Bayrou : émanation du parti unique macro-lepéniste


Il ne reste que deux pôles : le front populaire ou le bloc réactionnaire, la résistance ou l’infamie


Bayrou, un dossier sous le bras, et derrière lui Marine Le Pen.

La France est gouvernée de fait par une coalition illégitime réunissant le patronat, le macronisme et l’extrême droite. Un nouvel exemple lundi 27 janvier sur LCI. Le Premier ministre François Bayrou a repris sans complexe les mots et les idées du Rassemblement National, évoquant un «sentiment de submersion migratoire».

À propos des «apports étrangers», le Premier Ministre a déclaré qu’il fallait «qu’ils ne dépassent pas une proportion», ajoutant «dès l’instant que vous avez le sentiment d’une submersion, de ne plus reconnaître votre pays, les modes de vie ou la culture, dès cet instant-là vous avez rejet». Relancé par l’animateur de LCI, il précisait : «Ce seuil n’est pas encore dépassé mais on [s’en] approche. En tout cas, c’est dans cette zone qu’on se trouve».

Plus grave, la chaine de télévision possédée par le milliardaire Martin Bouygues avait délibérément orienté la discussion. Le pseudo-journaliste Darius Rochebin avait utilisé la photo de classe de François Bayrou en expliquant : «Il n’y a que des blancs. Une foule française aujourd’hui est différente d’une foule de votre enfance. Certains Français sont gênés de cela. […] Est-ce qu’il y a une logique, souhaitable ou non, à ce que la France soit métissée ?» Poisseux.

Tout le monde l’aura constaté : en France, les médias de masse ont opté pour le néofascisme depuis plusieurs années. L’animateur aurait pu poser des questions sur les attentes sociales et écologistes de la population, qui sont majoritaires selon tous les sondages. Enquête après enquête, ce sont toujours les mêmes thèmes qui arrivent en tête des préoccupations des français : le pouvoir d’achat, l’accès aux soins ou la situation économique du pays. Mais non, LCI voulait que François Bayrou déroule un discours raciste.

Suite à cette sortie, Gérald Darmanin a applaudi des deux mains. Invité ce mardi 28 janvier sur la chaine d’extrême droite Cnews, il a estimé que François Bayrou était «courageux» évoquant même une «avancée». Il faut dire que Darmanin trouvait déjà Marin Le Pen «trop molle» vis à vis de l’Islam en 2021.

Le RN, lui, triomphe une fois de plus : «Je pense qu’on a gagné la bataille idéologique depuis très longtemps. (…) Ça fait très longtemps que les Français puis les gouvernants, ont compris qu’il y avait un problème avec l’immigration» a lancé Sébastien Chenu sur France Inter – la radio de service public est, elle aussi, devenue l’un des porte-voix du RN. Chenu veut aller plus loin : il ne faut «pas se contenter des mots de l’extrême droite mais passer aux actes».

S’agissait-il d’un dérapage de François Bayrou ? Absolument pas. Interpelé par le Parti Socialiste à l’Assemblée Nationale au lendemain de sa déclaration, il a persisté et signé. Selon lui, ses mots sont «adaptés à la réalité». Il a même ajouté que «toute une communauté de départements français» serait «confrontée à des vagues d’immigration illégale telles qu’elles atteignent 25% de la population». Le tout sous les acclamations du RN !

Le macronisme aime colporter une réalité alternative. En 2023, il y avait en France, selon l’Insee, 7,3 millions d’immigrés sur 68,1 millions d’habitants, soit 10,7 % de la population totale. Parmi ces immigrés, 2,5 millions ont acquis la nationalité française. Il y avait donc 5,6 millions d’étrangers vivant en France en 2023, soit 8,2 % de la population. À titre de comparaison, les immigrés représentaient 7,4 % de la population totale il y a cinquante ans. Quant à l’idée souvent répétée que la France serait «laxiste» ou trop «généreuse», c’est aussi un gros mensonge : notre pays est classé à la 21ème position des pays d’accueil dans l’Union Européenne, sur 27 États membres.

Cette alliance Macro-Lepéniste n’a rien de nouveau. Dès 2022, le Ministre de la Justice Dupond-Moretti appelait à «avancer ensemble» avec le Rassemblement National, et des députés assumaient de «discuter» avec l’extrême droite pour «trouver des majorités».

En décembre 2023, les macronistes votaient avec le RN la Loi immigration. «Si le RN touchait des droits d’auteurs sur son programme, cela coûterait cher à nos opposants» se félicitait Marine Le Pen. La députée du RN Laure Lavalette, ancienne du GUD, s’extasiait à la télévision : «On a mis le pied dans la porte, et on va aller beaucoup plus loin». Le 19 décembre 2023, Marine Le Pen parlait déjà d’une «victoire idéologique».

Ainsi la France est dirigée par un parti unique macro-lepéniste, une ligue visant à empêcher le partage des richesses et à faire barrage à la gauche, même modérée.

La plupart des membres de la droite dite «républicaine» parlent déjà de «grand remplacement», théorie complotiste et raciste. Le Ministre de l’Intérieur ne cache plus son idéologie. Macron recycle de nombreux concepts d’extrême droite comme «l’ensauvagement», le «réarmement civique et démographique», le tout en réhabilitant Pétain et Maurras.

François Bayrou à l’Assemblée Nationale le 14 janvier, pour son discours de politique générale, citait l’auteur Jean-François Gravier, qui a travaillé pour le régime de Vichy en tant que chargé de mission au Secrétariat général. En janvier 2024, lors d’un discours télévisé, Macron avait résumé son programme «autour d’une ligne simple» : «Que la France reste la France». C’était littéralement le slogan de campagne du néofasciste Éric Zemmour.

Bayrou, toujours lui, avait publiquement soutenu Marine Le Pen dans le cadre de son procès, alors qu’elle risque l’inéligibilité. En décembre, à peine nommé Premier Ministre, il avait refusé de qualifier le RN de parti d’extrême droite, en se contentant de déclarer que, pour lui, le parti «ne respecte pas un certain nombre de valeurs et de principes, il est protestataire». Finalement, le RN serait donc un interlocuteur acceptable, contrairement à la France Insoumise, constamment traitée d’«anti-républicaine».

Juste avant l’élection présidentielle de 2022, François Bayrou avait déjà volé au secours de Marine Le Pen pour lui donner sa signature, nécessaire pour se présenter. À l’époque, il disait avoir parrainé la candidate «pour sauver la démocratie».

Lors d’un débat télévisé pour les législatives de 2022, face à un député du Rassemblement National, Bayrou avait été très conciliant avec le parti. Il avait lancé à son propos : «Je ne sais pas si ça s’appelle extrême droite». En septembre dernier, François Bayrou déclarait sur BFM, à propos de la dissolution de l’Assemblée : «Le but de cette élection n’était pas de désigner un vainqueur mais d’écarter des gens dont on ne voulait pas». Sous-entendu : les partis de gauche.

L’apothéose de sa sinistre carrière est, bien évidemment, la nomination du gouvernement le plus réactionnaire de la Cinquième République, en dépit du verdict des dernières élections.

L’histoire nous rappelle que l’extrême-centre, dans les années 1930 comme aujourd’hui, est une tendance politique flasque, qui est capable de dire tout et son contraire, pour s’allier en dernière instance avec l’extrême droite quand il s’agit de préserver les intérêts des puissants et l’ordre établi.

AIDEZ CONTRE ATTAQUE

Depuis 2012, nous vous offrons une information de qualité, libre et gratuite. Pour continuer ce travail essentiel nous avons besoin de votre aide.

Faites un don à Contre Attaque, chaque euro compte.

Laisser un commentaire