Abbaretz, petite commune de Loire-Atlantique de 2000 habitants, située entre Nantes et Rennes. Alors que le village possède déjà deux écoles, une publique et la seconde privée, un projet d’école « hors contrat » est en train de voir le jour. « Hors contrat », cela signifie que cette école catholique intégriste n’appliquera pas les programmes de l’éducation nationale et sera complètement libre de conditionner les enfants à une vision religieuse du monde qui les entoure.

Un projet de construction en catimini
En novembre 2024, les abbarois·es prennent connaissance, via un permis de construire, d’un projet d’installation d’établissement scolaire primaire porté par l’association Monfort d’Abbaretz. Aucune publicité n’avait été faite dans la commune, et seul le panneau de construction indiquait la nature des travaux : il a été vu trop tard pour déposer un recours en mairie. Le terrain fait 3000 m2 et pourra accueillir plusieurs salles de classe, une sacristie, un oratoire et des hébergements pour les religieuses dominicaines qui enseigneront aux enfants. L’école pourrait accueillir jusqu’à 80 élèves de 3 à 10 ans. Les travaux de construction devraient débuter dès janvier 2026.
En ce qui concerne l’ouverture de l’établissement, le 24 octobre dernier le rectorat disait ne pas avoir connaissance de ce projet et Jean-Claude Pons (membre fondateur de Montfort d’Abbaretz) a de son côté confirmé que le dossier ne sera déposé qu’après la fin des travaux. La stratégie est bien rodée : construire vite et annoncer l’ouverture avant les autorisations nécessaires, afin de forcer la main aux autorités qui se retrouveront devant le fait accompli. Exactement la même stratégie que pour les projets écocidaires qui sont construits avant la fin des recours juridiques, puis déclarés illégaux alors que le mal est déjà fait, comme les méga-bassines ou le chantier de l’autoroute A69. Les capitalistes ou les intégristes, et globalement tous les ennemis de ce qui fait société, n’ont que faire de la légalité lorsqu’elle les empêche d’agir à leur guise.
Catholiques sédévacantistes : intégrisme et traditionalisme
Car l’association Montfort d’Abbaretz n’est pas une communauté religieuse comme les autres : il s’agit d’un groupe sédévacantiste, un courant déjà bien installé à Nantes et qui se développe en Loire-Atlantique. Le sédévacantisme est un courant du catholicisme qui considère les papes, depuis 1950 et surtout depuis le concile de Vatican II dans les années 1960, comme des hérétiques car « trop modernes ». Selon eux, le siège pontifical serait donc vacant, occupé par des usurpateurs. Les sédévacantistes ne reconnaissant plus l’autorité de l’Église ne font ainsi pas partie du diocèse et construisent leurs chapelles sur les fonds propres de leur communauté avec l’aide de richissimes donateurs.
Le projet d’Abbaretz revendique un enseignement à la vision « morale catholique traditionaliste », contre l’avortement (considéré comme un assassinat), le divorce, l’homosexualité mais aussi qui remet en question « la place » de la femme comme inférieure et au service de l’homme. Le membre fondateur de l’association Montfort d’Abbaretz, Jean-Claude Pons, a déjà tenu des propos homophobes en public, en particulier pour évoquer la « nature » qui se serait « vengée » à travers l’épidémie de VIH.
Les leçons de Bétharram ?
Les autorités (rectorat, maire, préfecture et tribunal) se veulent rassurantes. Le dossier doit encore être examiné et elles pourront s’opposer a l’ouverture « si l’intérêt de l’ordre public est menacé ou va a l’encontre de la protection de l’enfance et de la jeunesse » ou encore « s’il ressort que celui-ci n’a pas le caractère d’un établissement scolaire », en ajoutant que même les écoles « hors contrat » sont soumises à des contrôles stricts… tous les 5 ans. Si deux visites par décennie constitue un « contrôle strict », la rectrice Katia Béguin pourrait faire une syncope à la vue des contrôles judiciaires dont bénéficient régulièrement les militant·es de gauche pour leurs idées politiques.
En réalité, le rectorat a le pouvoir de fermer de tels établissements, mais le ministère est gangréné par l’extrême droite, qui préfère harceler des établissements musulmans plutôt que de lutter contre le séparatisme des intégristes catholiques, où la maltraitance des enfants va de pair avec la violence sociale. Le nombre d’écoles, y compris sous contrat (donc bénéficiant de financements publics) qui contreviennent aux principes les plus élémentaires de l’éducation sont pléthore. Citons les deux seuls établissements de Stanislas à Paris, qui a vu défiler des ministres et enfants de ministres et qui défrayait la chronique en 2024, et Notre-Dame de Bétharram près de Pau, où les cas de maltraitances et violences sexuelles sur les enfants se sont enchaînés durant des décennies sous le regard bienveillant de l’autorité. Quelles garanties pourrait bien nous offrir le rectorat sur de tels contrôles ?
Un collectif de citoyen·nes contre le projet
Des habitant·es surpris·es suite a la découverte de ce projet ont monté un collectif, dans un premier temps pour avoir des réponses, et par la suite pour exprimer leur opposition à l’école sédévacantiste. Car il y a de quoi s’inquiéter en découvrant le projet porté et la communauté qui le défend. Des habitant·es craignent que ce projet « s’inscrive dans le mouvement Stérin, ça ne fait pas de bruit mais c’est une idéologie fascisante qui se met en place insidieusement ».
Le collectif d’opposition appel a une marche « festive et pacifique » à Abbaretz, place de la maire, le 15 Novembre à 11h dans le but d’avertir la population. Une seconde marche est déjà prévue le 30 novembre, et le collectif ne compte pas s’arrêter là. À défaut du rectorat, ce sera à la population de défendre ses enfants face à la propagande intégriste que les sédévacantistes veulent leur servir.
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