Désintox de la dernière opération diffamatoire des fanatiques d’Israël
«Avoir du sang sur les mains» : l’expression qui désigne un crime est aussi vieille que la langue française, et a des équivalents dans le monde entier. C’est une image régulièrement utilisée pour dénoncer les bourreaux, les dictateurs, des criminels de guerre.
Par extension, la main couverte de peinture rouge est un symbole mondialement connu dans les manifestations contre les guerres ou les régimes autoritaires.
Ainsi, vendredi 27 avril, les étudiant.e.s de Science Po mobilisés pour la Palestine et expulsé.e.s par la police sont sorti.e.s du bâtiment en levant des mains rouges en l’air.
Immédiatement, une opération concertée de diffamation s’est mise en marche. Lancée par le porte-parole de l’armée israélienne Julien Bahloul, régulièrement invité sur BFM, elle a tout d’une théorie absurde : se couvrir les mains de peinture rouge serait une référence à un événement survenu en octobre 2000 en Cisjordanie, lors duquel deux soldats israéliens avaient été tués, et leur assassins avaient eu les mains tâchées de sang.
Selon cette logique, les mains rouges n’auraient rien à voir avec le massacre en cours à Gaza, les étudiants de Sciences Po auraient en fait rendu hommage à un double meurtre remontant à 24 ans, dans une logique antisémite et terroriste !
Cette interprétation paraît délirante : l’affaire est méconnue, surtout pour des jeunes nés après l’an 2000. Il y aurait donc, tapis dans l’ombre à Science Po, des idéologues islamistes qui auraient incité les étudiant.e.s à reproduire ce symbole secrètement lié à l’antisémitisme ? Inventer une telle théorie du complot en dit plus sur les obsessions des sionistes qui la propagent que sur les manifestant.e.s dénoncé.e.s.
Pourtant, ce lien inventé de toute pièce entre une main ensanglantée et l’antisémitisme a été massivement relayé. Le célèbre dessinateur Johann Sfar en a fait un planche de Bande Dessinée. Plusieurs représentants du PS ont diffusé cette calomnie, de même que le médiatique Raphaël Ethnoven et des groupuscules sionistes ou encore des politiciens d’extrême droite, qui ont bien pris soin de cracher au passage sur la France Insoumise.
Chaque publication a récolté des milliers de «likes» et de partages, et tout cela a même été développé sur la chaîne BFM. L’intox qui aurait pu faire rire tellement elle est absurde, a réussi à s’imposer.
De nombreux contre-exemples :
Au printemps 2018, un manifestant a eu la main arrachée à Notre-Dame-des-Landes par une grenade de la gendarmerie. En réponse, des centaines de manifestants ont défilé avec des mains ensanglantées et tracé des pochoirs de mains rouge sur les murs de Nantes. Était-ce aussi de l’antisémitisme ?
Il y a quelques jours à Tel Aviv, des israéliens ont brandi des mains rouges lors d’un rassemblement pour la libération des otages. Antisémite ?
En 2021 en Australie, des manifestantes pour le droit des aborigènes brandissaient aussi des mains peintes en rouge. De même que les activistes pour les droits des animaux à Londres, que des manifestants Black Live Matters aux USA, des soutiens de la révolte en Iran après la mort de Jina Mahsa Amini. Un animateur de la chaîne États-unienne Fox News avait peint sa main en rouge à l’antenne pour dénoncer le régime de Bachar El Assad. La main rouge est aussi un symbole choisi par de nombreuses ONG dans le monde pour dénoncer les enfants soldats… Les exemples sont innombrables.
Soit il y a un immense complot antisémite pour utiliser cette référence occulte à un événement survenu en 2000 en Cisjordanie, soit les propagateurs de cette fake news ont complètement vrillé. Il s’agit bien d’un symbole ultra-commun pour dénoncer les violences d’État, militaires ou policières, d’où qu’elles viennent.
Alors d’où vient cette diffamation ? De l’État israélien, directement. Le compte Twitter officiel d’Israël avait dénoncé le port d’un pins avec une main rouge par des personnalités du monde du cinéma en soutien à Gaza lors de la cérémonie des Oscars, en l’assimilant à cette histoire remontant à 2000. Depuis, tous les fanatiques pro-Israël, qui ne connaissaient parfois même pas l’affaire, la brandissent comme une «preuve» d’antisémitisme.
Ces mêmes personnes ont accusé une peluche en forme de pieuvre appartenant à l’écologiste Greta Thunberg d’être un symbole secrètement antisémite, mais aussi le mot «camper» utilisé par Mélenchon dans un tweet, ou encore un tag «fuck antisémitisme» réalisé près d’une université à Paris d’être antisémite. De même, les étoiles de David de couleur bleues inscrites en octobre sur les murs de Paris par un homme d’affaire disant soutenir Israël. À force, plus aucun symbole ne pourra plus être utilisé.
Pour ces gens, tout est antisémite, sauf le Rassemblement National, authentique parti fondé par des nazis, et avec qui ils manifestent sans problème. Allez comprendre.
Cette affaire des mains rouges démontre la guerre médiatique menée par des groupes d’influence pro-israéliens organisés, qui utilisent le mensonge systématique et délibéré comme arme, sans aucun scrupule.
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