Que se passerait-il si nous diffusions des vidéos d’exécution armées de patrons ou de militants d’extrême droite ?
«J’aime beaucoup Papacito, c’est un garçon sympathique et intelligent» expliquait Eric Zemmour l’été dernier sur Cnews. C’était après la vidéo d’un youtubeur d’extrême droite qui avait diffusé l’exécution d’un «gauchiste de la France Insoumise» en tirant au fusil sur un mannequin avant de lui planter des coups de couteau. Une vidéo d’appel au meurtre politique vue des centaines de milliers de fois.
Le même youtubeur, qui pose notamment avec le symbole de la phalange franquiste – rappelons que le coup d’État d’extrême droite en Espagne a tué des centaines de milliers de personnes – a également évoqué un attentat à la voiture bélier sur une «manifestation de gauchistes», avec 200 mannequins. Un mode opératoire terroriste, mis en scène sur un ton sarcastique.
Armes à feu, suggestion d’attentat, tir à balle réelle et décapitation de mannequin. Le tout grimé avec des symboles totalitaires. En plein délire contre le «séparatisme» et contre la «radicalité», on suppose que le gouvernement a fortement réagi à ces opérations d’extrême droite, que les armes ont été confisquées, et les propagandistes inquiétés ? Non ?
Rien de tout cela évidemment. L’année dernière, Jean-Luc Mélenchon avait déposé plainte pour «provocation au meurtre» contre le YouTubeur d’extrême droite. Elle a été classée sans suite, explique le média StreetPress, qui vient d’apprendre la nouvelle en marge de l’université d’été de la France Insoumise. «C’est assez déconcertant» s’étonne Mathieu Davy, l’un des avocats de Mélenchon. «On a reçu un document qui fait en tout et pour tout une demi page, nous indiquant que le délit n’est pas caractérisé» explique une autre avocate de l’ancien candidat. Une nouvelle plainte est déposée.
D’autres vidéos sur Youtube montrent des militants d’extrême droite s’entraîner au tir, avec des armes de gros calibre. En avril dernier, des néo-nazis assassinaient par balle un joueur de rugby internationalement connu : Federico Martín Aramburú. Le père de famille s’était interposé dans une altercation raciste et les néo-nazis l’ont exécuté en pleine rue. Les médias et la classe politique ont été d’une discrétion étonnante sur cette affaire, en pleine campagne présidentielle.
Les néofascistes armés publient donc des vidéos, conseillent leur public d’en faire autant, et mettent en scène exécutions et attentats sans la moindre conséquence. Ils reçoivent même des félicitations et des invitations dans les médias mainstream. Papacito et ses amis sont invités sur les plateaux télé et les radios des milliardaires.
On ne va pas se mentir, on serait curieux de tenter l’expérience de notre côté. Publier des vidéos avec des simulacres d’exécutions de patrons et de fascistes à balles réelles. Cela réjouirait sans doute beaucoup de monde. Mais le risque d’une perquisition dès le lendemain matin, d’une descente antiterroriste à nos domiciles, et probablement de la prison ferme n’est pas négligeable. Ceci étant dit, le classement sans suite pour Papacito pourrait faire jurisprudence : il est autorisé de mettre en scène l’exécution d’ennemis politique sur Youtube. Avis aux amateurs !
Rappelons que Cnews et BFM ont fait trois jours de reportages diffamatoires contre Nantes Révoltée parce que nous avons publié une affiche d’un dessin de Zemmour avec une cible. Nos comptes avaient même été suspendus. Ces dernières années, plusieurs personnes ont été envoyés derrière les barreaux simplement pour s’être défendus face à l’extrême droite. Il y a quelques jours, des militants de Lyon on été mis en garde à vue pour un collage d’affiches. À Nantes, un faux procès de Macron suivi d’une pendaison de mannequin lors d’une manifestation en 2018 a provoqué des arrestations, gardes à vue et condamnations. Des procédures d’exception touchent des militants fichés pour avoir exprimé des idées.
C’est la nouvelle normalité en France : les fascistes ont littéralement tous les droits, et celles et ceux qui s’y opposent sont écrasé-es.
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