Macron félicite Kast, le nouveau président chilien d’extrême droite


Après Meloni, Trump, Milei, Netanyahou ou Poutine, Macron félicite Kast : l’amicale du capitalisme ensauvagé se porte bien


Antonio Kast exulte lors d'un discours, surmonté du tweet de Macron qui le félicite pour son élection à la tête du Chili.

Le 15 décembre, juste après la proclamation des résultats des élections présidentielles au Chili, le compte officiel de Macron sur X se réjouit : «Félicitations à Antonio Kast pour son élection comme Président de la République du Chili. Je forme le vœu que nos deux pays poursuivent leur travail pour relever les grands défis mondiaux et approfondir nos relations».

On sait depuis 2017 que la carte du «barrage à l’extrême droite» qui a permis à Macron de gagner sans faire campagne est une arnaque, mais il ne fait plus semblant depuis longtemps. Un président de centre droit aurait pu, par exemple, s’inquiéter des victoires de figures d’extrême droite partout dans le monde. Ou, au pire, ne pas commenter. Macron choisit de s’en extasier publiquement.

Antonio Kast, qui vient de remporter largement les élections chiliennes, est fils d’un ancien soldat nazi ayant émigré au Chili après guerre, un catholique traditionaliste, père de neuf enfants, ennemi des droits des femmes et des étrangers. Il annonce l’expulsion de centaines de milliers d’immigrés, la construction d’un mur à la frontière, une hausse de la puissance de feu de la police et le déploiement de l’armée dans les zones indigènes et les villes considérées comme criminogènes. Il veut aussi attaquer les droits contraceptifs des femmes, déjà menacés partout en Amérique Latine. Bref, il veut appliquer le modèle trumpiste qui triomphe un peu partout.

Surtout, Kast ne cache pas sa nostalgie d’une dictature fasciste. En 1973, l’armée du Chili renversait le gouvernement de gauche élu, pour imposer pendant deux décennies un régime militaire d’extrême droite, basé sur la torture de masse, la terreur, les disparitions d’opposants… Cette machine répressive a servi à imposer au Chili un programme ultra-libéral d’une violence unique au monde pour l’époque, téléguidé depuis les USA. Le Chili a été le laboratoire du néolibéralisme autoritaire qui s’impose aujourd’hui partout.

En 1988, le dictateur Pinochet a finalement organisé un référendum, consultant pour la première fois la population pour savoir s’il pouvait, oui ou non, rester au pouvoir. Le «non» l’avait emporté, le tyran avait quitté la tête de l’État deux ans plus tard. Il est mort paisiblement dans son lit, en 2006, sans avoir jamais été jugé pour ses crimes, et avec le soutien de l’occident.

Pour la petite anecdote, entre autres horreurs commises au Chili pendant la dictature, une petite communauté allemande située au sud de Santiago, nommée Colonia dignidad, a servi de centre de torture et d’exécution d’opposants. Dans cette localité, gérée par un gourou issu de l’armée allemande et venu au Chili après-guerre, c’est un véritable village nazi qui vivait en autarcie, sans être inquiété. Sous Pinochet, la police politique y envoyait des militants et militantes de gauche, que les nazis se chargeaient de réduire en esclavage, de violer, de torturer et de faire disparaître. La Colonia dignidad a aussi été accusée de nombreux actes pédocriminels. La diaspora allemande n’étant pas immense au Chili, une enquête sur les liens potentiels entre Antonio Kast, lui-même fils de nazi, et cette terrible « colonia » ne serait pas inintéressante.

Mais revenons au referendum pour ou contre Pinochet de 1988. Tous les présidents chiliens qui se sont succédé depuis la fin de la dictature ont publiquement affirmé avoir voté «non». Le nouveau président chilien est le premier à avoir ouvertement reconnu avoir voté «oui». Il avait même participé à une publicité pro-Pinochet à l’époque ! Voilà de quelles horreurs le nouveau président est l’héritier, et voilà ce que félicite Macron avec ferveur.

Les présidents d’extrême droite, c’est une seconde passion pour le locataire de l’Élysée. Il a tissé un véritable idylle avec Javier Milei, le président libertarien fou d’Argentine. Après l’élection de Milei, ce dernier avait envoyé un maillot de foot à Emmanuel Macron avec écrit «Vive la liberté putain !» en espagnol, son slogan fétiche. Plutôt que d’ignorer ce «cadeau» grossier, le français avait choisi de poser avec et d’en publier la photo. En retour, Milei avait tweeté ses remerciements ponctués à nouveau de l’expression grossière «carajo». Ce soutien de Macron était une aubaine pour le nouveau président argentin, elle lui donnait une crédibilité.

En octobre 2024, la sœur du président Argentin choisissait de faire son premier déplacement officiel en France. Elle était reçue à l’Élysée par Brigitte Macron. Karina Milei n’est pas seulement la cadette du président d’extrême droite, elle est aussi la secrétaire générale de la présidence, décrite comme «l’éminence grise de son président de frère». Brigitte Macron et Karina Milei avaient ainsi «discuté de l’attrait des investisseurs français en Argentine» mais aussi abordé la question de la «bataille culturelle» que mène le gouvernement d’extrême droite.

En novembre 2024, avant même l’annonce des résultats définitifs des élections aux USA, Macron était l’un des premiers présidents du monde à féliciter Donald Trump. En 2023, au début du génocide à Gaza, il se rendait en Israël pour affirmer son soutien inconditionnel à l’État colonial et disait à Netanyahou, devant la presse du monde entier : «Cher Bibi». En octobre 2022, Macron se précipitait à Rome pour féliciter la gagnante des élections italiennes : la néofasciste Giorgia Meloni, nostalgique de Mussolini.

Autre amitié souvent oubliée : avant de le décrire comme un diable menaçant l’Europe, Macron était très proche de Poutine. En 2016, quand il était encore ministre l’Économie, il militait publiquement pour «lever les sanctions économiques contre la Russie». À peine élu en mai 2017, il mettait en scène une immense réception diplomatique, en invitant Poutine au Château de Versailles. C’était son premier geste de politique étrangère. Un an plus tard, il était reçu en grande pompe à Saint-Pétersbourg, puis organisait une coopération franco-russe sur la cybersécurité. Amusant, avec le recul. En mai 2019, la France faisait pression sur le Conseil de l’Europe pour qu’il réintègre pleinement la Russie qui en avait été exclue suite à l’annexion de la Crimée. En 2020, Darmanin se rendait en Russie pour organiser une collaboration sécuritaire. Et le camp macroniste qui diabolise désormais la gauche pour sa complaisance prétendue avec la Russie !


De Kast à Trump, de Milei à Poutine, personne ne pourra dire que les fantasmes politiques de Macron étaient subtilement dissimulés.


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