi parce que le tritium est considéré comme inoffensif. Un argument qui est triplement faux. D’abord parce qu’il a été récemment démontré que le tritium, en particulier lorsqu’il irradie depuis l’intérieur du corps, peut augmenter les risques cancérigènes, physiologiques, réduire la fertilité et la longévité. Pas de chance, pour boire de l’eau, il faut l’avaler.

Deuxièmement, l’ensemble des pollutions, générées par le capitalisme industriel crée des effets de cocktail. Ainsi l’étude de l’impact d’un polluant sur le corps humain seul ne peut révéler l’ensemble des conséquences. On imagine qu’une combinaison de pesticides Monsanto, d’additifs Nestlé et de tritium EDF ne font pas bon ménage.

Et enfin parce que l’OMS fixe le seuil de potabilité de l’eau à 10.000 Bq/l de tritium. Ce niveau est fixé en considérant le risque acceptable pour une personne à 300 fois le risque des cancérigènes chimiques. Cela revient presque à mesurer le risque de l’acide chlorhydrique en considérant la quantité qu’il faut pour dissoudre un corps. Avec cette logique, de l’acide dilué dans un peu d’eau, c’est parfait pour rincer un œil.

Au-delà de la question de l’eau, depuis 2022, les armées russes et ukrainiennes se sont régulièrement affrontées dans la plus grande centrale nucléaire d’Europe, à Zaporijia, comme deux enfants qui jouent à gratter des allumettes sur un baril de poudre.

En 2022 dans la drôme, un atelier d’EDF contenant de l’Uranium était en feu, la faute à une imprimante. Framatome avait alors déclenché un «Plan d’Urgence Interne» suivi comme toujours d’une minimisation des faits par la préfecture.

En décembre 2021, EDF a laissé fuiter 900 litres d’effluents vers le réseau de collecte d’eaux pluviales. Du tritium y a été détecté courant décembre, dans des concentrations particulièrement fortes : jusqu’à près de 29.000 Bq/l.

L’eau potable consommée quotidiennement en France contient donc des matières radioactives qui échappent à tout contrôle. Déjà, dans les années 1980, des analyses avaient révélé la présence de plutonium dans l’eau de la Loire, une matière très fortement radioactive.


À une échelle encore plus grande que celle des méga bassines, avec des risques incontrôlables, les autorités et institutions organisent le saccage et le vol de la ressource en eau qui est le bien commun le plus essentiel à la vie.


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3 réflexions au sujet de « Nucléaire : du tritium dans l’eau potable »

  1. Pour se mettre de l’argent public plein les poches, les apprentits sorciers du capitalisme transforment l’eau (élément de vie) en élément de mort

  2. Bonjour. Cet article contient des erreurs.
    Aussi la rédaction suggère une méconnaissance complète des questions de toxicité en général et de la radioactivité en particulier.

    Les taux de radioactivité maximum dans l’eau potable recommandés par l’OMS sont de 0.1Bq/L ou 1Bq/L suivant qu’il s’agisse de rayonnement Alpha ou Beta. (le tritium émet un rayonnement Beta)

    (les valeurs sont précisées au bas de la page 207 des directives de l’OMS sur la qualité de l’eau de boisson)
    Voilà un lien vers les directives de l’OMS pour vous en assurer par vous-même:
    https://iris.who.int/bitstream/handle/10665/258887/9789242549959-fre.pdf

    Cependant, la valeur préférée par les spécialistes est plutôt le millisievert/an puisque c’est la mesure la plus pertinente pour évaluer le risque.
    le taux maximum recommandé par l’OMS exprimé dans cette mesure est 0,1 millisievert (mSv) par an.

    Il y a également que la locution « 10.000 Bq/l de tritium » inscrite à la fin de votre article n’a strictement aucun sens. Il s’agit d’une erreur dans une erreur.
    De plus les trois zéros après la virgule ne participent pas à crédibiliser le message.

    J’apprécie votre travail d’ordinaire, vous êtes souvent très pertinent, mais cet article me semble clairement défaillant.
    Je vous recommande de vous adresser à des spécialistes pour le corriger ou le rétracter le cas échéant. D’après mon expérience les universitaires sont d’un abord plutôt facile, je pense que vous ne risquez rien à essayer de leur demander conseil.
    (Je précise que ce n’est pas mon cas, je n’ai dans ce domaine que des connaissances élémentaires, (je suis donc susceptible de me tromper))

    Je conçois que ce commentaire soit désagréable à lire, et j’en suis navré. Nous faisons tous des erreurs ce n’est pas grave en soi, ce qui importe le plus, il me semble, c’est la façon dont nous réagissons face à nos erreurs.

    Je vous souhaite bonne continuation.

    1. Bonjour,
      On peut aussi se référer à l’IRSN qui indique :
      « Pour faciliter la tâche des autorités en charge du contrôle sanitaire, l’OMS publie un ensemble de valeurs guides correspondant aux concentrations des radionucléides dont l’ingestion régulière conduit à la référence de dose de 0,1 mSv/an. Pour le tritium, cette valeur est de 10 000 Bq/L. La référence dosimétrique de 0,1 mSv/an ne constitue pas une limite de potabilité ; l’OMS laisse aux Etats le soin de définir les mesures à mettre en œuvre pour réduire autant que possible les expositions du public lorsque ce niveau est dépassé, tout en rappelant que les standards internationaux déconseillent une exposition prolongée à un niveau de l’ordre de 1 mSv/an. »
      https://www.irsn.fr/sites/default/files/documents/expertise/rapports_expertise/IRSN_Rapport-Tritium-2020_PSE-ENV-2020-00002.pdf
      (page 4).
      A noter que l’IRSN dit aussi que la critique de la CRIIRAD relative à cette valeur comme référence est un arrondi digne d’EDF !
      La CRIIRAD rappelle que la méthode utilisée par l’OMS pour définir la valeur guide pour le tritium dans les eaux de boisson est fondée sur un principe de limitation de la teneur en radionucléides, limitation devant permettre de ne pas dépasser un niveau de dose efficace de 0,1 mSv/an4 lorsque l’eau est consommée régulièrement5. Son propre calcul de la dose efficace résultant de la consommation journalière d’une eau contenant 10 000 Bq/L de tritium (valeur guide proposée par l’OMS) la conduit à évaluer une dose de 0,132 mSv/an (et non de 0,1 mSv/an) et à conclure en conséquence que si l’OMS suivait rigoureusement l’objectif dosimétrique qu’elle s’assigne, la valeur guide devrait être de 7 610 Bq/L et non 10 000 Bq/L.
      La CRIIRAD souligne que cet écart est lié à l’usage d’une règle d’arrondi particulière pouvant conduire à une dose trois fois supérieure au niveau maximum de 0,1 mSv/an.

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