Retour sur la manifestation nantaise contre tous les fascismes, 14 novembre 2015
Dimanche dernier, des engins incendiaires sont jetés dans une maison habitée par des migrants. Suite à cet acte, qui aurait pu coûter la vie à la cinquantaine de personnes qui dorment dans le lieu, une manifestation contre le racisme est organisée ce samedi.
Vendredi soir, les attentats frappent Paris. Le drame, inimaginable. L’émotion, l’État d’Urgence, les déclarations guerrières du gouvernement, les saillies racistes de la part d’une partie de la classe politique, la sidération.
Malgré tout, le rassemblement nantais est maintenu. Des centaines de personnes affluent sur la place du Bouffay, samedi après-midi. Les heures qui précèdent, les médias relayaient le rendez-vous, en affirmant qu’il s’agit d’un rassemblement en réponse aux attentats.
Pour certains, il s’agit donc de se recueillir après les événements de Paris, pour d’autres, de manifester suite à l’attaque raciste du week-end passé. Pour la plupart, il s’agit des deux. Le rassemblement aurait pu virer à la cacophonie, l’incompréhension, la dissension. Presque par magie il a, au contraire, permis de se réunir dans la diversité, d’échanger, et de manifester dans les rues de Nantes.
Des prises de paroles ouvertes se succèdent sur la place. Une femme émue rend hommage à un ami tué à Paris, une autre rappelle que les morts se comptent par centaines au Proche-Orient, dans l’indifférence de l’Occident. Plusieurs expliquent que les assassins de Paris ont le même objectif que l’extrême droite : semer la division ethnique et religieuse, et terroriser. Un membre du centre culturel Kurde et Alévi de Nantes vient rendre hommage aux victimes de la veille. Une manière de rappeler que le peuple Kurde se trouve en première ligne face à l’État Islamique, et subit simultanément la répression militaire de l’État Turc et les attentats terroristes, là encore, dans l’indifférence quasi-générale.
Après ce temps d’échange, alors que le cortège s’ébranle dignement, un groupe d’hommes cagoulés s’amuse à provoquer le cortège, exhibant des matraques télescopique, montrant du doigt certains manifestants : la BAC de Nantes. Visiblement, ces policiers semblent se réjouir des attentats et de l’État d’Urgence. Ils interpelleront plusieurs personnes, sans motif, et mettront la pression tout au long de la manif.
Dans les artères de Nantes, la manifestation défile, provoquant l’étonnement de beaucoup de badauds. Quelques slogans sont criés : «Leur guerre, nos morts !», «De Paris à Kobanê, Résistance !», «À bas tous les intégrismes, à bas tous les fascismes !».
Le défilé termine dans une salle ouverte pour l’occasion, par un nouveau temps d’échange. Déjà, on réfléchi à la suite, aux perspectives, aux manières de résister au rouleau compresseur raciste et sécuritaire qui risque à nouveau de nous paralyser.
Malgré la noirceur de l’époque, plus de mille nantais et nantaises ont pu se retrouver et dépasser la peur, ce samedi. C’est déjà une façon de résister.
Le même jour à Pontivy, des néo-nazis ont tiré des engins incendiaires sur des lycéens antiracistes. À Metz et à Lille, les identitaires ont essayé de perturber les hommages organisés. L’extrême droite se sent prête à passer à l’acte. Vigilance.