Paris : démonstration de force des kurdes pour la vérité et la justice


Impressionnante manifestation dans les rues de Paris, samedi 11 janvier 2025. Plus de 15.000 Kurdes venu-es de toute l’Europe défilent dans la capitale française pour exiger la justice et la vérité pour les six activistes kurdes assassiné-es en 2013 et 2022.


Des milliers de kurdes à Paris pour réclamer la vérité et la justice.

Retour en arrière. Le 23 décembre 2022, il y a un peu plus de deux ans, un criminel raciste de 69 ans, déjà condamné pour une attaque armée contre un campement de réfugié-es, ouvrait le feu sur le centre culturel Kurde de Paris et plusieurs commerces environnants appartenant à la communauté. Trois personnes trouvaient la mort.

La première se nommait Emine Kara, dont le nom de combattante était Evin Goyi. Cette militante fut une figure de proue du mouvement de libération des femmes kurdes. Elle fut de celles qui ont lancé le célèbre slogan «Jin, jiyan, azadi», «Femme, vie, liberté» qui résonne aujourd’hui dans les rues d’Iran. Ce slogan est utilisé depuis des années par le mouvement révolutionnaire kurde, en particulier la branche féminine du Parti de la paix et de la démocratie, formation liée au PKK, le Parti des Travailleurs du Kurdistan. Emine Kara avait combattu Daesh au Rojava. Réfugiée en France, elle avait déposé une demande d’asile politique, refusée par les autorités. Et plutôt que d’être protégée, elle a été tuée sur le sol français.

La deuxième victime était un musicien kurde, Mîr Perwer, jeune artiste auteur de nombreuses chansons et reconnu comme réfugié politique. Il avait été inquiété en Turquie pour ses œuvres.

Le troisième défunt, Abdullah Kizil, est décrit comme «un citoyen kurde ordinaire» qui fréquentait «quotidiennement» le lieu associatif où a eu lieu l’attaque. Incontestablement, les trois personnes tuées sont militantes, reconnues pour leurs engagements auprès de structures sociales et politiques, tuées parce que kurdes et membres d’une communauté qui lutte contre l’impérialisme et pour l’émancipation.

L’attentat avait lieu quelques jours avant une grande manifestation pour commémorer le 10ème anniversaire d’un autre crime commis contre les kurdes à Paris : l’assassinat de trois militantes, Fidan Dogan, Sakine Cansiz et Leyla Soylemez. Ces trois figures importantes du mouvement avaient été exécutées par un agent turc dans un centre d’information kurde, le 9 janvier 2013. Les commanditaires ne sont toujours pas officiellement identifiés, bien qu’il soit évident que la main du régime turc ait guidé le tueur. Ce triple féminicide commis à Paris contre d’importantes personnalités du mouvement kurde avait ébranlé toute la diaspora. Fin 2022, c’est encore une réunion de femme qui était ciblée.

Après l’attentat de 2013, l’enquête avait révélé les liens du tueur avec le service de renseignement turc (MIT), mais les investigations n’avaient pas été poussées, le suspect était mort dans en prison avant d’être jugé. Pratique pour éviter de retrouver les réels responsables, qui avaient orchestré un crime sur le sol français pour éliminer des opposantes.

Concernant le triple meurtre de 2022, la version officielle se limite encore aujourd’hui à l’acte isolé d’un militant d’extrême droite. Pourtant, le vendredi 23 décembre 2022, une réunion nationale devait se tenir au local du Centre Démocratique Kurde afin de préparer la manifestation à venir, et des responsables du mouvement étaient attendues.

Selon l’Humanité, le tueur aurait été déposé par une voiture et s’était directement rendu devant ce bâtiment pour tirer. Il s’était muni de quatre chargeurs remplis avec une arme de poing. Plus troublant, 20 jours plus tôt, un responsable kurde avait alerté les services de renseignement français concernant ses craintes pour la sécurité des kurdes de France. Sans conséquence.

Encore plus troublant, un appareil de surveillance avait été découvert la semaine suivante à proximité, immédiatement détruit par la police française. Qui a amené cet homme à cet endroit précis, au moment d’une réunion décisive pour le mouvement Kurde ? Comment croire qu’il s’agit d’un acte isolé, survenu à cet endroit par hasard ? Qui a intérêt à faire de l’ombre sur ces événements ?

La marche du 11 janvier 2025 pour réclamer que la lumière soit faite sur ces deux attentats, et pour rendre hommage aux six victimes, était organisée par le Mouvement des femmes kurdes en Europe et le Congrès des sociétés démocratiques kurdes d’Europe derrière le slogan «On connaît les commanditaires, mais la France se tait».

Des pancartes et des banderoles pour ne pas oublier les victimes kurdes sur le sol français.

Cette mobilisation a été une démonstration de force des Kurdes et de leurs allié-es, dans un contexte très tendu : en Syrie, le territoire du Rojava est plus menacée que jamais par l’impérialisme turc et par la recomposition politique en cours dans la région. En Turquie, les Kurdes continuent à subir la répression du gouvernement autoritaire, qui détient depuis plus de 20 ans le leader Abdullah Ocälan, penseur du Confédéralisme Démocratique. Une doctrine expérimentée au Rojava.

Lors de la manifestation parisienne, une porte-parole du Conseil démocratique kurde en France l’a rappelé : «Nous n’abandonnerons pas notre quête de justice et notre cause. Notre lutte continuera de s’intensifier jusqu’à ce que nous obtenions la libération du leader Öcalan et que nous obtenions un statut au Kurdistan».


Photos : Kurdistan au féminin, Conseil Démocratique Kurde en France

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Une réflexion au sujet de « Paris : démonstration de force des kurdes pour la vérité et la justice »

  1. La communauté Kurde fait face au capitalo facho terrorisme de la bourgeoisie turc, avec des services de renseignements français qui se rendent complices de cette forme de terrorisme tout simplement en fermant les yeux

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