
Ce vote scandaleux devrait faire la Une de tous les médias occidentaux, il est pourtant relégué au second plan de l’actualité. Ce mercredi 23 juillet, la Knesset, le Parlement israélien, a voté l’annexion totale et définitive de la Cisjordanie occupée. En d’autres termes : Israël ne se content pas de commettre un génocide à Gaza après avoir intégralement rasé l’enclave, l’État colonial est aussi en train de s’accaparer tout le reste du territoire palestinien. C’est la fin officielle de la possibilité même d’une «solution à deux États».
Cette mesure a été adoptée par 71 voix contre 13, et proclame le soi-disant «droit naturel, historique et légal» d’Israël sur ce territoire palestinien. Le texte affirme que cela «renforcera l’État d’Israël, sa sécurité et empêchera toute remise en question du droit fondamental du peuple juif à la paix et la sécurité» et que «la souveraineté en Judée-Samarie [le nom biblique par lequel l’extrême droite coloniale désigne la Cisjordanie] fait partie intégrante de la réalisation du sionisme et de la vision nationale du peuple juif». Il a été voté par la coalition d’extrême droite de Netanyahou mais aussi par les élus d’opposition, ce qui souligne que le problème n’est pas simplement le gouvernement actuel, mais toute la classe politique israélienne et l’écrasante majorité de la population, qui soutiennent les pires exactions.
La colonisation israélienne de la Cisjordanie est une violation du droit international, dénoncée très régulièrement par l’ONU, mais sans qu’aucune sanction réelle ne soit appliquée. En juillet 2025, des colons armés ont détruit les puits d’Ein Samiya, à Ramallah, au centre de la Cisjordanie, coupant totalement l’accès à l’eau pour des dizaines de villages palestiniens de la région. En mai, Israël donnait le feu vert à la construction de 22 nouvelles colonies en Cisjordanie. Un village de la localité de Masafer Yatta était rasé par l’armée israélienne, c’était l’endroit où le documentaire «No Other Land», qui a reçu un oscar il y a quelques semaines, avait été tourné, montrant la réalité que subissent les palestiniens sous occupation. Israël envisage un transfert forcé total de l’ensemble des habitants de Masafer Yatta. En mars 2024, le ministre israélien des Finances, Bezalel Smotrich, annonçait la saisie de 800 hectares de terres en Cisjordanie pour y implanter de nouvelles colonies.
Les colons détruisent des oliviers, volent l’eau, rasent des maisons, les routes principales leur sont réservées : tout est fait pour rendre la vie impossible aux palestinien-nes qui habitent sur les dernières terres qui leur appartiennent. Entre autres crimes, en 2015, un bébé de 18 mois était mort brûlé vif dans l’incendie de sa maison, allumé par des colons qui avaient ensuite chanté et dansé. Leur racisme est décomplexé et leurs exactions systématiques. Régulièrement, des pogroms visent des village palestiniens : des colons armés viennent incendier des maisons et des voitures, et tuer au hasard des habitant-es pour les forcer à partir.
Ces colons fascistes ne sont pas une anomalie, ni des gens isolés. Ils sont une force politique majeure en Israël. En 1974, un parti est créé, le «Bloc de la foi» : celui-ci se base sur la Torah pour justifier le vol des terres qu’il reste aux palestiniens. Ce mouvement envoie ses membres s’installer directement dans les zones peuplées de palestiniens au nom d’une interprétation littérale du judaïsme. En 50 ans, le mouvement a pris une place énorme dans la société israélienne. Ils étaient 100.000 en 1992 et plus de 500.000 en 2022, avec des moyens, des armes, des partis, des relais… Depuis l’an dernier, les colons religieux d’extrême droite sont même représentés dans le gouvernement de Netanyahou. Et les vols de terres se sont encore accélérés, sous la protection de l’armée.
Nous assistons donc à un projet global de nettoyage ethnique fasciste, totalement assumé et soutenu par l’Occident. Ce grignotage de ce qu’il reste du territoire palestinien est une façon de rendre impossible tout accord de paix et d’empêcher toute possibilité de solution à deux États. En effet, les colons ont annexé par la force tellement de zones pour y construire leurs maisons que même si un accord était trouvé, l’État palestinien ne serait pas viable. La décision du 23 juillet vient finaliser cette stratégie. Il n’y aura bientôt plus aucune terre pour le peuple qui vivait en Palestine avant 1948. Et cela ne s’arrêtera pas à ces seuls territoires.
Les fascistes messianiques rêvent de «Grand Israël», pour réaliser leurs prophéties religieuses. Bezalel Smotrich a déjà déclaré qu’il voulait que l’État juif s’étende sur l’Arabie Saoudite, la Jordanie, l’Égypte, l’Irak, la Syrie et le Liban. Les interventions israéliennes en Syrie ces dernières semaines et au Liban l’an dernier vont dans ce sens : étendre le territoire hébreu toujours plus loin, pour réaliser des projets de conquêtes écrits dans des livres religieux il y a plus de 2000 ans.
Souvenez-vous, le 25 octobre 2023, Netanyahou l’annonçait très clairement : «Nous sommes le peuple de la lumière, eux sont le peuple des ténèbres… nous réaliserons la prophétie d’Isaïe». Le Livre d’Isaïe est un texte de l’Ancien Testament qui évoque l’exil du peuple juif à Babylone et son retour en Judée pour reconstruire le Temple à Jérusalem. En termes religieux, cette prophétie est appelée «eschatologique», c’est-à-dire qu’elle renvoie à la fin du monde. Selon ces délires, les juifs doivent reconquérir un territoire fantasmé pour réaliser la victoire finale de Dieu, y compris au prix de génocides, de guerres totales et d’embrasements généralisés.
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