Les feux d’artifice plus dangereux que les grenades de la police ?


Désintox d’un mensonge obscène


Quelques grenades utilisées par la police française.

Cnews, toujours à l’avant garde des mensonges les plus délirants. À la veille du 14 Juillet, la chaîne de Bolloré donnait la parole à Christian Rodriguez, Directeur Général de la gendarmerie. L’occasion de parler, pour la énième fois, des feux d’artifice utilisés lors des révoltes au lieu des grenades de la police.

«J’ai rencontré hier des gendarmes blessés par des tirs de mortiers. Ils ont des brûlures. Les effets de ces mortiers sont très supérieurs aux effets des munitions que nous employons, de nos grenades».

Rappelons que ce qui est nommé mortier n’est qu’une gerbe d’étincelles qui crépitent. Ils seraient plus dangereux que des armes de la police, conçues pour blesser gravement ? Désintox d’un énorme mytho du boss de la gendarmerie.

La grenade GM2L – Grenade Modulaire Lacrymogène

Contrairement à ce que son nom indique, c’est une munition explosive potentiellement mortelle. Elle a remplacé à partir de 2019 une autre munition tout aussi terrible : la GLI F4, qui avait arraché plusieurs mains lors des Gilets Jaunes, et qui contenait du TNT.

Présentée comme «moins dangereuse», car elle ne contiendrait pas de TNT, la GM2L contient 48 grammes d’un produit appelé Hexocire. Il s’agit de l’explosif RDX mélangé à de la cire. Un produit 1,6 fois plus puissant que le TNT, qui entre dans la composition du C4, et utilisé notamment par l’industrie militaire pour les ogives de lance-roquettes. Lorsqu’il explose, la vitesse de détonation de l’Hexocire atteint 8750 mètres par seconde.

En un an, au moins deux personnes ont eu la main pulvérisée par ces munitions : un homme de 44 ans lors d’une manifestation pour les libertés à Paris, le 5 décembre 2020, et un jeune de 22 ans lors d’une Free Party à Redon le 19 juin 2021. À Sainte-Soline, des dizaines de personnes ont été mutilées par ces armes, qui provoquent littéralement des cratères dans le sol en explosant. Comme à la guerre.

Cette munition est considérée comme tellement dangereuse que le ministère de l’Intérieur décide en 2021 d’interdire à ses agents de l’envoyer à la main pour éviter les blessures dans ses rangs. En revanche, il autorise les tirs à longue distance, vers la foule, à l’aide de lanceurs : un usage encore plus agressif aux conséquences aléatoires.

La grenade dite « de désencerclement »

Une imitation de grenade militaire à fragmentation. Composée d’explosif, elle détonne à 150 décibels – un effet « psychologiquement agressif qui vise à déstabiliser les cibles » selon ses concepteurs – et projette à pleine puissance 18 projectiles en caoutchouc. Chacun des palets de caoutchouc a une énergie d’impact de 80 joules, ce qui équivaut à dix boules de pétanque lâchées à une hauteur d’un mètre. En juin 2019, le gouvernement fait l’acquisition de 40.000 de ces munitions pour compléter le stock existant, des grenades appelées GENL – Grenade à Éclats Non Létaux.

Comme l’indique le nom « désencerclement », cette munition est en principe strictement réservée aux cas où un policier serait encerclé, pour pouvoir se dégager lorsque sa vie est en danger. En réalité, elles sont tirées par milliers pour attaquer la population. Elles ont brisé de nombreuses vies en arrachant des yeux : une mère de famille à Villemomble en juin 2013. Laurent, syndicaliste en septembre 2016, ainsi qu’un syndicaliste SUD rail en 2023. Gwendal à Rennes en 2019. Maud à Grenoble en 2007… ou encore Romain, photographe tombé dans le coma après un tir dans la tête en 2016.

Ces grenades sont tellement dangereuses qu’elles blessent aussi leurs utilisateurs. Le 16 février 2010, dans le centre d’entraînement de Saint-Astier, seize (seize!) gendarmes mobiles sont blessés par l’explosion d’une seule grenade de « désencerclement » lors d’un entraînement. En novembre 2020, un agent de la BAC de Nantes se blesse gravement la main avec cette grenade. De même qu’un policier à Rennes en 2016. Aucun feu d’artifice n’a jamais arraché d’œil ou explosé de main au sein des forces de l’ordre.

La grenade assourdissante à main

Enfin, la dernière arrivée se nomme ASSD, pour «assourdissante». C’est la grenade la plus puissante utilisée en maintien de l’ordre en France avec la GM2L. Rien que le blast peut faire exploser des tympans. Le 1er Mai à Paris, un gendarme a malencontreusement envoyé une grenade ASSD sur le casque d’un de ses collègues. Une vidéo montrait l’explosion, énorme, au niveau de la tête du gendarme, qui s’effondrait immédiatement malgré son équipement.

Libération révélait peu après que le gendarme souffrait de plusieurs vertèbres cassées et qu’il présente un large hématome. Une blessure importante, dont il gardera probablement des séquelles à vie. C’est, de très loin, le blessé le plus grave côté forces de l’ordre depuis le début du mouvement. Jamais le moindre feu d’artifice n’a ainsi blessé un agent.

Des «brûlures» provoquées par des étincelles d’un côté. Des mains arrachées, des yeux crevés, des comas causés par des grenades de l’autre. Sachant que les armes de la police sont tirées sur des personnes non protégées, alors que les gerbes d’étincelles arrivent sur des boucliers, des casques renforcés, des carapaces et des gilets pare-balles. Chacun jugera où sont les «effets supérieurs ». Et comprendra à quel point l’État français ment à tous les niveaux, tout le temps.


Et si on prenait le chef de la gendarmerie au sérieux ? Donnons aux révolté-es des grenades, et remplaçons les armes de la police par des feux d’artifice ?


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